C’est le prix à payer dans cet hôtel 5 étoiles qui vient d’ouvrir ses portes dans la capitale. Si l’établissement affiche allègrement ce tarif, c’est parce qu’il n’est pas prohibitif pour la clientèle qu’il vise. Mais en faisant cette publication, il veut aussi afficher que son produit est le « must » sur la place car, hormis les résidences pour stars internationales nichées sur les îlots des environs de Nosy-Be, les tarifs pratiqués sont en deçà de chez ses concurrents de la même trempe, ou proche de la catégorie à Madagascar. En effet, un million d’ariary la nuit, soit approximativement 250 euros, c’est… monnaie courante ailleurs dans les palaces des grandes villes du monde. Mais par rapport au pouvoir d’achat des Malgaches, cela représente cinq fois le salaire mensuel minimum officiel. Ce qui peut paraître hors de portée. On peut d’ailleurs, soit dit en passant, se demander combien gagnent les femmes de chambre qui y travaillent. Enfin, les choses étant ce qu’elles sont, et ne peuvent être autrement comme on dit stoïquement, contentons-nous toujours des emplois créés.
Mais la question que se pose l’observateur est le pourquoi de cette envolée des investissements dans le domaine de l’hôtellerie du pays, alors que les statistiques officielles ne font pas apparaître un « boom » du tourisme. Rappelons que le nombre officiel des entrées de non-résidents sur le territoire, dans l’année qui court, n’égalise pas encore celui de 2008, une année fructueuse. N’empêche que la capitale voit sans cesse sortir de terre des hôtels étoilés malgré le marasme ambiant. De plus, les « businessmen » qui opèrent dans ce secteur n’en sont pas à leurs premières affaires, mais ont déjà fait leurs preuves dans d’autres domaines. Le mystère demeure, même pour les observateurs avertis, quand on voit ces infrastructures hotelières s’ériger dans cette forêt de taudis qui forme leurs horizons. En principe, un tel investissement vaut pour le tourisme d’affaires : salons, congrès, prospections etc. Mais même lorsque l’on regarde ce qui se passe chez les voisins mauriciens et sud-africains, on constate que Madagascar n’est pas encore dans le circuit des meetings internationaux.
L’on susurre qu’il y a, quelque part, un « brain-trust » (un groupe d’experts) qui élabore des orientations stratégiques, définit des actions, finance et contrôle les réalisations. La particularité de ce groupe est qu’il a une vision globale, mondialiste et non confinée à une nation ou un continent. Les interlocuteurs directs de ce groupe sont triés parmi des élites économiques, et ils sont très peu nombreux. Dans leurs perspectives, ils doivent donc prévoir un vrai décollage de notre économie, et veulent être au premier rang si tel phénomène venait à se réaliser. Ainsi, ils (ces investisseurs dont il est question) se réfèrent à ce « brain-trust » pour toutes les opportunités possibles, même si le contexte local ne présente pas de conditions favorables.
Et tous se demandent pourquoi il n’existe pas une telle « tour de garde » qui veille et conseille nos investisseurs de souche. Car loin de faire preuve de xénophobie ou d’ostracisme envers cette communauté disons plus binationale que nationale, nos interminables tiraillements internes s’atténueraient sensiblement.
M.Ranarivao