
Le prochain Président de la République élu aura fort à faire pour fédérer et réconcilier les Malgaches fortement divisés en deux camps protagonistes, surtout à l’occasion du deuxième tour.
Dès le premier tour, le scrutin était bipolarisé entre les deux candidats qui devaient se qualifier pour la finale. Les 34 autres prétendants à la magistrature suprême étaient là pour faire juste de la figuration ou au mieux, avaient servi à la dispersion des voix. Ecartant du coup la possibilité d’un « premier tour dia vita » qui aurait eu le mérite si c’en est un, de faire faire au pays, l’économie d’un deuxième tour éprouvant, aussi bien pour les caisses de l’Etat que pour celles des candidats. C’était éreintant également pour les propagandistes à bout de nerfs et parfois à court d’arguments, au point de verser dans des paroles et/ou actes susceptibles de mettre en danger la paix sociale quand ils ne sapent pas carrément l’unité nationale. Pour ne citer que le cas d’un candidat éliminé au soir du 7 novembre qui a confondu débat d’idées et lutte des… castes.
Ultras et fanatiques. Un dérapage verbal qui dessert plus qu’il ne sert le finaliste de son choix. Lequel a subi hier, du haut du toit de son 4 x 4, la foudre de la population des bas quartiers choquée par la déclaration pleine de dédain de ce candidat dont la piètre performance au premier tour ne saurait constituer une excuse atténuante, encore moins absolutoire. Et pour cause, cela risque d’attiser davantage les rivalités vieilles de presque une décennie entre les partisans respectifs des deux adversaires au match retour du 19 décembre. Tout particulièrement dans les rangs des ultras d’un camp et des fanatiques de l’autre, qui risquent de plonger dans le chaos, le pays aujourd’hui presque coupé en deux.
Familles. Même des familles pourtant unies par des liens de parenté, se trouvent désunies entre « Zandrikely » et « Dada ». Les discussions familiales se tournent souvent vers la politique et tournent parfois à la polémique. Chacun soutient son poulain dans la course à Iavoloha. Comme le fils d’un chef de parti qui n’est pas du tout « mafana » pour partager la position de son père. Ou encore cette ancienne ministre qui roule pour un candidat autre que celui de son frère. Il y a aussi ce député qui a opté pour le candidat qui a jeté son cousin en prison. La liste est loin d’être exhaustive et illustre ce que la Conférence Episcopale de Madagascar considère comme « le choix libre selon la voix de sa conscience » pour tout citoyen.
« Samy mandeha, samy miady ». Les familles politiques n’échappent pas non plus au mistigri de la division, mais peuvent aussi retrouver leur union. A l’exemple d’un parti dont le vice-président pour la province d’Antananarivo, a décidé de se ranger d’un côté alors que les deux ailes rivales du parti se sont unies autour de l’autre candidat. Des cadres d’autres partis sont aussi divisés. C’est aussi le « samy mandeha, samy …miady » pour bon nombre de parlementaires. Du côté des indécis, c’est le « entre les deux, mon cœur balance, je ne sais pas lequel choisir des deux ».
Unité nationale. Toutes ces divisions, du moment qu’elles s’inscrivent dans le cadre de la liberté de choix de chaque citoyen et ne sont pas basées sur des critères discriminatoires comme l’origine ou la fortune, peuvent être mises sur le compte de la démocratie qui s’exprime par la voie des élections et les voix des électeurs. La démocratie veut aussi que le verdict des urnes soit accepté par tout le monde. « Le vrai choix du peuple », selon le message du bureau permanent de la Conférence des Evêques de Madagascar qui exhorte les citoyens à se rendre aux urnes car « la souveraineté appartient au peuple, source de tout pouvoir, qui l’exerce par ses représentants élus au suffrage universel direct (…) ». Ce sera le cas du prochain Président élu, celui de tous les Malgaches sans distinction, qui aura la lourde charge d’aplanir les divisions et rivalités engendrées par les élections puisqu’« il est le garant de l’unité nationale ».
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