
Une grève financière est une forme de mouvement de protestation menée par des agents chargés de la gestion des finances publiques, qui consiste à bloquer ou restreindre volontairement certaines opérations financières de l’État ou d’une administration, sans interruption du service.
Quoique non encore codifiée dans les législations du travail, cette définition de la grève financière s’apparente visiblement à l’appel lancé, à travers un communiqué publié, hier, par cinq syndicats du Trésor public malgache.
Dépenses obligatoires. Le Syndicat Professionnel des Inspecteurs du Trésor, le Syndicat du Personnel du Trésor Public Malagasy, le Syndicat des Percepteurs des Finances Malagasy, l’Association des Contrôleurs du Trésor de Madagascar, le Syndicat des Comptables du Trésor de Madagascar annoncent dans ce communiqué que désormais, seules les dépenses de solde et d’indemnité des fonctionnaires, ainsi que les pensions de retraite seront payées. Ces syndicats précisent qu’en tant que premier responsable de la protection des finances de l’Etat, ils tiennent à respecter les législations en matière de finances publiques. Décidée parallèlement aux manifestations populaires de la Place du 13 mai, cette initiative semble rassurer les fonctionnaires et les retraités qui n’ont pas à craindre d’un possible défaut de paiement de leurs salaires. Sur ce point, d’ailleurs, le ministère de l’Économie et des Finances a toujours annoncé que les soldes et les pensions faisant partie des dépenses obligatoires de l’État, leur paiement est une priorité.
Menace. Mais l’annonce est moins rassurante, voire, considérée comme une menace pour les autres partenaires de l’État. A l’instar des fournisseurs de l’administration qui risquent tout simplement d’être victimes d’un retard du paiement de leurs prestations puisque, à lire ce communiqué des syndicats du Trésor public, ils ne seront pas payés. « Cela risque d’impacter gravement sur nos activités », déclare un chef d’entreprise prestataire de l’État. Avec ce que cela suppose, bien évidemment d’impacts négatifs sur la vie quotidienne de ses employés qui risquent également de ne pas être payés. « Nous reconnaissons qu’en tant que priorité sociale, les salaires et les indemnités doivent être avancés, mais nous aussi, nous avons des salariés qui dépendent des paiements de l’État », a-t-il ajouté. Et ce n’est pas un cas unique puisque de nombreuses entreprises de petite et moyenne taille, ainsi que des grands groupes de sociétés privées employant plusieurs centaines, voire des milliers de travailleurs dépendent aussi, en partie, des paiements de l’État.
Conséquences dommageables
Outre ces impacts immédiats sur les prestataires, le gel des dépenses de fonctionnement, hors soldes et pensions a aussi d’autres conséquences dommageables à court et moyen termes. Sur le court terme, les économistes reconnaissent que la réduction de la circulation d’argent fragilise le circuit économique. Le gel pourrait également provoquer un ralentissement, et même un blocage momentané des services publics, lequel pourrait entraîner de la frustration du côté des citoyens. Des projets pourraient par ailleurs être suspendus, à défaut de paiement et leur éventuelle reprise ultérieure pourrait engendrer des surcoûts. Les impayés de l’État sont également considérés comme une source de réactions négatives des opérateurs économiques et des investisseurs qui seraient tout simplement amenés à suspendre leurs investissements.
Perte de crédibilité. Sur le moyen terme, d’autres répercussions négatives sont possibles. Pour ne citer, entre autres, que l’arrêt ou la suspension des projets d’infrastructures comme les nouvelles routes ou les entretiens routiers. Ce qui pourrait retarder le développement quand on sait que les investissements publics constituent un moteur de croissance. Enfin, et non des moindres, l’État pourrait tout simplement se retrouver dans l’incapacité d’honorer ses dettes intérieures et extérieures. Une perte de crédibilité internationale en perspective. Attention danger.
R.Edmond.