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dimanche, décembre 15, 2024
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Bakolalao Ramanandraibe : « L’immunité parlementaire n’offre pas une impunité totale »

L’ancienne ministre de la Justice, Bakolalao Ramanandraibe.

Dans le cadre du 100e numéro de la Revue MCI, Bakolalao Ramanandraibe, présidente honoraire de la Cour de cassation et ancienne ministre de la Justice, a apporté son point de vue sur l’immunité parlementaire et privilège de juridiction : impunité des parlementaires ?

L’« immunité parlementaire » se définit comme une disposition du statut des parlementaires qui limite l’étendue des actes pour lesquels un parlementaire en activité peut être jugé durant son mandat. Les dispositions dont il s’agit ont pour objet de protéger, dans le cadre de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée nationale et du Sénat des mesures d’intimidation venant du pouvoir politique ou d’autres pouvoirs, et de garantir leur indépendance. Le privilège parlementaire s’agit des immunités dont les députés et les sénateurs bénéficient dans l’exercice de leurs fonctions législatives. Le « privilège de juridiction » ou encore « immunité de juridiction » est le droit donné à certaines personnes de comparaître devant une juridiction autre que celle à laquelle les règles du droit commun procédural attribuent compétence. La personne va ainsi comparaître devant une autre juridiction que celle normalement territorialement compétente, ou devant une juridiction spécialisée ou une juridiction d’exception.

Opinion courante

L’ancienne ministre de mentionner également que « contrairement à une opinion courante, l’immunité parlementaire n’offre pas une impunité totale et en tout cas ne devrait pas être source d’impunité en cas de violation de la loi. Il faut se poser la question du fondement et de la justification de l’immunité parlementaire. Il est important, en effet, de souligner un principe essentiel posé par la Constitution, celui de l’égalité des citoyens devant la loi et devant la justice qui se décline en trois impératifs : ils ont les mêmes juges, les mêmes règles procédurales, et les mêmes règles substantielles ou de fond applicables. Sous peine d’être contraire à ce principe d’égalité, il faut donc admettre que les députés et les sénateurs bénéficiaires de cette immunité parlementaire relèvent d’une situation différente. Or, il est clair que leur seule qualité de parlementaire ne saurait justifier une quelconque spécificité, et il importe ainsi de rechercher les critères pertinents et admissibles de la situation différente, dans les fonctions qu’ils assument ».

Litiges

Il faut rappeler que l’immunité parlementaire prévue à l’article 73 de la Constitution offre une double immunité de juridiction : l’irresponsabilité (ou immunité de fond/ou fonctionnelle) qui protège le parlementaire de toute poursuite pour des actions accomplies dans l’exercice de son mandat : opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Cette magistrate de mentionner également qu’ « une juridiction spécialisée a compétence pour les seules affaires qui lui sont attribuées par un texte de loi particulier, ex : les litiges commerciaux pour le tribunal de commerce, les litiges entre salariés et employeurs pour le tribunal du travail, les infractions commises par les mineurs pour les tribunaux pour enfants, les infractions de corruption et assimilées pour le Pôle anti-corruption etc. Ce sont généralement des affaires nécessitant une certaine spécialisation du juge, puisque touchant une matière spécialisée. Les juridictions de droit commun comme les juridictions civiles et les juridictions pénales ont compétence générale au sein des TPI, des Cours d’appel et de la Cour de cassation. Les juridictions d’exception désignent tous les tribunaux dont une loi prévoit à l’avance la répartition des compétences. Les tribunaux d’exception ne peuvent juger que des litiges qui leur sont attribués par la loi ».

Infractions

Et d’enchaîner que «la Haute Cour de Justice ne peut juger que des infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions par des hauts dignitaires de l’Etat, et la Constitution et/ou certaines lois particulières énumèrent les dignitaires relevant de la compétence de cette Haute Cour ». L’inviolabilité (ou immunité de procédure) qui vise les activités extra-parlementaires : le parlementaire peut être poursuivi, mais toute mesure « coercitive » à son encontre nécessite la mainlevée de son immunité par ses pairs : une autorisation de poursuite ou d’arrestation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Sénat est ainsi nécessaire. Le fondement de l’inviolabilité n’est pas la protection de la qualité, mais celle de la fonction : elle n’est pas la protection des hommes ou des femmes, mais bien celle de l’Institution. En clair, il s’agit d’interdire au judiciaire d’entraver le fonctionnement normal du pouvoir législatif, le judiciaire ne peut priver, avant condamnation le législatif de ses membres, mais par ailleurs, le législatif ne peut pas non plus entraver l’exercice par le judiciaire de l’action publique. Il importe dès lors de dégager les règles et conséquences découlant de ce fondement de l’inviolabilité.

Recueillis par Dominique R.

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