Plume de P : Partir

Me traiterez-vous de barjo si je vous disais que vieillir est un des plus
beaux cadeaux que nous offre la vie ? Eh oui, s’il fallait vivre à cent à
l’heure toute son existence, à quel moment prendrait-on le temps
d’admirer la beauté de toutes ces petites choses qui peuvent paraitre
futiles quand on est jeune ou dans la fleur de l’âge, mais qui, pourtant,
donnent aux secondes un reflet d’éternité ?
Certes, physiologiquement, nous perdons peu à peu le punch de nos
20 ans, toutefois, là encore avec le recul, on peut se dire qu’avoir 20
ans deux fois modifierait notre destinée ! Imaginez les folies que l’on
fait à cet âge, multipliées par deux !… brrrr j’en frissonne !
Bref, venons-en au fait ! Pourquoi vieillir est-il une chance ? Je parie
que vous donnez votre langue au chat ! La réponse est pourtant
simple : pour que l’on puisse partir sans regrets !
Partir ! Quoi que nous fassions, quoi que nous commencions, on
amorce toujours une chose en préparant son terme ! Rien n’est
éternel : les vacances, le travail, la jeunesse, la passion, la richesse, les
mandats exercés… Alors, la vie nous prépare à nous en séparer en
nous embarquant sur un chemin tarabiscoté qui nous en fait voir de
toutes les couleurs si bien qu’on vit intensément et qu’au bout du
compte on s’épuise, on se ride, sans avoir vu le temps passer. Partir est
alors non pas une fin, mais le repos bien mérité du guerrier !
La nature est bien faite et rien ne se passe sans raison. Aussi, quand
une chose vient à son échéance, il est inutile de s’accrocher coûte que
coûte. A quoi sert de rendre scabreux et douloureux son départ, il faut
savoir partir en beauté. Quand le rideau tombe, l’au-delà de la scène
nous réserve encore l’inconnu, un inconnu que nous, tous autant que
nous sommes, devrions expérimenter !
Si jeunesse savait, elle aurait plus de respect envers tous ceux qui, en
prenant de l’âge, doucement mais sûrement, s’éclipsent pour leur
laisser la place !