La visite du président turc Recep Tayyip Erdogan est présentée par le ministère des Affaires étrangères malgaches comme un événement exceptionnel. Le volet économique de ce voyage est très important, car le chef de l’Etat turc est accompagné de nombreux entrepreneurs qui voudraient investir dans plusieurs secteurs à Madagascar. Mais il ne faut pas cacher un autre aspect de cette arrivée dont on ne voudrait pas trop parler : la mise à l’index des institutions et centres éducatifs qui sont gérés par la fondation Fethulla Gülen, ce dignitaire religieux dont les partisans sont soupçonnés d’avoir fomenté la tentative de coup d’Etat de juillet 2016.
Le volet politique du voyage d’Erdogan
La répression qui a suivi cette tentative de coup d’Etat a été particulièrement sévère, puisqu’elle a vu des dizaines de milliers personnes emprisonnées. L’administration, l’armée, le monde de la presse ont été concernés par cette immense purge et le président Erdogan soutenu par une partie importante de sa population en a profité pour renforcer ses pouvoirs. Mais il a également entamé une lutte sans merci contre son ancien allié Fethullah Gülen devenu son ennemi juré. A l’étranger, il a entamé une campagne intense pour persuader les pays où la fondation Güllen est présente de fermer toutes ses écoles, ses O.N.G, ou ses associations professionnelles. Cette dernière est très active en Afrique de l’Est et notamment à Madagascar. Les déclarations de l’ambassadeur turc à Madagascar au mois d’août dernier avaient soulevé une certaine émotion chez tous ceux qui ont pu apprécier l’humanisme des hommes et des femmes de la fondation. Le diplomate n’a plus par la suite fait d’interventions médiatiques devant le tollé suscité, mais les autorités turques ont continué à renforcer leurs relations avec l’Etat malgache. C’est une véritable offensive diplomatique que le président Erdogan mène lors de cette tournée de cinq jours en Afrique de l’Est. Les observateurs qualifient cette dernière de « politique ». Le volet économique est mise en avant, mais il ne peut occulter cette volonté de bouter les réseaux Güllen des pays où ils sont implantés.
Patrice RABE