
(crédits photos : Delors Jaozandry)
Le regard des tananariviens envers la société, envers lui–même, a complètement évolué avec l’entrée des réseaux sociaux. Dès que les dirigeants ont annoncé avec plus de détails, dimanche soir, les mesures pour les quinze jours de « reconfinement » plus sévères. Il fallait s’attendre à ce que des dizaines de témoignages visuels inondent « facebook » dès le lendemain. Ainsi, des images de foule immense dans les rues sont partagées sur ce réseau social. Difficile d’imaginer que dès que midi sonne, cette étendue humaine puisse disparaître d’un coup. Tout comme ceux ou celles, dénonçant les groupes de personnes qui s’adonnent aux jeux de hasard dans les couloirs et les cours/espaces communs des quartiers difficiles. Manjakaray, Ampitatafika, Ambohimanarina et ses parcelles… Bref, ces cités où le populisme politique est toujours servi sans autre perspective. Loin du tableau d’art, de sa conceptualisation démiurgique de la « horde amorphe », la numérisation amène cette vision entomologique. Telle une nuée d’insectes nocifs et grouillants, où la grégarité de l’instinct règne. Voilà, ce qu’est l’image de la pauvreté et elle génère des centaines de commentaires et de réactions sur « facebook ». Et qu’ensuite, certains commentaires s’étonnent de voir cette « horde » sortir de chez elle pour sa pitance quotidienne. L’image d’une démographie dont les politiques n’ont jamais considéré ni forcé une mise en conformité avec l’urbanisation, quitte à bouleverser quelques idées acquises. Des images presque artificielles, faisant quelque peu penser que Antananarivo est devenu depuis des lustres un espace clos. Un village rural, aux rêves de ville–monde. Il est fort probable, ses images seront partagées sur « Twitter », « Instagram », « Youtube »… et là, c’est une autre sphère numérique qui les analyse. Personne n’est plus à l’abri, foi d’un insecte.
Maminirina Rado