
Le 26 juin 2020 résonnera à Mahamasina l’hymne national durant le défilé militaire, signalant soixante années d’indépendance. Et la culture dans tout cela…
L’année 2020 s’annonce comme l’année fatidique pour Madagascar. À l’horizon, se profile la soixantième année de l’indépendance retrouvée. Selon le discours de fin d’année du chef de l’Etat, Andry Rajoelina, les célébrations seront « grandioses ».
Le mois de juin se trouve également en plein dans la saison culturelle malgache. Les spectacles en plein air reprennent, les différents us et coutumes également : circoncision, retournement des morts… Les contrées lointaines récoltent les produits de la terre, les malgaches de tous les horizons se rencontrent à Mahajanga pour les grandes vacances. Tout cela marque que le pays baigne dans l’abondance. Le malgache doit avoir les moyens de les réaliser.
Les grandes vacances à Mahajanga sont de plus en plus ancrées dans les habitudes des tananariviens. Les chiffres concernant le flux monétaire généré par ce déplacement massif de population vers cette ville côtière de l’ouest ne sont pas encore disponibles. Ils sont pourtant nécessaires afin de vérifier le poids économique des prémices d’un tourisme local.
Le fait est que, ces déplacements créent une dynamique sociale et culturelle énorme. Grâce à l’une des plus belle ville de Madagascar, des malgaches géographiquement éloignés se rencontrent, échangent, commercent, se connaissent, se souviennent mutuellement, œuvrent pour un objectif partagé… En conséquence, les barrières s’amenuisent. Confirmant que les routes sont presque « sacrées » même si elles ne sont pas mangeables.
Bon exemple. Il ne reste plus qu’à espérer que toutes les villes du pays suivent le même exemple. Antananarivo en premier, et la région Analamanga par ricochet, dont le prestige des douze collines sacrées a été supplanté par celui des montagnes d’ordures, visibles il y a encore quelques mois. Pour devenir une ville-monde, le chemin à faire se compterait encore en années lumières selon une partie de l’opinion publique aigrie et sans espoir.
Vers la fin du mois d’avril, jusqu’au mois d’octobre, la partie centrale du pays vie sous le coup des instruments à vent et des tambours. Les rues de certaines grandes villes deviennent des salles de spectacle à ciel ouvert. Des traditions qui se heurtent actuellement avec la modernité et l’urbanisation. Surtout le « famadihana », faisant grincer les dents de plusieurs usagers des voies citadines.
A se demander si cette année 2020 annonce également le début de la fin de plusieurs traditions séculaires. L’identité d’un peuple, puisque même des familles, pour des causes spirituelles parfois fumeuses, ne veulent plus réaliser cette tradition. Plus que jamais, le malgache est tiraillé, entre des religions, des visions politiques…
Il faut aussi se souvenir que la « cause raciale » a été utilisée lors des propagandes 2018 tel un discours électoral du bon, pour diaboliser un parti et ses partisans… il suffit d’aller sur les réseaux sociaux pour voir les traces, ou les plaies rouvertes par ce type de langage jusqu’à maintenant. Il fallait s’y attendre, les valeurs du vivre ensemble malgache, le « fihavanana » constructif et dynamique, ont fini par disparaître. Pour laisser place à la peur, le désespoir, le doute, la cupidité… Un blues indéfinissable.
Madagascar s’attaque donc à une année de défi pour 2020. Et les réseaux sociaux vont jouer un rôle plus qu’important. Entretenir l’opinion par l’image est devenu un enjeu crucial. Les gestes de personnes, associations et autres obédiences faisant des dons ici et là deviennent maintenant monnaie courante. La diffusion sur facebook est ensuite primordiale.
Si certains y voient du « pavanisme », quelque part ces illustrations récurrentes et les textes qui les accompagnent semblent affirmer que ce sont les populations des grandes villes qui font Madagascar. Internet y est plus accessible.
Les réseaux sociaux font de plus en plus oublier les 80 % des malgaches, ceux du monde rural. Quand des « Che Guevara » de salon vocifèrent qu’il faut consommer malgache, ils semblent oublier que les légumes, la viande, les graines, les fruits… qu’ils mangent quotidiennement sont 100 % malgaches et cela depuis des siècles, voire des millénaires.
Le malgache a toujours consommé malgache. Pour 2020, le monde rural, le monde le plus productif du pays, devrait se retrouver plus dominant sur les réseaux sociaux.
En double allure. Pour ce qui est de l’art, quelques festivals malgaches devraient être plus créatifs. Pour la musique, la relève est plus que jamais attendue. L’année 2019 a démontré qu’un livre entier, pas seulement une page, est en train de se fermer avec les disparitions successives d’artistes.
La danse contemporaine ou autre se sont terrées depuis quelques années, le cinéma malgache se cherche de nouveau, la bande dessinée navigue sous un bon vent, la littérature devrait se dépareiller de son image « underground », le théâtre se réveille difficilement, la photographie s’est tassée dans son petit coin…
La peinture est en ordre dispersée, des approches connexes plus modernes sont devenues un langage d’OVNI…
Bref, 60 ans d’Indépendance…
Maminirina Rado