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samedi, septembre 20, 2025
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Andaboy : La plage qui fait battre le cœur de Toliara, menacée et sublimée par les dunes de sable

À l’entrée de Toliara, Andaboy appelée aussi « La Batterie » ou encore « Vava-Lapasy » est bien plus qu’une plage. Lieu sacré des « Tromba » ou « doany », espaces de baptêmes des chrétiens, sites de grands rassemblements populaires, théâtre des festivités culturelles et des compétitions sportives et pôle touristique surnommé « Dubaï de Toliara », elle incarne l’âme vivante de la cité du Soleil. Mais derrière ce décor carte postale, les dunes de sable ou « fasy » qui bordent la plage progressent inexorablement, engloutissant sur leur passage des infrastructures. Paradoxe fascinant : ce phénomène naturel, à la fois inquiétant et esthétique, façonne le charme unique d’Andaboy.

Une porte d’entrée historique et symbolique.

Andaboy se situe à la limite entre la mer et la terre, juste avant d’atteindre le grand port de Toliara. Deux phares géants (toujours visibles), vestiges de l’époque coloniale, marquent encore l’entrée de ce couloir maritime autrefois stratégique. Ce positionnement lui a valu le surnom « Vava-Lapasy », véritable porte d’entrée de la ville par la mer. « Quand on arrive par la mer, ce sont les phares d’Andaboy qu’on aperçoit en premier. Pour nous, marins, c’est comme une main tendue vers la ville », raconte Jean-Claude Sarifo, capitaine de boutre ou « boutry ».

Le nom « La Batterie » rappelle son passé historique. Selon Lakoazy Zipa, un vieux marin, jadis les installations militaires y étaient implantées pour surveiller la côte et la baie de Toliara. Il souligne que ce vestige colonial a marqué des générations, et que même si les canons ont disparu, le site reste profondément ancré dans l’imaginaire collectif des Tuléarois.

Lieu spirituel entre « Tromba » et christianisme

La singularité d’Andaboy réside aussi dans son statut de lieu sacré. Depuis des générations, la plage est considérée comme un espace réservé aux « Tromba », ces esprits des ancêtres qui s’expriment à travers des cérémonies de possession. Selon Solange une officiante du « Tromba », les rituels qui s’y déroulent rappellent que la mer fait partie intégrante de la culture Vezo. Elle est à la fois une source de vie et un espace habité par les forces surnaturelles et invisibles. Des  fady (tabous) y sont observés comme l’interdiction de consommer de la viande de porc avant de se baigner sur ce site. « Les noyades fréquentes qui s’y produisent sont souvent interprétées comme des sanctions spirituelles contre ceux qui enfreignent ces interdits », argumente-t-elle. Parallèlement, le site est aussi un lieu de célébration pour certaines églises chrétiennes qui organisent des baptêmes en mer, symbole de purification et de renaissance spirituelle. Ce site a même accueilli la Journée mondiale de jeunesse ou JMJ MADA VII qui a réuni plus de 20 000 jeunes catholiques venus de tout Madagascar, lors de la grande messe sur ce lieu. « Incroyable, longtemps considéré comme un haut lieu des « Tromba », le JMJ a transformé Andaboy en une vaste cathédrale à ciel ouvert. Des milliers de fidèles chantaient et priaient face au Canal de Mozambique, mêlant ferveur et émotion », se souvient Marie Nicole, une chrétienne de l’église Vincent de Paul de Tsianaloka.

Le « Dubaï de Toliara » : entre rêve et réalité ?

Au-delà de son histoire, de sa dimension sacrée et de son rôle social, chaque week-end et surtout durant les lundis de Pâques et de Pentecôte, la plage se transforme en un vaste espace de convivialité. Les familles y pique-niquent, les enfants et les jeunes s’y baignent. Mais ces derniers temps Andaboy est aussi devenu un espace d’animation culturelle et sportive incontournable. Chaque année, le festival Vacances à Toliara y déploie concerts, spectacles et animations qui rassemblent de nombreux Tuléarois et des habitants de ses environs. La plage accueille également des compétitions de surf, de parapente et de moto-cross, confirmant sa réputation de terrain d’expression pour les sports extrêmes. À la tombée de la nuit, Andaboy change encore de visage : bars et restaurants de fortune et spots de loisirs illuminent la plage et la mer. La musique résonne, les cocktails coulent à flots et l’atmosphère prend des allures des stations balnéaires internationales, attirant habitants et visiteurs et surtout les jeunes avides de distractions modernes. Cette double dimension – culturelle et sportive – lui a valu le surnom « Dubaï de Toliara » en référence au dynamisme et au faste qui s’en dégagent. « Ici on se sent vivant, connecté à autre chose. C’est notre petit Dubaï », lance Jimmy, un jeune entrepreneur qui rêve de voir le site devenir un véritable site balnéaire. En clair, la plage d’Andaboy symbolise l’espoir d’un développement touristique rapide. « La comparaison avec Dubaï peut sembler ambitieuse, mais elle traduit l’enthousiasme des jeunes générations qui voient en ce lieu un futur pôle d’attractivité pour toute la région », a avoué Lalaina Razafitombo initiatrice et co-organisateurs du festival Vacances à Toliara.

Les dunes de sables : menace ou charme unique ?

Mais derrière cette effervescence se cache une réalité plus complexe : l’avancée inexorable des dunes de sable. Au fil des années, elles ont presque englouti des infrastructures inhabitées et laissées  à l’abandon sur cette plage à l’exemple du débarcadère des produits de mer financé par le projet Projet d’appui aux communautés de pêcheurs (PACP). Cette dynamique naturelle inquiète, car elle pourrait mettre en péril d’autres infrastructures. Pour les spécialistes il s’agit d’un phénomène d’ensablement naturel accentué par le vent et les marées. Un défi environnemental, qui, s’il n’est pas maîtrisé, pourrait redessiner complètement le visage de la plage.

Cependant, paradoxalement, ce même phénomène contribue au charme unique d’Andaboy. D’après un guide touristique national qui travaille pour le compte d’une agence de tourisme bien connue au delà des frontières malgaches,  les dunes mouvantes et imposantes, donnent au site son caractère singulier presque mystique et pittoresque attirent les touristes nationaux et internationaux. Elles façonnent un paysage à la fois majestueux et menaçant, qui attire l’œil des visiteurs. C’est ce paradoxe qui nourrit son surnom de « Dubaï de Toliara, une plage en pleine mutation et vivante, mais dont le décor naturel reste indomptable. Comme si Andaboy état à la fois un joyau et une force brute de la nature », conclut-il.

Francis Ramanantsoa

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