
Des trafiquants de tortues endémiques de Madagascar arrêtés à l’aéroport d’Ivato ont été remis en liberté grâce (à cause du, c’est selon) au principe de la transaction avant jugement.
La liberté n’a pas coûté grand-chose pour des trafiquants étrangers qui ont été appréhendées avec des tortues endémiques de Madagascar à l’aéroport d’Ivato. Détenus après la saisine des animaux devant être exportés illicitement à l’étranger, les trafiquants notoires ont retrouvé la liberté si l’on se base sur les explications données par Alexandre Georget, ministre de l’Environnement et du Développement durable. « Outre la remise des tortues dans leur milieu naturel et la mise sous les verrous des malfrats, le ministère a opté pour la mise en application du principe de la transaction avant jugement » a noté le ministre. Un principe qui consiste à « rendre la liberté aux trafiquants à condition qu’ils offrent quelque chose pour le pays« . « Le ministère a initié le principe et c’est tout gagnant. On a appréhendé les tortues qui allaient être exportées illégalement. Mais on a également contraint les trafiquants à payer par le biais de dons de matériels ou d’outils devant servir à la sauvegarde de l’environnement à Madagascar en échange de leur liberté » a renchéri le numéro du ministère de l’Environnement. Ce qui a permis aux ministères d’avoir « 94 bicyclettes, 24 GPS et de 84 costumes devant servir pour la parade du 26 juin prochain » d’après toujours les explications d’Alexandre Georget.
Mauvais signal. Deux faits majeurs constituent la réaction face à la mise en application du principe de transaction avant jugement. Le premier étant la similitude aux faits de corruption. Interrogé sur la question, le ministre de l’Environnement durable de noter : « Le principe de transaction avant jugement est permis et encouragé par la loi malgache« . En d’autres termes, ladite loi est favorable à la remise en liberté de trafiquants à condition que ceux-ci paient une certaine « caution » à l’Etat malgache. L’autre fait marquant de la situation – et plus grave selon certains observateurs – c’est qu’au lieu de dissuader les trafiquants, le principe sonne plus comme « une mesure incitative ». Un fait qui se résume dans les propos de Koto (nom d’emprunt), étudiant en biologie à de l’Université d’Antananarivo : « Le message est clair, le trafic d’espèces endémiques n’est pas interdit. Il faut juste ne pas se faire prendre. Et même si cela arrive, il suffit de donner quelque chose à l’Etat malgache et bonjour la liberté« . Face à la portée de la situation on se pose toutefois des questions sur le bien-fondé de cette mise en application. Les tortues de Madagascar sont au même titre que les pandas en Chine ou encore les koalas en Australie. Et dans cet esprit, pourrait-on imaginer ne serait-ce qu’une seconde que les pays suscités vont relâcher les trafiquants desdites espèces après que ceux-ci ont payé des cautions aussi conséquentes soient-elles ? Dans la mesure où il faut payer contre les crimes environnementaux commis, les dons comme les bicyclettes, les GPS ou encore les costumes équivalent-ils les éventuels dégâts subis par les écosystèmes ? A l’heure où le pays perd chaque année environ 2% de sa surface forestière, l’heure n’est-il pas à des sanctions sévères, exemplaires contre les trafiquants de nos ressources, nationaux ou étrangers ?
José Belalahy