Lundi 30 septembre 2019, une centaine d’étudiants et de jeunes se sont donné rendez-vous au grand amphithéâtre de la faculté EGS (économie, gestion et sociologie), de droit et des sciences politiques de l’Université d’Antananarivo en l’honneur de la journée mondiale de l’avortement sécurisé. Un sujet encore sensible à Madagascar et une pratique lourdement sanctionnée par la loi.
Outre les nombreux jeunes qui ont assisté à cette célébration de la journée mondiale de l’avortement sécurisé, le Président de l’Université d’Antananarivo, Mamy Ravelomanana, le représentant de la commission nationale des droits de l’homme, Mireille Rabenoro et Anjarasoa Dimbiniaina de l’Institut pasteur de Madagascar étaient également dans la grande salle en tant que principaux intervenants de cette journée de conférence. « L’Université est un endroit de liberté d’expression et de droit humain » a déclaré le Président de l’Université devant une assistance captivée avant de préciser que « c’est bien la première fois que cet amphithéâtre est l’hôte d’un tel débat sur l’avortement et le droit humain ». En effet, il est vrai que l’Université fait partie des rares endroits où il est possible de discuter librement de ce type de sujet dans le pays.
Est-ce pertinent ? La loi malgache concernant l’avortement est très claire, cette pratique est lourdement condamnée et ce, quelle que soit sa forme. Or, cette lourde sanction ferait proliférer les pratiques illicites selon les mots de l’animatrice de la conférence. Ce qui amène à la question posée par Mireille Rabenoro : « réfléchir sur l’avortement sécurisé, est-ce pertinent aujourd’hui à Madagascar ? ». Si on regarde la loi en vigueur, la réponse à cette question est un non catégorique. Et pourtant la réalité est tout autre, 75.000 avortements sont pratiqués chaque année et 20,4% des femmes de 15 à 49 ans ont déjà eu recours à l’avortement. Le focus development association dit qu’ « il est inutile d’interdire l’avortement, c’est un phénomène social ».Et le pire, c’est que les interventions clandestines tuent, environ 575 femmes par an meurent suite à une complication lors d’un avortement. Selon le représentant de la commission nationale des droits de l’homme, il est donc plus que pertinent de réfléchir à l’avortement sécurisé pour protéger ces femmes.
Les raisons. A Madagascar, il existerait plusieurs raisons qui peuvent amener une femme à avorter et elles sont différentes en zone rurale et en ville. Des lacunes en matière d’éducation sexuelle, des rapports sexuels forcés, la stigmatisation sociale de la grossesse hors mariage, l’utilisation inappropriée des moyens contraceptifs, l’irresponsabilité du père de l’enfant et bien d’autres raisons encore peuvent conduire à l’avortement. Mais le principal danger reste l’intervention illicite puisque comme elle se fait dans un cadre illégal, les risques de complications pour la femme deviennent plus importants. Ainsi, la sécurisation de l’avortement, voire sa dépénalisation pourrait-elle changer la donne et faire basculer les chiffres cités précédemment ? C’est d’ailleurs le thème de cette journée de l’avortement sécurisé : « avortement sécurisé, un soin de santé ».
Anja RANDRIAMAHEFA