
Philipp Heyl, Conseiller principal en sécurité maritime pour l’Afrique au Département d’Etat américain, a été reçu hier à Mahazoarivo par le Premier ministre Ntsay Christian.
L’ancien Chef du département du contrôle aérien et côtier du bureau de l’ « Africa Command de l’US Army » (AFRICOM) est à la tête d’une délégation militaire qui va assister Madagascar dans l’élaboration d’un programme stratégique pour la sécurité maritime. Par rapport au processus de mise en place de ce programme, Philipp Heyl qui compte 32 ans de carrière au sein de l’ « US Coast Guard », a mis en exergue l’importance du leadership du Premier ministre. Et ce, devant le ministre de la Défense nationale, le général Béni Xavier Rasolofonirina et le directeur du cabinet militaire auprès de la Primature, le général Sylvain Ratefiniaina qui étaient présents pour la circonstance.
Habilitation constitutionnelle. Le chef de la délégation américaine ne croit pas si bien dire, car ce leadership du locataire de Mahazoarivo fait l’objet d’une habilitation constitutionnelle. La loi fondamentale dispose effectivement en son article 65.8 que « le Premier ministre, chef du gouvernement, assure la sécurité, la paix et la stabilité sur toute l’étendue du territoire national, dans le respect de l’unité nationale ; à cette fin, il dispose de toutes les forces chargées de la police, du maintien de l’ordre, de la sécurité intérieure et de la défense ». Le paragraphe 9 d’ajouter qu’il « préside de Comité interministériel de la Défense qui est chargé de la mise en œuvre de la politique générale de défense ».
Plein exercice. Ces prérogatives du Premier ministre Ntsay Christian qui dirige un gouvernement de plein exercice seront renforcées de facto après la démission du Président de la République qui est encore pour 9 jours le chef suprême des forces armées. Un titre consacré par l’article 56 alinéa 1er de la Constitution. Celle-là même qui prévoit en son article 46 alinéa 2 que « le Président en exercice qui se porte candidat aux élections présidentielles, démissionne de son poste 60 jours avant la date du scrutin présidentiel. Dans ce cas, le Président du Sénat exerce les attributions présidentielles courantes jusqu’à l’investiture du nouveau Président ».
Forces armées. Qu’est-ce que le constituant a voulu entendre par « attributions présidentielles courantes » ? Sans anticiper sur l’Avis de la HCC qui ne tardera sans doute pas à être saisie aux fins d’interprétation de cette notion, on est en droit – au propre comme au figuré – d’avancer que le Président du Sénat ne pourra pas arborer le titre de chef suprême des forces armées que la Constitution attribue au Président de la République élu. Dans la Convention du 31 octobre 1991 qui présente, toutes proportions gardées, des similitudes avec la situation actuelle, l’article 2 disposait que « le Président de la République est le symbole de l’indépendance, de l’unité nationale ainsi que de l’intégrité territoriale. A ce titre, il est le chef suprême des Armées ».
Vacance. Contrairement à la situation en 1991, il n’y aura plus de Président de la République après la démission pour cause de candidature de l’actuel titulaire du poste. Ses pouvoirs ont été du reste réduits par la Décision du 25 mai 2018 de la HCC relative à une requête en déchéance du Président de la République Hery Rajaonarimampianina qui a été sanctionné quoiqu’il n’ait pas été déchu (mais certainement déçu) par le juge constitutionnel. Lequel va néanmoins constater la vacance du poste présidentiel la semaine prochaine, en application de l’article 52 de la Constitution qui stipule que « Par suite de démission (…), la vacance de la présidence de la République est constatée par la HCC. Dès la constatation de la vacance de la présidence, les fonctions du chef de l’Etat sont exercées par le Président du Sénat ». Ce dernier ne sera pas Président de la République par intérim ou par substitution. Il sera un chef d’Etat à titre honorifique tel que c’est le cas dans des pays comme l’Allemagne, l’Italie… Après la démission de l’actuel maître d’Iavoloha, il y aura un recentrage vers Mahazoarivo de « la fonction exécutive » définie par l’article 44 de la Constitution. Pour le PM de consensus, ce sera une montée en …force.
R. O