
Rideau sur six années de mise en œuvre du programme de pêche durable ECOFISH, qui affiche un bilan largement positif en étant à l’origine d’outils innovants et d’initiatives communautaires à fort impact, qui continueront à transformer le secteur des pêches dans la région de l’Afrique australe, orientale et de l’océan Indien où il a été mis en œuvre.
Clap de fin pour le programme ECOFISH mis en œuvre par la Commission de l’Océan Indien (COI) qui a couvert une vaste partie de l’Afrique australe, orientale, et de l’océan Indien (AA-AO-OI). Lancé en 2019 et financé à hauteur de 28 millions d’euros par l’Union Européenne (11e FED), ce programme a centré ses actions sur la durabilité en tenant compte à la fois de la pêche artisanale et de la pêche industrielle. Les actions menées dans le cadre de programme ont permis la création d’outils innovants pour les communautés de pêcheurs.
Plateforme
C’est ainsi que la Plateforme de coordination pour les pêches durables et l’économie bleue en Afrique orientale et australe (ESA-SFBE-CP) est mise au service des pêcheurs et de leurs communautés en offrant des instruments qui s’appuient sur trois volets majeurs : les données et le système d’informations ; le financement et l’organisation ; la science et la recherche.
Dans les détails, le volet des données et du système d’information inclut le BEDSA, compteur économique permettant de comptabiliser l’apport exact de la pêche au PIB, au commerce et à l’emploi. Ces données permettent alors de mesurer l’apport économique de la pêche et de démontrer son rôle moteur pour la croissance. Quant au système régional d’informations, il centralise les informations sur les espèces, les quantités et les zones de pêche, permettant de gérer les stocks de poissons de manière précise et en temps réel, évitant ainsi la surpêche et réduisant les prises accessoires. Le volet financement et organisation inclut, pour sa part, un fonds fiduciaire donnant aux pêcheurs artisanaux un accès direct au capital pour l’achat de meilleurs équipements, les rendant autonomes et réduisant ainsi leur dépendance aux subventions. Et enfin, le volet de la science se traduit en réseaux de recherche permettant de connecter les scientifiques et les communautés, donnant aux pêcheurs la possibilité d’apprendre les nouvelles techniques et de s’adapter plus facilement aux défis futurs. Par ailleurs, l’Observatoire climat-pêches, outil dans lequel interviennent les savoirs et les connaissances scientifiques, mesure l’impact du changement climatique sur les stocks de poissons, permettant aux décideurs d’adapter les politiques de pêche pour protéger les ressources sur le long terme.
Ces outils, testés et validés dans le cadre du programme ECOFISH seront consolidés dans la plateforme et mis à disposition de tous les pays de la région. Leur apport potentiel est estimé à 5 milliards d’euros de bénéfices économiques annuels pour la région.
Stratégie
La lutte contre les pertes et l’illégalité se trouve au cœur du programme ECOFISH. Une réduction de 50% des pertes post-capture permettra au secteur de réaliser plus de 500 millions d’euros d’économies par an. De même, une lutte efficace contre la pêche illégale permettrait de récupérer près d’un demi-milliard d’euros supplémentaires.
La lutte contre la pêche illégale dans la région a démontré son efficacité grâce à une surveillance et des patrouilles coordonnées. Depuis 2020, le Plan régional de surveillance des pêches (PRSP) a mené 12 patrouilles conjointes, conduisant à la détection de 37 infractions et au déroutement de 3 navires. Depuis sa création il y a 18 ans, le PRSP a effectué un total de 65 patrouilles régionales, contrôlé 723 navires et constaté 137 infractions. Réunissant les Comores, le Kenya, la France (La Réunion), Madagascar, Maurice, Mozambique, les Seychelles, la Somalie et la Tanzanie, le PRSP est un mécanisme emblématique de la coopération régionale qui allie moyens navals, aériens, technologiques et humains pour mener des opérations de suivi, contrôle et surveillance des pêches. Le programme a également soutenu le renforcement des capacités par le biais de la formation d’observateurs et de sessions avec l’Agence européenne de contrôle des pêches (EFCA).
Initiatives communautaires et formations
Neuf projets ont été soutenus par ECOFISH, avec des subventions à hauteur de 8 millions d’euros touchant plus de 50 000 familles. Des partenariats clés avec des ONG et agences spécialisées ont permis de développer des modèles de réussite. En fait partie, C3 Madagascar, un projet comptabilisant plus de 56 000 données d’enregistrement de débarquement de poissons, créant une base de connaissances essentielle pour la gestion durable.
La clôture du programme ECOFISH coïncide également avec la première promotion de diplômés du cours de premier cycle sur le Droit, l’Economie Bleue et la Gestion Durable de la Pêche, lancé en partenariat avec l’Open University en 2021. C’est ainsi que 20 professionnels de la région ont pu obtenir leur diplôme après trois années de formation, dispensée en ligne.
Au terme du programme ECOFISH, les partenaires engagés dans sa mise en œuvre ont appelé à une feuille de route pour la gouvernance régionale. Elle inclut la création d’un fonds fiduciaire et l’autonomisation des acteurs locaux. Une proposition a également été émise pour une gouvernance à deux niveaux, coordonnée par les Communautés économiques régionales (CER) et les volets techniques aux Organisations régionales de pêche (ORP), permettant d’allier vision politique et expertise de terrain. Dans une optique de consolidation des acquis de ce programme, l’Union européenne a confirmé son engagement avec un nouveau programme de 58 millions d’euros pour l’Océan Indien occidental.
Recueillis par Hanitra R.