Le fonds d’investissement à impact, Miarakap, redéfinit ses engagements après une participation active à la COP 28. Interview exclusive avec Koloina Ramaromandray, directrice des programmes de Blended Finance, au sein de ce fonds.
Midi Madagasikara (MM). Pouvez-vous nous décrire en quoi consiste le fonds d’investissement Miarakap ? Quel était votre intérêt à participer à la COP 28 ?
Miarakap est un fonds d’investissement à impact, spécialiste du « Blended Finance » (ou financement mixte) pour les entrepreneurs à Madagascar, dont la mission est de contribuer au développement économique, social et à la préservation de l’environnement. Nous finançons, accompagnons et promouvons une nouvelle génération d’entrepreneurs d’impact ambitieux et responsables, désireux d’être acteurs d’un changement positif. J’ai participé à la COP 28 en tant que représentante de la jeunesse malgache, engagée pour le climat et en tant que représentante de Miarakap. En mettant en avant les initiatives de l’alliance et de Miarakap, je souhaitais démontrer comment le secteur privé joue un rôle crucial dans l’adaptation des populations vulnérables aux effets du changement climatique, avec ce que nous faisons sur le terrain. À date, nous avons déjà financé et accompagné près de 25 entreprises dans l’agroforesterie, l’énergie, l’agriculture, la gestion des déchets, qui contribuent à développer une économie circulaire locale, à créer des emplois décents au niveaux des communautés locales, à les former aux pratiques durables, à augmenter le nombre d’hectares de terre sous gestion améliorée, à séquestrer ou à éviter des tonnes de carbones.
MM. Quels sont les acquis de la participation du fonds à cette manifestation internationale sur le climat ?
Les enseignements-clés, tirés de notre participation à cette manifestation internationale sur le climat, vont dans le sens de notre stratégie d’expansion, toujours centrée autour des entrepreneurs à impact à travers une approche collaborative et des solutions de financement innovantes. On peut citer quatre points majeurs. D’abord, la nécessité d’avoir une approche centrée sur l’humain, c’est-à-dire que le sujet englobe les aspects humains, sociaux et de lutte contre la pauvreté. Ensuite, la nécessité d’avoir des solutions locales ou régionales, portées par une équipe locale, en partant des réels besoins des communautés. Puis, le secteur privé n’est plus un simple « allié » dans la lutte contre le changement climatique mais une partie incontournable à part entière, compte tenu du gap de financement pour le climat, de la capacité des entreprises à implémenter des solutions pérennes, ainsi que de leur capacité à innover et à investir. Et enfin dans un contexte difficile, il y a une nécessité d’innover dans les solutions de financement, notamment à travers le Blended Finance, qui se définit comme l’utilisation stratégique de financement du développement et des fonds philanthropiques pour mobiliser les flux de capitaux privés vers les marchés émergents, engendrant des résultats positifs pour les investisseurs et les communautés touchées.
MM. Pourriez-vous nous expliquer comment le fonds MBCF (Mitsiry Biodiversity and Climate Fund), se différencie des autres projets similaires ?
Doté d’un capital cible de 30 millions USD, ce fonds de Blended Finance accompagne des PME et des startups. Ceux-ci sont ceux en transition vers des modèles de valorisation durable des ressources naturelles, principalement dans le secteur de la transformation agro industrielle, ceux apportant des solutions innovantes et systémiques fondées sur la nature, ceux développant des modèles d’accès aux énergies renouvelables, aux biocombustibles, et d’agroforesterie, adaptés aux réalités du terrain, et ceux améliorant les conditions de vie des populations vulnérables en offrant des biens et services essentiels à grande échelle. MBCF est le pionnier et le seul fonds de financement mixte dédié au financement d’entreprises à impact positif sur la biodiversité et le climat dans la région. MBCF servira d’intermédiaire entre les entreprises mal desservies et les investisseurs d’impact qui souhaitent s’attaquer aux défis de la région mais ne peuvent pas le faire directement. MBCF joue également un rôle essentiel en comblant les lacunes des structures de financement existantes (option limitée et coûteuse). Une innovation forte dans cette approche est l’association de quatre acteurs experts autour d’une thèse d’impact unique : un gestionnaire de fonds expérimenté (Miarakap), un expert en finance nature et climat (Kinomé), une ONG environnementale de renommée mondiale (WWF) et l’une des organisations de développement les plus actives dans la région (USAID).
MM. Pouvez-vous nous partager les prochaines étapes et les objectifs à court terme du fonds ? Comment envisagez-vous l’expansion et l’impact futur de ce fonds au-delà de 2024 ?
Nous sommes actuellement dans un processus avancé de levée de fonds avec des discussions en cours avec plusieurs parties prenantes et nous prévoyons de lever d’ici mi 2024, un premier tour de 30 millions USD auprès d’investisseurs institutionnels et privés, nationaux et internationaux désireux d’accroître leurs impacts dans une région au capital naturel unique. Avec ce fonds, nous prévoyons de financer une vingtaine d’entreprises, championnes dans la conservation de la biodiversité et dans la lutte contre les effets du changement climatique, qui contribueront à créer ou maintenir près de 10 000 emplois, toucheront près de 500 000 personnes, séquestreront plusieurs centaines de tonnes de gaz à effets de serre, contribueront à l’amélioration de la gestion de plusieurs hectares de terres, et démontreront des modèles d’entrepreneuriat durables, responsables et rentables.
Recueillis par Antsa R.