
Madagascar a enregistré un important excédent commercial vis-à-vis de la puissante économie américaine. Selon les économistes, ce déséquilibre de la balance commerciale est surtout favorisé par les besoins non sophistiqués des consommateurs malgaches.
Quand Washington tousse, Antananarivo tremble. La publication de la taxation américaine, qui frappe Madagascar à hauteur de 47% a déclenché une inquiétude généralisée, aussi bien au niveau du secteur public que du secteur privé de la Grande-île. Pour les Etats Unis, il s’agit d’une simple mesure corrective visant à réduire le déséquilibre commercial entre les deux pays. Si Madagascar a importé pour 53,4 millions de dollars de biens américains, elle en a exporté pour près de 733,2 millions, creusant ce déséquilibre commercial que Washington n’entend plus tolérer. Pour le président américain Donald Trump, cette situation résulte de barrières équivalentes à une taxe de 93 %, une affirmation qui est loin de la réalité, si l’on se réfère aux informations fournies par la Direction Générale des Douanes malgaches.
Insoutenable
Selon Ernest Zafivanona Lainkana, DG des Douanes, les droits et taxes à l’importation ne dépassent en moyenne que 12 %. Une politique tarifaire ciblée, affirme-t-il, conçue pour stimuler la production locale : 5 % pour les matières premières et équipements, 10 % pour les produits intermédiaires et 20 % pour les produits finis. Mais cette défense, bien que techniquement fondée, ne suffit pas à dissiper la tension. De son côté, l’opinion se demande d’où vient donc cette différence entre la taxation moyenne de 12% indiquée par la Douane malgache et les 93% ressentis par les Etats Unis ? Pour Washington, d’autres obstacles – logistiques, réglementaires ou liés à la manipulation du taux de change – freinent l’accès de leurs produits au marché malgache. Et pourtant, la faible compétitivité des produits américains sur le marché malgache s’explique avant tout par une double réalité : d’une part, les coûts élevés induits par la longue distance – qui alourdit les frais de transport – ainsi que par le prix élevé de la main-d’œuvre aux États-Unis ; d’autre part, un pouvoir d’achat limité chez les consommateurs malgaches, qui les pousse à privilégier les produits à bas prix, souvent plus simples et adaptés à des besoins peu sophistiqués.
Balance des paiements
Derrière ces débats tarifaires se cache une menace bien plus grave pour l’économie nationale. La décision américaine d’imposer une taxe de 47 % sur les Malgaches, combinée à l’incertitude qui plane sur le renouvellement de l’AGOA, pourrait déclencher une onde de choc. Les entreprises franches, notamment dans le textile, qui dépendent largement des exportations vers les États-Unis, risquent de perdre leur principal débouché. Des dizaines de milliers d’emplois sont en jeu, dans un pays où les alternatives de reconversion sont rares.Ce choc externe se traduirait par une contraction sévère des rentrées de devises, mettant à mal la balance des paiements. Alors que Madagascar est déjà fragile sur le plan économique, une chute brutale des exportations viendrait déséquilibrer le compte courant, accroître le déficit et exercer une pression dangereuse sur la monnaie nationale. À cela s’ajouterait une inflation importée difficile à maîtriser.À mesure que l’horizon s’assombrit, une chose est sûre : l’enjeu dépasse les statistiques douanières. Il en va de la résilience même de l’économie malgache face à une mondialisation de plus en plus instable.
Antsa R.