
L’éducation de l’Homme par l’Homme et pour l’Homme est la première raison qui a incité les activités entreprises à l’Akamasoa, selon les dires du Père Pedro. Une éducation qui veut faire en sorte de donner la chance aux plus démunis pour qu’ils puissent s’épanouir et devenir des citoyens modèles. Mais aussi une éducation qui met la tolérance en son centre pour une meilleure appréhension des valeurs de la part de la population concernée.
29 ans de lutte pour l’éducation. L’Akamasoa est présente depuis 29 ans à Andralanitra. Assez de temps pour développer des personnes pouvant apporter le changement dans leur environnement et leurs entourages. Mais également un temps pour voir comment les Malgaches vivent et conçoivent la vie, leur vie. Une vie chère à leurs yeux et dont l’importance a été mise à l’écrit et en parole avec le dicton «lahitokana ny aina (traduit librement comme la vie est unique». La vie du malgache passe également par son être, son âme qui tient une place aussi importante. «Une sagesse qui m’a marqué à mon arrivée il y a 48 ans», note Père Pedro. Ce dernier d’enchérir que «c’est en respect à cette sagesse que je me suis fixé l’objectif d’éduquer les plus démunis». A cet effet, l’approche du numéro Un d’Andralanitra s’est focalisée sur l’Humain, le Malagasy. Ce qui devrait se faire par un retour aux valeurs malgaches telles que le respect: de la vie, des aînés, des petits, de l’environnement et des biens communs. Une chose perdue à l’heure actuelle si l’on observe le quotidien des Malgaches.«Bon nombre de nos frères et sœurs se sont déviés du droit chemin. Il y en a qui ont arrêté leurs études et qui se retrouvent à ne rien faire. Il y en a d’autres qui se sont détournés de la sagesse de leurs ancêtres», affirme avec regret le Père Pedro. Des mesures ont été mises en place pour faire en sorte d’arranger les choses.

La parole, un outil performant. «Je n’ai pas de formule magique». Une phrase que le Père Pedro aime citer lorsqu’il parle d’éducation. Mais quand on y pense et qu’on voit à quel point il a changé la vie de nombreuses personnes, l’on se dit qu’il détient une «arme» efficace et efficiente. Et cet outil/arme n’est tout autre qu’une combinaison complexe de sa parole, son éloquence, et de sa prestance. Ce qu’il confirme lorsqu’il note que «les gens ont besoin qu’on les réconforte, qu’on les conscientise, les forme et les remette sur le droit chemin». Et pour ce faire, le Père use des rencontres périodiques et non périodiques avec la population d’Andralanitra. Il utilise également – à bon escient – les messes du dimanche. «Chaque dimanche, environ 8000 personnes viennent prier à l’Akamasoa. C’est donc le meilleur moment pour leur véhiculer les bons messages», note-t-il. Avant de préciser que «tout se fait à travers les bonnes paroles adaptées aux réalités de la population cible». Il convient de noter que depuis ces 29 ans d’existence d’Akamasoa, le Père Pedro a pu réunir 2602 fois la population d’Akamasoa. Tant d’occasion pour initier chez la population, les bonnes conduites à tenir pour avancer, bien avancer dans la vie. Où, respect mutuel, respect des biens communs et amour du travail sont maîtres-mots.

Synergies. L’éducation est primordiale si l’on veut développer le pays. Une évidence qui nécessite la prise de responsabilité de tous les acteurs. Les initiatives du Père Pedro ainsi que leurs fruits démontrent cette évidence, que différents acteurs doivent prendre en considération et capitaliser. Comme l’a dit le Père «initier de l’éducation civique basée sur la règle d’or du ne fais à personne ce que tu ne veux pas qu’on te fasse relève de l’urgence». Et tous les acteurs: église, associations, responsables étatiques… ont leurs lots de responsabilité dans la réalisation de cette initiative. Il est toutefois à noter que les actions tendant à l’atteinte de cet objectif devraient se conjuguer.

La prison en dernier recours. 60 jeunes d’Akamasoa sont actuellement en prison. Un chiffre qui paraît minime par rapport aux 14000 autres qui continuent leurs études au centre, mais qui n’en déplaise pas, constitue un grand problème pour le Père où le dialogue et la parole doivent primer face à la prison. «Nos prisons sont connues pour être surpeuplées. Ce qui fait penser qu’une fois envoyés là-bas, les gens se retrouveront directement en sous-alimentation et dans un milieu qui ne va pas les améliorer». Pour éviter une «telle perte», le Père Pedro et les 500 jeunes malgaches qui l’accompagnent – des médecins, des techniciens, des enseignants et éducateurs – ont opté pour un dispositif incitant le coupable à faire des travaux d’introspection et à accepter sa culpabilité devant la population.«Si un jeune ou une personne d’Akamasoa a été arrêté pour vol de poulet, on l’envoie dans une salle d’isolation où il (elle) va penser à son acte. Une fois qu’il aura reconnu sa culpabilité, il devra s’excuser devant la population. C’est celle-ci qui va juger s’il a droit à une seconde chance et réintégrer la société» explique le Père Pedro. Ce dernier d’ajouter que le même principe devrait être pris en compte par les autorités telles que la Police, le tribunal ou encore la gendarmerie. «Si une personne a volé une poule, je pense que l’envoyer en prison ne va faire que la rendre pire. Pourquoi ne pas instaurer un système de correction locale fixée par la population et appliquer pour des délits mineurs» interpelle le Padre. Les initiatives du Père Pedro sont plus que palpables. Leurs résultats le sont tout autant. Pourquoi ne pas en profiter pour en faire un modèle de société?
Dossier réalisé par José Belalahy