
En ce jour anniversaire de l’investiture du président Hery Rajaonarimampianina, le professeur de sociologie politique a ses « maux » à dire. Interview.
Midi : C’est aujourd’hui le quatrième anniversaire de l’investiture du premier président de la Quatrième République
André Rasolo : « Effectivement, la cérémonie d’investiture du cinquième Président de la République, Hery Rajaonarimampianina avait eu lieu le 25 janvier 2014. A cette occasion, il s’est présenté comme le président de tous les Malgaches en ces termes: » Aujourd’hui, je vous demande à vous ma famille politique de m’aider pour favoriser le grand destin d’unité nationale qui est le mien. Je vous demande à vous mes amis de me laisser libre. Libre d’aller vers les autres. Libre d’aller vers celui qui n’a jamais été mon ami, qui n’a jamais appartenu à notre famille politique, et parfois même qui nous a combattus. » A ses amis, le nouveau Président a lancé un appel de soutien de l’aider à écouter les 49% des électeurs qui se sont abstenus et les 47,5% qui n’ont pas voté pour lui ».
Midi : Et quatre ans après ?
A.R. : « Quatre ans après ce discours prometteur, on attendait la fin de la crise de 2009, le renforcement de la cohésion sociale, l’apaisement politique, la guérison des malaises au sein des forces armées, le retour au jeu démocratique entre le pouvoir et l’opposition. On espérait que les conditions de vie allaient changer avec la relance de l’économie et de l’emploi entraînant le redressement de la vie des Malgaches particulièrement des couches les plus vulnérables. Mais force est de reconnaître que le discours d’investiture du 25 janvier 2014 à Mahamasina n’a pas été traduit en action. La page des conflits de 2009 est loin d’être tournée. Au contraire, de nouvelles blessures apparaissent alors que les anciennes plaies ne sont pas guéries. Le conflit de 2009, jadis entre Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana est à présent à plusieurs autres acteurs. Quant au soutien des amis du Président de l’aider à écouter les 72% des Malgaches qui se sont abstenus et n’ont pas voté pour lui, il ne s’est pas réalisé. En réalité, les positions des uns et des autres ainsi que celle de la majorité silencieuse se durcissent de plus en plus. Ceci explique sans doute la préparation à la fois floue et laborieuse de l’élection de 2018 qui révèle des signes de blocage important d’origine politique ».
Midi : Mais la reconnaissance internationale a été bel et bien acquise
A.R. : « Malgré la reconnaissance internationale obtenue après l’élection de sortie de crise, la vie quotidienne des Malgaches n’a pas changé. Au contraire, la précarité, la pauvreté, l’insécurité, le chômage, la corruption, la faillite de l’Etat de droit, le relâchement général des services publics, tous les indicateurs sont au rouge. La flambée des prix des denrées alimentaires n’a jamais atteint leur niveau actuel. On ne peut pas d’un côté mobiliser des ressources extérieures pour la relance de l’économie et de l’autre côté, gaspiller des ressources intérieures à cause de la mauvaise gouvernance et de l’arrivée des investisseurs mafieux. Nous en sommes là. Tant que la loi du plus fort et d’exclusion continue d’ériger des murs de séparation, l’unité nationale reste fragile. Les calculs politiques sont néfastes quand ils ne correspondent ni à l’intérêt de la majorité des Malgaches, ni aux valeurs de la République. Madagascar est aujourd’hui menacé de retomber dans de nouvelles crises. Soyons vigilants. Le temps est venu de commencer à construire ensemble la refondation de la Nation et de la République ».
Propos recueillis par R. O