
Loin d’être un effet de mode, la question du changement climatique mérite une attention particulière de tous les secteurs, de tous les acteurs et de toutes les organisations nationales et internationales. Une question d’actualité mondiale et nationale qui mobilise des financements colossaux de la part des bailleurs de fonds et des organismes internationaux œuvrant dans le domaine. L’environnement et le changement climatique sont actuellement au cœur des débats. Mieux, les discours, programmes et volontés politiques de tout bord avancent l’urgence de se pencher sur la question environnementale. Pour Madagascar en particulier, certains efforts se concentrent sur l’élaboration du Plan National d’Adaptation (PNA) et du Plan d’Action Nationale de Lutte Contre le Changement Climatique (PANLCC). Des plans qui traduisent la mise en œuvre de la Politique Nationale de Lutte contre le Changement Climatique (PNLCC) adoptée par le pays en 2011.
Pour Madagascar, les quinze ou dix dernières années ont été marquées par, à la fois, des avancées considérables en matière de structuration des compétences et des acteurs œuvrant dans le domaine de la sauvegarde de l’environnement et de la biodiversité et un déclin en matière des biodiversités. Les feux de brousse, les exploitations abusives des ressources naturelles, l’extrême pauvreté de la population qui la contraint à dépendre totalement des ressources en question pour survivre sont les principales causes dudit déclin. Une situation à deux vitesses entre avancées dans la lutte pour la sauvegarde mais également dans la dégradation de l’environnement lui-même. Et pour cette dernière, la situation serait chaotique si l’on se réfère aux revues et publications scientifiques. On ne pourrait plus y remédier. Ce qui n’est toutefois pas le cas lorsque l’on pense aux actions et efforts de lutte menées par les divers acteurs de la conservation de l’environnement d’après Mathieu Souquet, « Biotope French Overseas Director ». « Les autorités ont de plus en plus de compétence en la matière. Mieux, elles (les autorités) développent des outils et méthodologies en matière de monitoring de l’environnement et d’analyse des données environnementales qui intéressent les autres pays » a fièrement noté notre interlocuteur. L’extension des réseaux des aires protégées dans toutes les régions du pays fait partie des fruits des initiatives de lutte pour la sauvegarde de l’environnement. Des avancées majeures qui ont pu trouver le jour grâce à l’implication des autorités étatiques. Une imprégnation de la question environnementale qui s’est de plus en plus développée ces quinze dernières années. Les discours politiques, les engagements pour la sauvegarde de l’environnement et l’implication de la question dans les programmes de développements initiés par les diverses formations politiques du pays ne représentent que quelques-unes des implications des diverses autorités. Un tableau qui est loin de ce qui est dépeint dans les revues scientifiques dispatchées un peu partout dans le monde. Un tableau qui ne nie toutefois pas la réalité. Les forêts disparaissent d’année en année. Et avec, les espèces endémiques et rares qui ont fait l’apanage de la Grande Île.

Difficultés. Changer la donne demanderait beaucoup d’autres efforts et initiatives considérables de la part de toutes les parties prenantes. La grosse difficulté correspond selon Mathieu Souquet « au paradigme qui impose la recherche de solutions adéquates et pérennes à l’indépendance de la population aux ressources naturelles« . La majorité de la population, en raison de l’extrême pauvreté, dépend, en effet, de ces ressources naturelles pour subvenir à leurs besoins primaires, essentiels. Les interdire d’y accéder reviendrait alors à causer des dégâts sociaux de plus qu’il n’en faut pas pour le pays. Arriver à « décomplexer » le paradigme en question serait une idéale dans la recherche de moyens pérennes et déterminantes de sauvegarde de la biodiversité. Embarquées à Madagascar, les questions environnementales sont également tributaires de celles sociales. Concilier les enjeux relatifs aux deux notions pourrait permettre d’atteindre les objectifs de développement fixés qui incluent le principe de durabilité, entre autres de la préservation des « ressources à long terme« .
