
TI-MG estime qu’il faudrait établir des critères clairs, objectifs et transparents afin d’assurer que ceux qui sont dans la plus grande nécessité reçoivent effectivement l’aide dont ils ont besoin.
Afin de renforcer sa quête de transparence dans le contexte de la covid-19, Transparency International – Initiative Madagascar (TI-MG) conduit un projet de recherche et de plaidoyer relatif à la crise sanitaire actuelle, intitulé « Covid-19 et gouvernance : les leçons apprises de la première phase de la crise sanitaire à Madagascar », s’étalant sur 4 mois à partir d’octobre 2020. Le projet a une dimension nationale et repose sur une série de questionnements initiaux liés à la transparence et à l’opportunité des décisions publiques prises en réponse à la crise, mais aussi à l’intégrité des processus engagés (passations de marchés publics, etc.). D’une manière générale, il s’agit de faire un bilan rétrospectif de la gestion de la première phase de la crise sanitaire pour en tirer des leçons et permettre d’améliorer la gouvernance lors des phases ultérieures de la crise, surtout en termes de transparence et de redevabilité.
Filets sociaux. Des cas de corruption ont émaillé la distribution d’aides et de filets sociaux pendant la crise sanitaire. Une situation confirmée par les résultats des entretiens menés dans les régions Analamanga et Atsinanana, rapportée par les investigations réalisées par les journalistes du réseau Trandraka by MALINA, et recoupées par les témoignages de plaignants ayant approché la Cellule de doléances de TI-MG. Le tableau ci-dessous recense 109 bénéficiaires (soit 27% du pool) ayant rapporté des cas de corruption, dont 7 cas d’abus de pouvoir, 34 détournements de filets sociaux, 1 cas d’enrichissement illicite, 4 cas de favoritisme et 63 cas de népotisme. Les résultats soulignent que le nombre de cas de corruption était plus élevé dans la région Atsinanana (61%) par rapport à la région Analamanga (39%). Au vu de ces chiffres, le népotisme vient largement en tête. TI-MG de constater ainsi que la vulnérabilité des bénéficiaires de filets sociaux, associée à un manque de communication claire sur les procédures d’octroi des aides et la caractérisation des populations vulnérables éligibles aux aides ont ouvert la porte à des pratiques corruptives. Le business des « karinem-pokontany » (carnets d’enregistrement au niveau des fokontany) décrit par une investigation du réseau MALINA est l’exemple le plus frappant de ces pratiques. En général, les citoyens se sentent démunis face à ces cas de corruption et ne savent pas vers qui se tourner pour les résoudre. Au désarroi créé par la pandémie s’ajoute ce sentiment d’impuissance qui ébranle un peu plus la confiance des administrés envers le système en place, jugé discriminatoire et injuste par les victimes.
Corruption. Et que par ailleurs, la méconnaissance des dispositifs de lutte contre la corruption empêche les citoyens d’y recourir et de dénoncer les cas dont ils sont victimes. La preuve, la majorité des bénéficiaires n’a initié aucune action particulière devant les cas de corruption qu’ils ont constatés lors de la distribution des filets sociaux. Que ce soit dans l’Atsinanana ou à Analamanga, moins de 10% des bénéficiaires ont rapporté les cas de corruption, soit devant les différents responsables au niveau des Fokontany ou des communes ; soit à travers des actions de communication ou encore des grèves. Toujours dans son rapport, Transparency international présente les principaux risques de corruption associés aux mesures de soutien d’urgence Covid-19. Citons, entre autres, la corruption, le trafic d’influence et les pratiques connexes, à savoir la passation de marchés simplifiée, les procédures négociées ou la sélection directe gré à gré qui laissent plus de place à la corruption pour obtenir les contrats. Des bénéficiaires non-éligibles contournent les règlements pour obtenir un accès illégitime aux aides et filets sociaux, en connivence avec les responsables chargés des distributions au niveau local.
Recueillis par Dominique R.