
A Antalaha, les banquiers deviennent des enquêteurs mais en catimini. Avec les dispositions lutte contre le blanchiment et éviter les trafiquants de bois précieux comme clients, les dirigeants des établissements financiers sont contraints de lancer leurs propres enquêtes sur les mafias. Une mission périlleuse puisque l’avenir d’une banque dépend aussi des capitaux en mouvements. Les mafieux sont de gros clients et fermer leurs comptes peut entraîner de grosses pertes pour les banques. Et c’est devenu un casse-tête pour les banquiers locaux. Sur place, une seule banque s’obstine à ouvrir les comptes des trafiquants. Conscient que l’argent sale des bois de rose doit-être blanchi afin d’éviter leur repérage et aussi pour que les bénéfices soient insoupçonnables, les mafieux optent pour des comptes séparés en utilisant des intermédiaires. Cette opération de blanchiment démarre en partie à Antalaha, la capitale de la vanille. Les exploitants illicites investissent dans l’acquisition de biens immobiliers et de terrains sinon ou se lancent dans le commerce de la vanille. Dans le premier cas, ils construisent des jolies maisons et achètent des belles voitures qu’ils hypothèquent par la suite en utilisant le nom d’une tierce personne appelée alors « intermédiaire ». La formule ayant été adoptée par la pègre, une folie de la construction et d’achat de voitures s’emparent de la ville. Un phénomène qui donne une autre image d’Antalaha puisque la ville est devenue une réplique réduite de la ville de Nice en France. On y voit des Mustangs, V8, Amaroks, Touaregs etc. sur les routes bien entretenues de la ville. De même, les maisons récemment construites ont des formes architecturales très personnalisées laissant penser que leurs propriétaires ont à loisir des moyens pour le permettre. Sur place, nous avons su que Anana, le très grand Manitou du bois de rose a acheté tout un carrefour en plein centre ville d’Antalaha. Il s’est également procuré de presque toute la propriété de Kaisara (lui aussi un puissant dans le trafic) qui est devenu par la suite le patron d’un concessionnaire automobile de la place. Et ce n’est pas tout puisque la liste est encore longue pour Anana. A titre d’exemple, la grande concession de plusieurs centaines d’hectares à la sortie d’Antalaha lui appartient aussi. Une source bien informée nous a confié qu’Anana a négocié avec une compagnie aérienne le transport d’une tonne de billets issue du bois de rose vers la capitale. Une partie a été volée et Anana aurait porté plainte. L’affaire n’a pas jusqu’à présent vu le jour. Toujours en terme de patrimoine acquis avec le trafic de bois précieux, le second rang revient à Jojokely. Il s’agit d’un opérateur dans l’immobilier et qui entretient une équipe de sport collectif pour mieux masquer son activité mafieuse. Il est entré en conflit avec tout un quartier lorsqu’il a acheté un terrain de 29 hectares où des maisons en dur sont bâties. Avec le pouvoir de l’argent, il est allé jusqu’à clôturer l’espace et ses 143 toits à l’intérieur. Conscientes qu’ils ont affaire un membre de la pègre, la centaine de familles n’ont pu mieux faire que de quitter les lieux, et Jojokely s’en félicite. D’autres nouveaux riches investissent dans le social pour avoir des retombées politique. A l’instar de TazanaBe qui a construit une portion de route importante pour qu’il soit remarqué et pressenti au poste de Sénateur. Il va même jusqu’à courtiser les chrétiens en étant généraux dans l la construction d’une église dans la périphérie d’Antalaha. Le fait que la ville devienne plus belle et les infrastructures plus modernes n’est qu’une façade puisque l’écart entre les riches et les pauvres reste très flagrant. Si Anana imite les grands richissimes américains avec leurs millions de dollars américains, les plus pauvres, voire les jeunes filles doivent s’adonner à la prostitution pour la survie de leur famille. A Antalaha, les autorités affirment que le trafic est au ralenti. Mais au-delà de cette simple déclaration, nous savons que tout s’agite dans les parages. Des pirogues ont été vues à Antalaha et probablement à destination de Maroantsetra pour embarquement au large de Sainte-Marie. La période coïncidait avec la guéguerre politique dans la capitale concernant la déchéance et la motion de censure. Laissant penser ainsi que la lutte de clan à l’assemblée nationale est surtout une question de capitaux et l’argent sale du bois précieux y joue un rôle important. Primo, les trafiquants militent indirectement contre le gouvernement et sa volonté d’instaurer le tribunal environnemental. Secundo, un bateau dénommé « Katiza » est déjà au large de Sainte-Marie et serait prêt pour embarquer du bois de rose. Des officiers supérieurs qui se disent rattachés à une institution sont sur place. Coïncidant avec le climat politique très chaud dans la capitale, tout cela semble confirmer que l’argent du bois de rose est destiné en partie à la politique. Et devant tout cela, ce sont toujours les petits qui subissent les conséquences…
*Nous avons utilisé des noms fictifs pour préserver les sources et la présomption d’innocence