Au-delà de toutes les actions entreprises, l’imprégnation de tout le tissu social malgache de la volonté de préserver les ressources malgré les besoins primaires (sans pour autant être péjoratifs) constitue un énorme défi dans la lutte. Une imprégnation qui nécessite la compréhension des enjeux de la sauvegarde mais qui devrait surtout aboutir à des actions volontaires et concrètes sur les efforts de conservation. « Dans sa survie, la population dépendante des ressources naturelles n’est pas forcément consciente des dangers et des méfaits de ses actions. Lui d’expliquer qu’il existe des méthodes rationnelles et donc durables pourrait changer les choses. L’initiative n’est pas uniquement pour les experts environnementaux. Politiques, techniciens, simples citoyens, tout le monde a son lot de responsabilité« .

Une première consultation interrégionale à succès
Organisée à Toamasina les 26 et 27 février, la première réunion de concertation interrégionale pour l’Axe Est (Alaotra Mangoro, Atsinanana et Analanjirofo) a vu une vive participation des acteurs locaux. Les séances d’échanges et de partages menées ont permis de lister et de prioriser les actions de lutte contre le changement climatique au niveau des régions en question. La forte implication des participants issus des départements ministériels, des divers secteurs, des organismes œuvrant dans le domaine de la conservation de l’environnement ou encore du secteur privé a permis d’identifier les enjeux politiques, institutionnels, les besoins de financement et de recherche pour la mise en œuvre des activités prioritaires de lutte contre le changement climatique. Une première consultation interrégionale encourageante étant donné qu’il en faut encore quatre dans le processus d’élaboration du Plan d’Action nationale pour la Lutte contre le Changement Climatique (PANLCCC) et du Plan National d’Adaptation (PNA). La plus proche est celle prévue pour l’axe Sud Est. Devant se dérouler à Fianarantsoa, la seconde consultation interrégionale se fera du 20 au 21 mars prochain et concernera les régions d’Amoron’i Mania, Atsimo Andrefana, Ihorombe et Vatovavy Fitovinany. Il conviendrait de préciser que les consultations interrégionales sont organisées par le ministère de l’Environnement et du Développement Durable (MEDD) à travers le Bureau National de Coordination des Changements Climatiques (BNCCC) en partenariat avec la Coopération Allemande, la GIZ, à travers le Projet de renforcement des conditions et capacités d’adaptation durable au changement climatique (PRCCC) du Programme d’Appui à la Gestion de l’Environnement (PAGE).
Pourquoi le PNA et la PNLCC ?
L’implication des acteurs issus des régions du pays entend favoriser la prise en compte des informations et données émanant des communautés locales dans l’élaboration du Plan, c’est un fait. Le côté concret et réel du Plan National d’Adaptation (PNA) et du Plan d’Action nationale pour la Lutte contre le Changement Climatique (PANLCCC) en est une autre. Consistant en des documents devant refléter les réalités du pays, les deux plans devraient également lui permettre de bénéficier des financements nécessaires en matière de lutte pour la sauvegarde de l’environnement. L’existence des deux plans signifierait pour les divers mécanismes de financement que Madagascar dispose de stratégie définie en fonction des besoins réels. Une situation qui faciliterait le déblocage des financements relatifs à l’environnement et au climat.
Les enjeux environnementaux sont énormes pour Madagascar qui se place au septième rang des dix (10) pays les plus touchés par le changement climatique. Des efforts ont été menés pour renverser la vapeur. L’implication progressive des divers secteurs en constituent une parfaite manifestation. Des initiatives de renforcement de cette implication des secteurs devraient toutefois être menées. Comme l’a fait savoir le Secrétaire Général sortant du Ministère de l’Environnement et du Développement Durable : « Les autres secteurs ont tendance à penser que la question environnementale n’est que du seul ressort de notre département ministériel« . Les aléas climatiques et les catastrophes naturelles impactent, en effet, les activités de tous les secteurs. Conscientiser ces derniers sur l’importance d’inclure la question environnementale dans toutes leurs activités, leurs stratégies de développement et leurs projections seraient le summum des efforts de lutte pour la sauvegarde de l’environnement. Une conscientisation qui se traduirait par l’implication des activités relatives à l’environnement dans l’élaboration des budgets des divers secteurs. L’idéal serait de trouver les diverses activités en la matière dans les lois des finances du pays. D’ici là, le renforcement des structures et des compétences des acteurs n’arrive toujours pas à freiner le déclin en matière de biodiversité.
Dossier réalisé par José Belalahy