Erick Manana et Dama, deux grandes figures mais également d’excellents ambassadeurs de la musique malgache à l’international, nous parlent à cœur ouvert de leur duo basé sur cette complicité exceptionnelle qui lie l’un à l’autre et l’esprit de leur tournée, basée sur le concept du « valim-babena ».
Qu’est-ce qui est à l’origine de votre duo? Pourquoi justement Dama et Erick Manana mais pas Dama ou Erick Manana et un tel? Qu’est-ce qui a provoqué le déclic?
Erick Manana: Mon histoire musicale est intimement liée à celle des Mahaleo, de Raoul en particulier dont j’étais le plus proche. Cela remonte à plus de quarante ans passé. En 1975, le groupe, qui donnait un concert au Centre Albert Camus, m’a invité. Une grande première pour l’inconnu que j’étais encore à l’époque. Quelque part, il était donc logique, même si ce n’est que quarante ans plus tard, que moi et Dama on se retrouve ensemble dans ce projet.
Dama: En fait, j’ai déjà collaboré en duo avec plusieurs autres artistes, pour ne citer qu’Olombelo Ricky ou encore Hajazz, pour des projets à l’international. Récemment, nous avons, l’un comme l’autre, été acteurs du projet Madagascar All Stars mais pour pouvoir poursuivre, il fallait accorder l’emploi du temps de tous les membres. Ce qui n’est pas du tout évident. Erick et moi avons pourtant cette envie de tourner, nous avons donc décidé de continuer l’aventure en duo. Ce qui ne signifie aucunement, comme le tendent à croire certains, que je ne fais plus partie du groupe Mahaleo. L’un n’empêche pas l’autre.
On vous sent très complices…
Erick Manana: En effet. Nous sommes plus que des collaborateurs. Nous sommes amis avant tout, des frères de cœur. On peut tout se dire sans aucune retenue. Ce qui n’est pas du tout évident pour d’autres. Une chose reste pourtant sûre, c’est toujours dans l’intérêt de l’autre, pour le faire évoluer.
Dama: Jouer ensemble sur scène est important mais se retrouver l’est encore plus. On ne fonctionne pas comme la plupart des groupes. On ne passe pas notre temps à répéter, ou si mais d’une manière différente. On discute beaucoup, on regarde des vidéos… C’est la raison pour laquelle un concert n’est jamais pareil à un autre. En effet, on ne se dit pas que sur cette partie, on va répéter deux fois ou jouer tel ou tel morceau de telle ou telle manière, on fait les choses au feeling et en toute confiance l’un à l’autre.
Vous parlez souvent de « valim-babena », comment se traduit ce concept?
Erick Manana: C’est très simple. Madagascar est ma racine. C’est ici que je suis né. C’est cette culture qui m’a forgé et m’a mené où je suis actuellement. C’est comme un fils à ses parents. Quand ces derniers se font vieux, l’enfant prend soin d’eux, en guise de reconnaissance.
Dama: Personne ne voit plus très loin que le bout de son nez. Nous ne pensons qu’à consommer, sans penser à demain, que restera t-il pour la génération future ? Quel héritage, culturel en particulier, léguerons-nous à nos enfants ? Si les choses évoluent de la sorte et si nous ne prenons pas soin de la culture, à l’avenir, nos enfants ne parleront plus malgache. Plus tard, on les mettra dans un parc et on leur fera faire le famadihana et dire: ce sont eux les Malgaches… C’est la raison pour laquelle on se doit de mettre nos empreintes afin que notre culture ne se perde pas. Nous qui sommes des « zokiolona », avons donc le devoir de sensibiliser, de conscientiser tout un chacun. Nous avons, à travers ce concept de « valim-babena » et cette tournée, donné une autre image de Madagascar à l’étranger. C’est notre manière de contribuer au développement du pays. L’objectif de nos collaborations est effectivement de mettre en place une Maison de la culture. En attendant, nous retrouverons toujours les amoureux de musique malgache dans la seconde partie de notre tournée qui débutera au Palais des Sports au mois de juillet.
Mahetsaka