
Rentré hier en catimini sans passeport après six ans d’exil, Marc Ravalomanana a fini par être placé en résidence surveillée dans un endroit inconnu.
Le retour de l’ancien président Marc Ravalomanana a fait l’effet d’une bombe hier tôt le matin. Au début, bon nombre de Malgaches n’y ont pas cru. Mais, le scepticisme s’est levé lorsque Marc Ravalomanana était apparu avec sa femme et son fils Tojo à la véranda de sa maison de Faravohitra pour s’adresser directement à ses partisans massivement réunis avec liesse. Pour confirmer sa présence au pays, l’ancien président, après avoir consulté les barons et les députés de sa mouvance, a tenu hier même à 11 h une conférence de presse durant laquelle il n’a pas accepté de dévoiler comment il a pu rentrer. L’ex-exilé d’Afrique du Sud n’a pas cependant caché ses intentions pour son pays. « Nous allons changer car ce qu’endure le peuple malgache n’est plus acceptable. », a-t-il laissé entendre. Avant d’enfoncer le clou : « Nous ne pouvons plus attendre 2018. »
Trois heures après. Le pouvoir n’a pas tardé à réagir. Trois heures après la conférence de presse de l’ancien président et quelques heures après l’intervention du directeur de cabinet de la Présidence Henri Rabary-Njaka qui a déclaré que des mesures allaient être prises contre ce dernier, 40 éléments des forces de l’ordre composés notamment d’hommes du GSIS ont procédé à une arrestation rapide à Faravohitra. Les éléments des forces de l’ordre ont dispersé à coup de grenades lacrymogènes les personnes qui se rassemblaient en dehors du domicile de Marc Ravalomanana avant de tirer à balles réelles sur la porte d’entrée. A l’intérieur, les hommes armés et cagoulés ont forcé les gens qui s’y trouvaient à s’allonger sur le sol avant de « prendre » l’homme qu’ils cherchaient. L’ancien chef de l’Etat n’a pas fait de résistance contrairement aux deux éléments de sa sécurité que les forces de l’ordre ont violemment agressés.
Condamnation. Alors que l’ex-exilé d’Afrique du Sud était détenu au « Toby Ratsimandrava » à Andrefan’Ambohijanahary, son avocat Désiré Randrianarivelo a tenu à Faravohitra une conférence de presse pour dénoncer une « arrestation illégale » et la « violence » avec laquelle cette arrestation a été effectuée. « Les forces de l’ordre n’étaient pas munis d’un mandat. Par ailleurs, on a bafoué le statut d’ancien chef d’Etat dont dispose Marc Ravalomanana. Et encore, Marc Ravalomanana est privé de son droit d’être assisté par ses avocats durant son audition. », a déploré Désiré Randrianarivelo qui a été immédiatement contredit au cours de la même conférence de presse par Benja Andriamihanta de la CENI-T, un autre juriste de la Mouvance Ravalomanana, pour qui l’arrestation de l’ex-exilé d’Afrique du Sud a été faite dans le respect de l’Etat de droit et que l’ancien président n’a pas été arrêté, mais mis en sécurité.
Cohabitation. Après son audition au « Toby Ratsimandrava » qui a duré deux heures hier, Marc Ravalomanana a été conduit dans un endroit jusqu’ici inconnu. Il serait en ce moment placé en résidence surveillée, mais on ne sait pas où. A Mantasoa ou à Ambatolampy ? A Arivonimamo ou à Manjakandriana ? Nos dernières informations indiquent que l’ancien président est placé en résidence surveillée à Arivonimamo. Quel que soit l’endroit de cette résidence surveillée, la communauté internationale ne peut pas rester indifférente au sort de l’ancien président. D’ailleurs, si ce dernier a pu rentrer hier à Madagascar, c’est parce que des organisations régionales comme la SADC et des pays comme la France (Quai d’Orsay), les Etats-Unis, l’Allemagne, la Norvège, l’Afrique du Sud…y auraient contribué de près ou de loin. Jusqu’ici, le régime de Hery Rajaonarimampianina considère Marc Ravalomanana comme son adversaire politique. Mais jusqu’à quand ? Pour certains observateurs politiques avertis, une alliance Ravalomanana-Rajaonarimampianina n’est pas à exclure. Cette alliance pourrait se matérialiser par une cohabitation au sein d’un gouvernement. Dans ce cas, Andry Rajoelina serait le grand perdant.
R. Eugène