La CES a annulé le décret permettant au président de la Transition d’assister à la campagne électorale. Mais que dirait la Cour de rattachement, en l’occurrence, la HCC, si son avis est sollicité ou si une exception d’inconstitutionnalité venait à être soulevée par rapport à l’article 49 de la Constitution ?
Même si la HCC avait émis l’avis que le titre de chef suprême des forces armées est une prérogative réservée au Président de la République élu au suffrage universel direct, Andry Rajoelina s’est ou est considéré comme tel. En témoigne la promotion de 12 généraux de division et de 28 généraux de brigade lors du récent conseil des ministres qu’il a présidé. Et ce, conformément si l’on peut dire, à l’article 55 de la Constitution qui dispose que « le Président de la République préside le conseil des ministres ». Durant son quinquennat de fait, il avait également fait application de l’article 57 qui stipule que « le Président de la République accrédite et rappelle les Ambassadeurs et les envoyés extraordinaires de la République (…) ». Pour ne citer que la dernière nomination au poste d’Ambassadeur en Suisse et de Représentant permanent auprès de l’Office des Nations Unies à Genève d’Annick Rajaona à la place de Camille Vital qui a été rappelé au pays.
Obligation. Andry Rajoelina s’est aussi prévalu de l’article 58 qui prévoit que « le Président de la République exerce le droit de grâce ». Des prisonniers – y compris politiques – ont alors bénéficié de cette mesure de clémence. Le même article ajoute qu’« il confère les décorations et les honneurs de la République ». Il, c’est encore et toujours le Président de la République dont les pouvoirs, même régaliens, ont été exercés de fait par le Président de la Transition. Il avait même arboré le collier de Grand Maître de l’Ordre national qui est pourtant réservé au Président de la République élu, selon le décret portant réglementation de l’Ordre National et des autres distinctions honorifiques. En somme, il est « le Président ». Un poste qui confère des droits et privilèges, mais aussi des obligations. Telle celle imposée par l’article 49 de la Constitution qui édicte expressément que « les fonctions de Président de la République sont incompatibles avec toute fonction publique élective, toute autre activité professionnelle, toute activité au sein d’un parti politique (…) ».
Parti politique. Selon la définition classique, « un parti politique est un groupe de personnes qui partagent les mêmes intérêts, les mêmes opinions, les mêmes idées, et qui s’associent dans une organisation politique ayant pour objectif de se faire élire, d’exercer le pouvoir et de mettre en œuvre un projet politique ». Le MAPAR qui a présenté des candidats aux législatives et obtenu officieusement des sièges, est donc un parti, une organisation politique. D’ailleurs, historiquement les partis politiques étaient constitués au départ par des regroupements de parlementaires.
Violation de la Constitution. Le MAPAR signifiant « Miaraka Amin’ny Prezida Andry Rajoelina », ce dernier qui avait réuni ses candidats au siège d’Injet ou de Viva (c’est du pareil au même) le 18 décembre 2013, c’est-à-dire le dernier jour de campagne, entre en violation de l’article 49 de la Constitution de la Quatrième République. Laquelle n’a fait que reprendre la loi fondamentale de la Troisième République qui disposait également en son article 49 que « les fonctions de Président de la République sont incompatibles avec toute fonction publique élective, toute autre activité professionnelle et toute activité au sein d’un parti politique ou d’une organisation politique ». Et c’est cette Constitution là qu’Andry Rajoelina avait juré urbi et orbi de respecter et de veiller comme à la prunelle de ses yeux lors de son investiture au stade de Mahamasina le 21 mars 2009. Aujourd’hui, il mise sur le MAPAR ou le MAPAR mise sur lui (le résultat est le même) pour devenir Premier ministre au nom de Dame Constitution qui vient pourtant d’être violée.
R. O