Ambohidahy a rendu hier sa décision concernant la loi relative à la délivrance des jugements supplétifs d’actes de naissance des enfants dans le cadre de l’enregistrement rétroactif des naissances et des adultes dans le cadre de l’opération Carte d’Identité Nationale.
Comme nous l’avions fait remarquer dans une précédente édition, ladite loi viole le principe de la séparation des pouvoirs notamment en son article 7 qui stipule que « tous les magistrats des Tribunaux de Première Instance et des Cours d’Appel peuvent présider les audiences foraines spéciales à l’intérieur de leur ressort territorial. Il en est de même pour les Préfets de Police, les Chefs de district et leurs adjoints selon le cas ».
60 ans en arrière. La HCC de considérer que « les Préfets, les Préfets de Police, les Chefs de districts et leurs adjoints sont des autorités administratives déconcentrées représentants de l’Etat, et plus précisément représentants de la branche exécutive, au niveau local ; qu’en vertu de la séparation des pouvoirs, ils relèvent de l’exécutif et non du juridictionnel ». Il est rappelé dans la décision que « le pouvoir de présider les audiences foraines relatives à la délivrance de jugements supplétifs avait été conférée à certaines autorités administratives déconcentrées depuis la Première République ; qu’à l’époque, une telle entorse à la séparation des pouvoirs pouvait être justifiée par l’insuffisance de magistrats et le nombre limité de juridictions sur l’ensemble du territoire national ; qu’en conséquence, la présidence des audiences foraines relatives à la délivrance de jugements supplétifs par les Préfets, les Préfets de police, les Chefs de district et leurs adjoints n’est pas conforme à la Constitution ». Bref, l’article 7 de la loi en question est un retour de 60 ans en arrière.
Inconstitutionnels. Par voie de conséquence, le juge constitutionnel d’invalider l’article 10 de la même loi qui dispose que « les représentants de l’Etat, leurs adjoints et les greffiers ad hoc siégeant en audience foraine spéciale doivent préalablement prêter serment par écrit « de bien et loyalement remplir leurs fonctions et d’observer tous les devoirs qu’elles imposent ». Selon l’article premier de la décision de la HCC, « la deuxième phrase de l’article 7 et l’article 10 de la loi n°2017-022 (…) sont contraires à la Constitution ». C’est-à-dire inconstitutionnels. L’article 2 d’ajouter que « les autres dispositions de la loi 2017-022 sont déclarées conformes à la Constitution et peuvent faire l’objet d’une promulgation ».
Assemblées croupion. Force est de constater qu’après le code de l’électricité, c’est la deuxième loi censurée par la HCC en l’espace d’une semaine. Un second désaveu du gouvernement qui a présenté les deux projets de loi mais aussi des deux Chambres du Parlement qui les avaient votées tour à tour et presque à l’aveuglette lors de la dernière session ordinaire. Il pourrait même y avoir un « jamais deux sans trois » à Ambohidahy avec la loi organique relative à l’élection présidentielle qui comporte des dispositions manifestement contraires à la Constitution. On est ainsi en droit de se poser des questions sur la capacité ou l’incapacité (c’est selon) des membres du Législatif – députés et sénateurs confondus – à examiner des textes de loi. Les parlementaires donnent l’impression d’être des béni oui oui et/ou de former des assemblées croupion qui ne tiennent même pas compte des avis et remarques, fussent-elles fondées, de leurs collègues juristes. Pour ne citer que les députés Hanitra Razafimanantsoa et Houssen Abdallah qui n’ont pas été entendus par la majorité HVM, quand bien même l’avocate et le magistrat se seraient exprimés à bon …droit.
R. O