
L’Argent contre travail productif ( ACTP) fait partie des trois programmes de Filets sociaux de sécurité de lutte contre l’extrême pauvreté initiés par le Ministère de la Population de la Protection Sociale et de la Promotion de la Femme ( MPPSPF), financé par la Banque mondiale et le Fonds des Nations unies pour l’Enfance (UNICEF) et mis en œuvre par le Fonds d’Intervention pour le développement. Manakara fait partie des districts de mis en œuvre, l’ACTP y a fait 8309 bénéficiaires. 5 564 330 000 Ariary ont déjà été mobilisés dans la région.
Des recherches en économie et menées par des experts du développement ont en effet montré que la protection sociale non contributive constitue le pilier de la lutte contre l’extrême pauvreté dans le monde, si elle est assortie de mesures d’accompagnement basées sur la communication de messages clés collés aux contextes locaux et de modèle économique viables à long terme à destination des communautés bénéficiaires. L’ACTP en fait partie. Initié tel quel depuis 2016, le projet a déjà porté ses fruits, bien que modestes mais significatifs à Madagascar. Sur les 52,7% de Malgaches vivant dans l’extrême pauvreté, 5% sont désormais « sortis d’affaire » et ont pu améliorer peu à peu leur niveau de vie, de bien-être familial et d’éducation de leurs enfants. A Manakara, 8390 en sont sorties selon des données du FID, Agence de mise en œuvre. Notons par ailleurs que l’intérêt de l’ACTP réalisé à Marofarihy réside dans le fait qu’il bénéficie non seulement aux bénéficiaires directs, mais aussi à leurs communautés environnantes. Le comment du pourquoi ? Parce que les travaux réalisés combinent agroforesterie, permaculture (des produits de rente phare de la région et vivrière notamment) et aménagement du territoire, combiné par exemple à la rizipisciculture. C’est ainsi que la direction régionale de l’Agriculture et de l’Elevage et celle de l’Aménagement du territoire font partie des partenaires du projet. Les terroirs deviennent encore plus fertiles, les habitants sortent progressivement de la malnutrition, les terrains du district sont moins érodés, etc. Des structures de soutien aux parents existent par ailleurs, telles que les services de garderie avec des éducateurs formés dans les champs d’HIMO, pour qu’il soit possible d’allier vie professionnelle et vie familiale. Benja, père de famille par exemple, grâce aux formations incluses dans les mesures d’accompagnement, a pu se perfectionner dans la culture et le commerce de produits de rente tels que le café, la cannelle et le girofle, pour nourrir convenablement sa famille et assurer une éducation décente à ses enfants.
Mécanismes et mesures d’accompagnement. L’ACTP permet aux bénéficiaires de bâtir des « actifs communautaires productifs » par le biais de travaux d’aménagement réalisés en haute intensité de main d’œuvre (HIMO), en appliquant les formations qu’ils ont reçu sur les techniques agricoles innovantes et plus écologiques, qu’elles appliqueront également dans leurs lopins de terre pour qu’elles se créent des activités génératrices de revenus à long terme. En réalisant des chantiers dans un territoire donné pendant 80 jours par an (divisés en deux périodes de 40 jours), les bénéficiaires reçoivent un transfert monétaire. Pour une démarche inclusive, les individus invalides peuvent quant à eux, bénéficier d’un transfert monétaire non-conditionnel. Parmi les mesures d’accompagnement, un éventail de formation qui permettent d’intensifier et de pérenniser les résultats positifs du filet social de sécurité, notamment la formation en épargne communautaire et en business plan, par la mise en place de l’AVEC (Association Villageoise d’Epargne et de Crédit) dont le cycle de vie est de neuf mois. Une mère de famille membre d’une AVEC à Marofarihy témoigne : « En huit mois, nous avons déjà pu épargner plus de 2 500 000 Ariary, avec une contribution plafonnée entre 1000 Ariary et 5000 Ariary. Nous pouvons emprunter à un taux de 10%, assez pour parer aux besoins d’urgences, étendre nos activités génératrices de revenu et améliorer la scolarité de nos enfants, etc. » Surprenant en effet, quand nous savons que la majorité des familles dites de « classe moyenne » peinent à économiser à peine 200 000 Ar par mois…Par ailleurs au niveau national, 5 districts bénéficient de l’ACT P, Ankazoabo dans l’Atsimo Andrefana, Vatomandry dans l’Atsinananana, Isandra dans la Haute Matsiatra, Antanifotsy dans le Vakinankaratra et Manakara dans le Vatovavy Fito vinany. 32 500 bénéficiaires sont recensés au niveau national. Le projet est financé par la Banque mondiale via un crédit de 14,7 millions de dollars, 90 millions de dollars de financement additionnel ont été approuvé.
Luz Razafimbelo