
Depuis que les pluies de dollars ont été annoncées pour renflouer les caisses de l’Etat dans le cadre de la crise sanitaire, beaucoup de voix s’élèvent pour réclamer de la transparence de la part de l’Etat concernant leur gestion.
Madagascar a reçu de nombreux soutiens financiers depuis le début de la crise sanitaire. Les partenaires financiers et techniques du pays ont mis la main dans la poche pour porter main forte au gouvernement afin que ce dernier puisse renforcer les moyens pour faire face aux impacts de la propagation du covid-19. Ces soutiens sont destinés à mieux se préparer pour une riposte efficace face aux conséquences économiques et sociales de la crise du coronavirus. Dans ce cadre, la présentation au parlement de la loi de finances rectificatives est très attendue dans les chaumières pour apprécier la stratégie adoptée par le gouvernement face à une économie anéantie par le coronavirus. Pourtant, le document budgétaire tarde à atterrir dans les deux Chambres et ce retard commence à agacer les parlementaires qui sont impatients de scruter ce projet de loi. « Nous sommes impatients de voir comment va réagir l’Etat face aux pertes de milliers d’emplois », a lâché un élu de la Chambre basse, soutien du régime. « Comment vont être réparties les ressources disponibles », s’interroge-t-il. Du côté du gouvernement, on préfère jouer avec le temps pour ne pas se hasarder dans la présentation d’un document qui peut ouvrir une brèche aux parlementaires déjà hantés par les rumeurs de motion de censure. Du coup, l’exécutif avance avec prudence et cogite encore sur la loi de finances rectificatives même si le premier ministre a déjà annoncé au Sénat, l’acheminement du projet de loi la semaine dernière.
Conditionnalités. Mais d’autres camps attendent aussi du gouvernement la publication des affectations des ressources liées à la crise. La société civile, elle, multiplie les interpellations pour réclamer de la transparence sur l’utilisation des fonds dédiés à l’atténuation des impacts de la crise. Une transparence qui va au-delà des projections sur les affectations de ressources, mais qui s’intéresse jusqu’à la cohérence au niveau du paiement, le bout de la chaîne. Une lettre ouverte de quelques organisations de la société civile, publiée jeudi dernier, rappelle la « nécessité » de l’opérationnalisation d’un « portail des données ouvertes sur la base paiement et encaissements, relatives à l’exécution budgétaires des organismes budgétaires ». La création de ce portail numérique qui devrait permettre à tous citoyens d’avoir accès aux informations liées à la programmation de l’affectation des ressources jusqu’à l’attribution des marchés, en passant par le montant alloué à l’engagement, a déjà fait l’objet d’un encadrement légal suivant les dispositions du décret 2019-236 du 26 novembre 2019. Pourtant, le retard de l’opérationnalisation de cet outil intrigue les organisations de la société civile qui estiment que « l’état d’urgence ne doit pas être considéré comme une opportunité pour contourner la redevabilité, ou pour faire l’impasse sur la transparence » selon une note publiée en mars dernier, de la Transparency International-Initiative Madagascar. La mise en place de ce portail numérique, notons-le, fait partie des conditionnalités des partenaires techniques et financiers dans le cadre des négociations des fonds alloués à la crise.
Vigilance. De leurs côtés, les opposants du régime, majoritaires au Sénat et incisifs à la Chambre basse, attendent de pieds fermes le projet de loi de finances rectificatives présenté par l’exécutif. En même temps, les partis de l’opposition ne cessent de réclamer la transparence sur la gestion des aides reçues dans le cadre de la crise sanitaire. Ces derniers, quant à eux, braquent essentiellement leur vigilance du côté d’Ivato. Lors de son passage au Sénat jeudi dernier, le ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, Tianarivelo Razafimahefa, et non moins président du centre de commandement opérationnel Covid-19, a été inondé de questions par les sénateurs qui veulent savoir sur certains aspects de ce centre très exposé aux critiques depuis sa mise en place le 23 mars dernier.
Rija R.