
Le Bureau indépendant anti-corruption (Bianco) a présenté publiquement, le mardi 13 mai 2025 au ministère des Affaires étrangères, son rapport annuel sur la lutte contre la corruption pour l’année 2024.
Les chiffres avancés dans le rapport 2024 du Bianco sont révélateurs d’une dynamique renforcée en matière de lutte contre la corruption. Au total, 598 cas de corruption ont été détectés et transmis aux juridictions compétentes, soit une hausse de 7,5% par rapport à l’année précédente. Parmi les personnes mises en cause, 1950 ont fait l’objet d’enquêtes, 680 ont été arrêtées et 174 ont été placées sous mandat de dépôt. Ce dernier chiffre marque une progression significative de 83,16%. Cela peut être interprété comme un signal fort adressé à ceux qui s’adonnent à des pratiques illicites. En parallèle, 2 688 doléances ont été enregistrées par le Bianco, dont 1 322 jugées suffisamment fondées pour faire l’objet d’enquêtes approfondies.
Les actions menées en matière de recouvrement des avoirs issus de la corruption témoignent également d’un engagement opérationnel. La valeur totale des biens récupérés atteint près de 23,8 milliards d’ariary. Elle se compose notamment de véhicules, de terrains non bâtis et d’immeubles. Par ailleurs, quatorze réseaux organisés spécialisés dans la spoliation foncière ont été démantelés au cours de l’année, un résultat important compte tenu de l’ampleur de ce phénomène sur le territoire.
Cependant, au-delà des progrès sur le terrain, le rapport met en lumière un déséquilibre dans la répartition des sanctions. Si de nombreux fonctionnaires et élus locaux ont été arrêtés et placés sous mandat de dépôt, aucun membre du gouvernement ni des institutions nationales n’a été poursuivi judiciairement, malgré les enquêtes engagées. Ainsi, courant 2024, un membre du gouvernement, dix membres d’institutions nationales et vingt-trois représentants du système judiciaire ont été formellement enquêtés pour des faits de corruption, selon le rapport du Bianco.
Hauts fonctionnaires
Pourtant, aucun d’entre eux n’a été arrêté ni placé en détention préventive. Ce constat contraste fortement avec le traitement réservé à d’autres catégories d’agents publics. Parmi les élus des collectivités territoriales, 223 ont été enquêtés, 71 arrêtés et 26 placés sous mandat de dépôt. De même, sur les 56 hauts fonctionnaires nommés par décret qui ont été concernés par des enquêtes, 36 ont été interpellés et 13 ont été incarcérés. Les agents de l’administration domaniale ne sont pas en reste : sur 100 fonctionnaires visés, 43 ont été arrêtés et 7 placés sous mandat de dépôt.
Le rapport 2024 du Bianco montre sans conteste que des efforts ont été déployés et que des résultats sont au rendez-vous. La mobilisation des structures de contrôle, l’efficacité des investigations, la participation accrue des citoyens et les opérations de récupération d’avoirs illicites sont autant d’indicateurs d’une volonté d’assainissement. Toutefois, tant que la justice ne s’appliquera pas équitablement à toutes les sphères du pouvoir, ces avancées restent incomplètes.
Rija R.