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mercredi, mars 12, 2025
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Hery Rajaonah et son « piment des étoiles »

Entre ville et campagne à Ivato se trouve la pépinière d’Hery Rajaonah, Rajaonah pour les passionnés comme lui, s’y trouve alors le roi des piments « Carolina Reaper ». En ce lieu, quelques fois s’entendent des petits cris ou des noms d’oiseaux prononcés sous le regard satisfait de ce digne fils d’Ivato.

« HJ3 Solar Flare » est né dans l’espace, dans un vaisseau chinois. Après, « c’était le premier que j’ai planté, mon tout premier », se remémore Hery Rajaonah. Ce jeune homme de 28 ans a démarré sa ferme-pépinière il y a 6 ans à Ivato, à 3 kilomètres au Nord de l’aéroport international. Entre la ville et la campagne, « Primotalii Madagasikara » possède aujourd’hui plus de 200 variétés de piments. « En fait, le piment est à la base un fruit », tient-il à préciser. Des variétés récoltées depuis les cinq continents. Et à l’appellation parfois inattendue, « Why not », « Dedo de Moca », « The real Mme Jeannette », « Pimento Picñ »,… Pour la petite histoire, « HJ3 Solar Flare » a été planté par des cosmonautes et développé sans apesanteur à des centaines de kilomètres de la terre. Hery Rajaonah a réussi à s’en procurer des graines. Aujourd’hui, il en possède des dizaines de pieds. Aux côtés du fameux, c’est peu de le dire, « Carolina Reaper ». Une petite présentation du pépiniériste s’impose. « Le ‘’pilo gasy’’ se trouve à 3 000 SHU à l’échelle de Scoville, Carolina Reaper se trouve à 2 200 000 SHU », développe-t-il sans broncher. Dans son jardin, il possède donc un fruit à invoquer la Sainte Vierge et les eunuques une fois en bouche. Effectivement, la montée en douceur de la forte chaleur et sa persistance dans le palais assure plusieurs minutes de souffrance larmoyante pour un non-initié. Pourtant, Hery Rajaonah adore, avec le ton rassurant, faire goûter ses piments à chaque visiteur.

Une fierté pour lui, « de quoi faire une bonne surprise à ma femme », s’exclame un des gouteurs-visiteurs. Pour éviter d’aller à la limite des potentiels de Carolina Reaper, autant le cracher après quelques secondes. D’autres espèces moins agressives sont à portée de cueillette dans la pépinière. Le succulent « Aji Lemon » donne raison à l’affirmation d’Hery Rajaonah quand il dit que le piment est un fruit, avec ses goûts d’agrumes, un peu sucré, arôme fruité et une rondeur sur la langue presque désaltérante. « Pour le moment, j’en suis à deux cents variétés. Mais mon rêve est de posséder les quatre mille espèces, et plus, existantes dans le monde », met-il en perspective. Un processus qu’il met en marche maintenant, depuis qu’il a réussi à surmonter une terrible épreuve il y a deux ans. Presque une petite mort pour les passionnés de plantes et de jardinage. « J’avais déjà réussi à rassembler cent variétés. En quelques jours, elles ont fané sauf deux ou trois. Puis quand j’ai regardé les survivants, la couleur des fruits, je me suis dit qu’il fallait que je poursuive ». Parmi les survivants, l’« HJ3 Solar Flare », le premier piment qu’il a planté, celui qui venait de l’espace. Peut-être une bonne étoile ou non, le pépiniériste se remet en selle. Il contacte les passionnés à travers le monde.

Inscrire son nom. Des États-Unis, de la Suisse, d’Australie, du Brésil, d’Allemagne, d’Afrique du Sud, etc., sa pépinière reprend vie. « Les graines que j’achète de l’étranger se trouvent entre deux à dix euros la dizaine. Les variétés jalapeno sont les plus abordables », explique Hery Rajaonah. Pour l’anecdote, les graines sont envoyées par la poste, avec un système de traçage. Etonnamment, sa dernière commande depuis l’Afrique du Sud n’est pas encore arrivée à destination. « Trois ans pour qu’elles deviennent inutilisables », positive-t-il. Cette année, une nouvelle ligne droite s’annonce. « Primotalii Madagasikara » va se lancer dans les produits dérivés. Des clients, tout aussi passionné comme lui, il en possède à travers Madagascar et dans quelques pays du globe. « Le dernier qui en a acheté venait d’Ambatondrazaka », annonce sa mère Hanitra Razafindratsimba. En passant, sa fierté est le concombre mexicain, une plante rampante similaire à la vigne. Les fruits ne sont pas en grappe, mélangés à l’aubergine amère en salade, un régal.

Avant d’ajouter, « d’autres acheteurs venaient de Nosy-Be, d’Itasy, d’Ambatondrazaka ». Hery Rajaonah tient à soulignerque  ce sont « tous des passionnés ». Soudain ses yeux s’illuminent tout en révélant : « Je suis en train de faire des croisements ». Le projet, inscrire un produit de « recherche » malgache dans la liste de la « grande instance mondiale » du piment. Une création qui s’ajoutera aux « Pimenta Lisa », « Poivron Choco » et à des milliers d’autres. En fait, seules 10 à 15 variétés de plantes sources existent dans le monde. « Des chiffres non exhaustifs, il existe sûrement encore des variétés non répertoriées », clame-t-il. Le seul piment endémique de Madagascar est le piment rond de Majunga, de couleur verte ou rouge. Les « Tsilandimilahy », « Pilo kely », « Mainty bory » et d’autres viennent soit d’Amérique latine ou d’Afrique grâce aux commerces du temps des navigations européennes. Le croisement complète la longue liste des plus de 4 000 autres piments existants dans le monde. « Je prendrai un piment ‘’malgache’’ que je combinerai avec un piment étranger pour en tirer une couleur, un arôme ou la puissance ». Il soumettra ensuite ses résultats à cette instance, avec toute une batterie d’analyses et espère en récolter une approbation.

Et la concurrence est rude pour Hery Rajaonah. Il lui reste un long chemin. « Il faut attendre vers la huitième génération pour pouvoir espérer se dire qu’il s’agit d’une nouvelle création », lance-t-il, avec un ton égal. Le traumatisme d’il y a deux ans semble encore avoir laissé des traces. Ce qui veut dire, trois à quatre ans de travail acharné, à bichonner ses pouces, à prier que l’hiver soit clément pour ses plantes. « Elles adorent les régions chaudes », avoue-t-il. Pour l’instant, ses piments, il les réserve à sa clientèle en tant que traiteur. D’un air amusé, il met en avant « des fois, il faut prévenir les gourmets avant de servir le plat ». Il croit si bien dire, un Carolina Reaper nécessiterait presque une préparation mentale.

Maminirina Rado   

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