Madagascar devient l’un des pays les plus privilégiés par le Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD). Une délégation de cette institution, conduite par son président Akinwumi Adesina, sera en visite dans la Grande Ile, à partir de demain.
C’est avec les larmes aux yeux que le président du Groupe de la BAD, Akinwumi Adesina, l’a annoncé à Abidjan, lors du Sommet des leaders africains pour le financement de la nutrition en octobre dernier : « Près d’un tiers des enfants de moins de 5 ans sont frappés par la malnutrition en Afrique. A Madagascar, la moitié des enfants de groupe d’âge sont touchés par ce fléau. Anthony, un garçon de 13 ans que j’ai rencontré à Betafo, région Vakinankaratra, a été victime de la malnutrition. Les impacts sont graves sur son développement physique et intellectuel. Et pourtant, cet enfant m’a affirmé qu’il souhaite devenir médecin. J’en ai parlé à ma femme et nous avons décidé de l’adopter. On va l’envoyer dans les meilleures écoles, pour que son rêve se réalise », a déclaré le président de la BAD. En effet, « Nourrir l’Afrique » fait partie des cinq priorités d’Akinwumi Adesina, durant son mandat à la Présidence du groupe de la BAD. Pour Madagascar, cette institution a déjà octroyé cette année, 2 millions USD pour financer la lutte contre la malnutrition. D’autres financements sont attendus, suite à un engagement personnel pris par le numéro Un de la Banque, dans divers secteurs comme l’énergie, les infrastructures et le développement agricole, etc. « D’habitude, je ne passe qu’une seule journée pour une visite d’Etat en Afrique. C’est la première fois que je passe trois journées entières dans un pays pour une visite officielle et c’est à Madagascar. Plusieurs secteurs nécessitent des interventions et je m’engage personnellement à intensifier la coopération avec Madagascar, surtout en ce qui concerne l’appui aux femmes et aux enfants », a-t-il déclaré, lors de sa visite à Tanandava, district Morombe, région sud-ouest, le 31 août dernier. Outre cette visite exceptionnelle de trois jours, le président de la BAD est attendu demain pour sa deuxième visite à Madagascar.
Destin. A noter qu’Akinwumi Adesina, issu d’une famille modeste, est un milliardaire nigérian, qui a fait fortune dans l’agriculture, et qui a réglé bien des problèmes de développement en Afrique. De son côté, Anthony Manampisoa Théophile Bertrand, est également issu d’une famille démunie. D’après les témoignages de ses parents, il est difficile pour les enfants issus des familles pauvres de poursuivre les études au-delà du cycle secondaire. « Le matin nous mangeons un peu de riz. Pour le déjeuner, nous ne prenons que du manioc ou de la patate douce. Nous n’avons du vrai repas que le soir », nous confie la mère d’Anthony. « Tous les jours, je laboure la terre à la main, dès 5h du matin. Mon fils de 17 ans m’aide pour cela. A l’âge de 14 ans, les enfants doivent arrêter leurs études pour nous aider à faire diverses tâches. C’est comme cela que la plupart des gens font ici. Et personnellement, je n’ai jamais cru aux études, car il y a des bacheliers qui labourent la terre comme moi, chaque jour », a indiqué le père d’Anthony. Mais ce garçon chanceux a pu échapper à ce cercle vicieux. Malgré ses grandes difficultés à l’école, son oncle a repéré son potentiel et l’a recueilli pour la poursuite de ses études secondaires à Ankazomiriotra, à 45km de ses parents. C’est donc là-bas qu’Anthony vit depuis plus d’un an. Par pur hasard, il a passé ses vacances à Betafo, chez ses parents, lorsque le président de la BAD a effectué une visite sur terrain sur les lieux. « Lorsque j’ai vu l’hélicoptère, j’ai cru que c’était des gens venus distribuer des lunettes pour l’éclipse. Mais j’ai vu que c’était plutôt une visite de sites agricoles. Lorsque je me suis approché, le président de la BAD a demandé mon nom et a posé des questions sur moi. Je lui ai dit que je voulais devenir docteur », raconte Anthony. Certes, le président Akinwumi Adesina a vu chez ce jeune malgache, le cas typique des enfants africains qui ont de bonnes visions, mais qui sont handicapés par la pauvreté et ne peuvent faire rien d’autre que lutter pour la survie. A noter que les 1000 premiers jours de vie, soit de la conception jusqu’à l’âge de 2 ans, est une période cruciale en matière de nutrition. Les impacts sur le développement physique et mental d’une malnutrition, qui frappe un enfant durant cette période, sont irréversibles.
