« Entre New Delhi et Islamabad, la tension est maximale depuis un attentat perpétré dans le Cachemire indien la semaine dernière. 26 personnes sont mortes dans cette attaque, qui a eu lieu dans une région que les deux pays revendiquent depuis leur indépendance en 1947. », annoncent les agences de presse, fin avril dernier. Information anodine pour beaucoup d’entre nous. Mais gardons-nous de notre habituelle indifférence de ce qui passe ailleurs même si cet attentat s’est passé aux antipodes de notre île.
Comme la plupart des grands problèmes contemporains dont la source est la décomposition des grands empires coloniaux du XIXe siècle, celui de l’empire britannique, du sous-continent indien en est l’exemple. La fin de la colonisation anglaise a entraîné principalement la création de deux Etats, le Pakistan et l’Inde mais aussi d’autres entités géographiques qui ont servi de déversoir de populations disputées des deux et dont le contrôle est toujours litigieux, pour preuve, l’ex Cachemire est décomposé de 3 territoires (contrôlés par le Pakistan, l’Inde et la Chine) n’ont pas de « frontières reconnues » mais des « lignes de contrôle ».
Mais le Cachemire est si loin de nous que les enfants diraient : « Inona no idiran’ny vitsika amin’ny pétrole » pour dire qu’il n’y aucun lien entre ce territoire et Madagascar. Mais c’est ignorer que nous avons chez nous les « Karana » ou ce qu’on appelle improprement « Indo-Pakistanais » faisant allusion à un espace géographique peuplé de diverses ethnies.
Sophie Blanchy dans son ouvrage intitulé « Karana et Banians » ou Les Communautés commerciales d’origine indienne à Madagascar, publié en 1995 chez L’Harmattan en dit long sur cette communauté et ses origines dont elle revendique (si près) et dont elle est étrangère à la fois (si loin). Une communauté dont le rôle économique est important dans le pays. Elle écrit page 16 « L’identité karana ressemble à un puzzle ; le pays d’origine, l’Inde du Nord-Ouest, plus précisément la presqu’île du Kathiawar et le Kutch dans l’État du Guéjarat, est totalement inconnu de bon nombre d’entre eux actuellement. Pire, pour ceux qui y sont allés, ils se sont parfois retrouvés étrangers « chez eux ». Pourtant la langue gujerati est ce qu’ils parlent depuis leur plus tendre enfance : c’est leur langue maternelle apprise en même temps que le malgache parlé avec la « nénène » (mpiasa ou ramatoa)… Cette langue gujerati, est source d’identité ethnique,… Être gujerati et musulman, quelque soit la secte est donc au cœur de l’identité karana, fait partie de sa tradition ». Tout cela pour savoir si la tension entre Islamabad et New Delhi peut impacter sur les relations entre Karana et Banian (hindous). Apparemment non, du moins officiellement.
M.Ranarivao.