
La Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme ou CNIDH sortira, dans les jours à venir, un rapport d’une vingtaine de pages relatant tout ce qui s’est passé dans la commune d’Antsakabary et surtout les cas de transgression des droits humains.
Deux versions. La CNIDH sort de son mutisme à propos de l’affaire Antsakabary, hier aux 67 ha. Après une descente sur les lieux du 2 au 7 mars dernier, les commissaires sont parvenus à une conclusion : les agents de la police dépêchés sur les lieux sont les auteurs des incendies criminels. D’après les explications de Johnson Ramarolahy qui en a fait un exposé détaillé, il y a deux versions différentes concernant lesdits incendies criminels : « Sur la base des affirmations des personnes interrogées, certaines arguent que ce sont les agents de la police qui ont procédé à ces incendies. D’autres soutiennent que les mêmes agents ont contraint les propriétaires des maisons à incendier leurs habitations ».
Extorsion d’aveu. La version véhiculée par l’ancien ministre de la Sécurité publique, Anandra Norbert, est « fausse », selon les explications de Seth Andriamarohasina, le rapporteur de la CNIDH. En effet, il s’agissait purement et simplement d’une histoire inventée pour que l’image de la police nationale ne soit pas ternie car, d’après les témoins, « ce n’était pas une personne qui souffrait de démence qui est l’auteur des incendies criminels faisant 484 maisons calcinées et entraînant le décès d’une vieille femme aveugle. Les auteurs n’étaient autre que les agents de police dépêchés sur les lieux ». Il continue ses explications : « Le Maire d’Antsakabary et son premier adjoint ont été menottés et torturés quand ils ont croisé l’expédition. Puis, les agents de la police les ont ordonnés de s’agenouiller et de rédiger et de signer un communiqué dicté par les agents de la police ». De surcroît, « le communiqué relatait la version fausse », soutient Seth Andriamarohasina. Pour eux, il s’agit d’une « extorsion d’aveux ».
Atteinte aux droits humains. Toujours dans ce même angle d’idée, le rapporteur de la CNIDH n’a pas manqué de citer et de détailler tous les autres cas de transgression des droits humains, question sur laquelle la CNIDH en est grandement compétente. « Les policiers lynchés ont des familles. Quid de leur indemnisation ? », s’est-il interrogé. Par ailleurs, « il ne faut pas oublier les actes d’incendies criminels ayant causé le décès de la vieille dame aveugle, ayant engendré la calcination de 484 maisons, ayant causé la destruction des biens et des différentes marchandises, la perte des documents importants comme les documents fonciers, les papiers d’identité, les tortures et la maltraitance physique, le traitement dégradant, les cas d’attentat à la pudeur et aux bonnes mœurs, l’humiliation, l’extorsion d’aveux, la déformation de la plainte, une esquisse d’atteinte à la liberté d’expression et des soupçons de corruption » qu’il a dénoncés.
Mesures drastiques. La CNIDH, par la voix d’un autre commissaire, Andry Rakotonirina, appelle à ce que « soient punis sévèrement les auteurs des incendies criminels, les responsables qui n’ont pas pris les mesures adéquates et ceux qui ont porté atteinte aux droits humains ». Pour lui, « rien de tout cela ne serait arrivé si l’affaire avait été réglée au niveau du district. On n’a pas eu besoin d’envoyer une quarantaine de policiers dont l’ordre de mission reste flou ». Andry Rakotonirina a également lancé que lors de leur descente à Antsakabary, ils ont croisé les membres de la commission d’enquête mixte. « On nous a demandés de rencontrer le chef de la commission. Puis on nous a photographiés. Maintenant, nous avons peur pour notre sécurité ». En tout cas, le message de la CNIDH est surtout clair : « cessons la vindicte populaire ! »
Aina Bovel