Les cent premiers jours du quinquennat du président Andry Rajoelina ne permettent pas à un observateur neutre de porter un jugement lucide sur l’action menée par le gouvernement. Les intentions ont été clairement annoncées depuis le début, il s’agissait d’une rupture nette avec le passé. A l’écoute des premières mesures annoncées par l’exécutif, force était de constater qu’il y avait du changement au niveau de la forme. La communication a été un des outils utilisés pour expliquer le mode de fonctionnement du régime. La lutte contre la corruption et la bonne gouvernance ont été mise en avant. C’est à une allure de TGV que les réformes ont été initiées, mais la détermination s’est parfois heurtée à la réalité des faits. Il a fallu ralentir le rythme imposé et écouter certaines critiques. Néanmoins, le pouvoir a l’avantage de ne pas avoir d’opposition véritable en face de lui. Il a pu donc tirer une certaine gloire de la mise chantier de certains projets initiés par son prédécesseur. Pour couper court aux remarques acerbes émises ici et là, le chef de l’Etat a décidé de dresser lui-même le bilan de ces cent jours qui sont une étape de son quinquennat. Pour marquer le coup, il a annoncé des mesures phares. L’augmentation du SMIG à 200.000 ariary a fait son petit effet, mais au-delà du l’aspect pécuniaire, elle pose des questions que les acteurs de la vie économique se sont posés. La réunion organisée à Ambohitsorohitra avec les organisations patronales et les représentants des syndicats, même si aucune voix discordante n’a été entendue, n’a pas levé les incertitudes sur les conséquences de la mesure. Le « wait and see » est donc de rigueur. La volonté de maintenir le cap a été réitérée par le chef de l’Etat et le Premier ministre ces derniers jours, et la visite du nouveau président de la banque mondiale semble les avoir confortés dans cette attitude.
Sur le plan international, il n’y a pas véritablement de faits cette semaine. Les crises qui ont éclaté récemment sur le continent africain n’ont pas connu d’évolution particulière. Les manifestations populaires continuent, mais elles peinent à installer un pouvoir civil. La pression des dizaines de millier de personnes installés pacifiquement devant le Q.G. de l’armée , n’a pas réussi à chasser les militaires du pouvoir. Seul événement marquant de ces derniers jours, l’ancien président Omar El Béchir sera interrogé par la justice sur le financement du terrorisme. En Algérie, la contestation est toujours aussi vive. Hier encore, la rue était envahie par la population qui refuse de voir le pouvoir de transition imposer ses vues. Le chef d’Etat major de l’armée, véritable homme fort du pays, appelle au dialogue, mais refuse toutes les demandes des manifestants. Les observateurs estiment qu’il table sur l’essoufflement du mouvement populaire en ce mois de Ramadan.
En France, le pays s’apprête à vivre son 28e samedi de manifestation des gilets jaunes. L’essoufflement du mouvement est notoire, mais un carré d’irréductibles reste inflexible. Le pouvoir a réussi tant bien que mal à proposer des solutions au sortir du grand débat. La conférence de presse du président Macron n’a pas entièrement permis de répondre à toutes les attentes des Français, mais la crise semble appartenir au passé.
Les cents premiers jours du régime se sont écoulés. Il ne s’agit que d’une première étape. Il n’y a pas d’enthousiasme ou de désamour de la population vis à vis du pouvoir .Les citoyens observent un certain attentisme et laissent l’équipe gouvernementale agir. Son bilan, pour le moment, est contrasté. Ils la jugeront à l’aune des résultats à venir.
Patrice RABE