
Pris de court. Les clients des banques ont été surpris par le communiqué diffusé par l’Association Professionnelle des Banques (APB) relatif à l’imposition d’une TVA de 20% sur les crédits bancaires.
Le communiqué en question informe la clientèle bancaire malgache que « conformément aux dispositions de la loi de finances 2025, les intérêts bancaires seront dorénavant soumis à une taxe sur la valeur ajoutée de 20%.
Effet rétroactif
Une surprise d’autant plus désagréable pour les clients des banques quand on sait que l’APB a décidé que la mesure en question aura un effet rétroactif. « Cette mesure est entrée en vigueur depuis le mois de janvier 2025, mais sera effectivement appliquée par les banques à partir de ce 1er juillet, avec un effet rétroactif sur tous les crédits décaissés à partir du 1er janvier », précise le communiqué de l’APB. Pour bon nombre de clients des banques, ces dernières auraient dû faire preuve de transparence depuis le début. « Si j’avais été informé par ma banque de l’existence d’une telle mesure au moment de signer mon contrat de prêt, j’aurais pris mes propres dispositions avant de décider », déplore un client qui se demande désormais comment il va faire pour payer les 20 % supplémentaires sur les intérêts de l’emprunt auquel il a souscrit.
Par ailleurs, pour certains observateurs du secteur financier, il ne devrait pas être question d’un effet rétroactif dans la mesure où, s’agissant d’une disposition légale prévue dans la loi de finances votée par le Parlement, son application par les banques aurait dû être immédiate depuis le mois de janvier. En tout cas, même si c’est déjà trop tard, les clients des banques attendent de leur part de plus amples explications. L’APB invite d’ailleurs « les clients emprunteurs à se rapprocher de leur banque respective pour toute information et/ou accompagnement nécessaire ».
Choix cornélien
Du côté de l’administration, on explique cette mesure par un souci de réduction des dépenses fiscales, plus communément appelées incitations fiscales. En effet, d’après une analyse du Fonds Monétaire International, Madagascar figure parmi les pays africains présentant un très haut niveau d’incitations fiscales dont les impacts négatifs sur les finances de l’État sont importants. « Les dépenses fiscales représentent 3 % du PIB, soit 2 000 milliards d’ariary par an », a-t-on expliqué du côté du ministère de l’Économie et des Finances. Raison pour laquelle il a été convenu avec le FMI, dans le cadre du programme au titre de la Facilité Élargie de Crédit (FEC), de procéder à une suppression de 280 milliards d’ariary de dépenses fiscales par an sur une période de trois ans.
Un choix cornélien pour les autorités financières, quand on sait que ce sont surtout des produits de consommation courante qui sont concernés par les incitations fiscales. C’est le cas notamment du riz qui représente, selon le MEF, la plus grande part des dépenses fiscales. « Le gouvernement, qui priorise les intérêts des consommateurs, n’a pas l’intention de taxer le riz, qui reste l’aliment de base de la population », a expliqué à plusieurs reprises la ministre de l’Économie et des Finances, Rindra Hasimbelo Rabarinirinarison.
Le moindre mal
D’où cette option sur d’autres produits et services à taxer, dont, cette fois-ci, les intérêts des crédits bancaires. Bref, entre le riz et les crédits, le gouvernement a choisi le moindre mal.
Par ailleurs, les autorités financières nationales vont encore être obligées de continuer à procéder à ce difficile choix des dépenses fiscales à supprimer. Ce sera encore le cas dans la préparation du projet de loi de finances initiale 2026. Dans cette perspective, le ministère de l’Économie et des Finances continue de recourir au partenariat public-privé dans la prise de décisions. Ainsi, dès ce mois de juillet, un dialogue public-privé est prévu pour discuter justement de cette question cruciale des dépenses fiscales où les groupements d’opérateurs économiques auront certainement leurs mots… mais aussi leurs maux à dire.
R.Edmond.