
La première étude nationale sur la violence envers les enfants à Madagscar dessine un constat amer en matière de droits des enfants.
La violence envers les enfants fait partie intégrante de la vie sociale malagasy. C’est ce qu’on peut tirer du rapport de l’étude nationale sur la violence envers les enfants dans la Grande-Île. Une première en son genre, et qui a été le fruit d’une collaboration entre l’État malagasy et l’UNICEF. Effectuée dans 12 sites de collectes de données réparties dans les six provinces, l’étude a touché 2 523 personnes. Les résultats de l’étude reflètent, dans ce cas, les perceptions et les vécues des personnes interrogées : jeunes, personnel médical, travailleurs sociaux, policiers, magistrats, personnel scolaire, parents et autres personnes ressources. Il y est notamment dit que près de «neuf jeunes sur dix, soit environ 89% des jeunes, ont affirmé avoir été victimes de châtiment corporel dans leur famille». Une situation qui pourrait s’expliquer par le fait que «65% des réponses considèrent le châtiment corporel comme approprié à la maison». Par ailleurs, le rapport de la première étude de faire savoir également que, plus de la moitié des jeunes affirment avoir subi des violences en milieu scolaire, soit un jeune sur deux. Il convient toutefois de noter que l’étude s’est focalisée sur trois formes de violence endurées par les enfants. Entre autres, «la violence intra familiale, la violence en milieu scolaire et la violence dans le milieu du travail». Et dans cette catégorie, «le rapport interpelle que “40% des enfants affirment avoir travaillé avant l’âge de 18 ans”.
Volonté. Si la violence envers les enfants est problématique pour le développement de la société malagasy (les enfants constituant l’avenir du pays et que les violences formant des freins à leur épanouissement aussi bien physique que mental), elle ne semble pas constituer une priorité pour les décideurs politiques. Des efforts dans le sens du respect des droits des enfants sont certes, entrepris par ces derniers, force est de constater que la situation reste alarmante. Faire en sorte de limiter l’ampleur de la situation, relèverait d’une volonté politique émanant du gouvernement malagasy. Comme l’a fait savoir Najat M’Jid, ancienne rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la vente d’enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie impliquant les enfants lors d’une table ronde organisée lors du lancement du rapport : “un véritable engagement politique, une volonté farouche émanant du gouvernement. Notamment du chef du gouvernement.” L’engagement à lui seul ne suffit toutefois pas. Il devrait être suivi “d’actions concrètes, adéquates, pertinentes et répondant aux besoins actuels”. Il y a dans ce cas, un réel besoin de mise en œuvre d’une “politique bien établie, où tous les ministères ou encore tous les ministres prennent leurs responsabilités dans la lutte”. Étant donné que la société semble avoir imposé “une certaine normalisation des violences envers les enfants”, la lutte est encore longue pour la Grande-Île. Il est en effet, aberrant de constater que la société tolère les crimes – passibles de sanctions pénales – commis envers les enfants sans qu’elle ne réagisse convenablement.
José Belalahy