La surproduction guette plus que jamais la vanille malgache qui se trouve confrontée à l’inefficacité d’une politique de fixation des prix vouée à l’échec.
Incertain. Les opérateurs de la vanille broie du noir. Ils sont de plus en plus inquiets sur l’avenir de la filière or noir de Madagascar. Et pourtant au tout début de la campagne en mai 2021, l’espoir était de mise chez les producteurs qui tablait sur un prix de 75.000 ariary le kilo du vert imposé par l’administration.
Utopique
Mais ils ont vite déchanté puisque face à une production qui est passée de 1.500 tonnes en 2019 à 2.050 tonnes en 2021, ainsi que le report de stock des années précédentes, l’offre était devenue largement supérieure à la demande et l’utopique et démagogique théorie protectrice du ministère de l’Industrialisation, du Commerce et de la Consommation a vite était rattrapée par la loi du libre marché. En effet, même si le MICC a fixé le prix du kilo de la vanille verte à 75.000 Ar dans l’objectif de protéger les intérêts des paysans, ces derniers n’avaient en tête que d’écouler le plus rapidement possible leur production. Quitte à arracher des gousses immatures par peur des voleurs de vanille sur pied. Et l’appétit des collecteurs sans scrupules n’a pas arrangé les choses. Résultat : les prix ont vite dégringolé pour atteindre un niveau dérisoire de 20.000 ariary le kilo de vert, au mois d’août dernier. Du coup, les opérateurs et les forces vives de la filière pointent du doigt l’administration qui s’entête sur la fixation des prix.
Aberrant
C’est le cas notamment des organisations de la société civile de la SAVA et d’Analanjirofo, deux régions championnes de la production de vanille à Madagascar. Ces dernières trouvent aberrant cette initiative gouvernementale de fixer à 250 dollars le kilo de vanille à l’exportation. Alors que la Papouasie Nouvelle Guinée en propose à moins de 175 dollars. Avec une production annuelle d’un peu moins de 500 tonnes, ce pays, tout comme l’Indonésie sont de sérieux concurrents de la vanille de Madagascar qui, malgré sa qualité qui demeure encore supérieure, risque de perdre une grosse part de marché. Rappelons que Madagascar produit plus de 75% de la vanille mondiale. Une place qui ne profite visiblement pas à tout le monde. Y compris les exportateurs dont une grande majorité se trouve actuellement dans l’impossibilité d’écouler leurs produits.
Limitation d’agréments
Et ce, pour la bonne et simple raison qu’ils sont privés d’agréments. En effet, sur 300 demandes déposées au ministère de tutelle, seuls 66 opérateurs ont été finalement autorisés à exporter de la vanille pour l’actuelle campagne. Or, lors de la précédente campagne, ils étaient plus du double de ce chiffre à avoir opéré. L’administration explique cette limitation d’agréments par son souci d’assainir la filière vanille. Mais les opérateurs n’en sont pas convaincus. « Ce n’est, ni plus ni moins qu’une initiative de nous évincer du marché », explique un exportateur qui dit avoir rempli tous les critères d’éligibilité pour obtenir son agrément mais qui ne l’a finalement pas eu. Et il dit qu’il n’est pas le seul dans ce cas puisque, une vingtaine d’opérateurs réguliers ont également vu leur demande d’agrément rejetée. « Qu’allons-nous faire de nos stocks », se demande-t-il. Décidément, la controverse continue d’être de mise pour cette filière qui joue pourtant un rôle économique de premier ordre avec les devises étrangères qu’elle apporte chaque année. Avec environ 500 millions de dollars par an, la vanille vient après le nickel en termes d’apport en devises. Une filière qui mérite d’être sauvée.
R.Edmond.