
Lors de la réception à la Nonciature hier en l’honneur du souverain pontife et à l’occasion de l’accueil du Cardinal Désiré Tsarahazana, celui-ci a reconnu qu’être cardinal dans le contexte socio-politique malgache actuel est une lourde tâche.
« Comment puis-je être à la hauteur ? Relever le défi et venir à bout de tout ce mal à combattre ? », s’est-t-il demandé dans son allocution après avoir déclaré : « Je sens qu’une grande attente se cache derrière cette euphorie populaire déclenchée par l’annonce de mon élévation à la pourpre et mon accueil ». Il a également parlé d’un mal à combattre, mais lequel ? Le Cardinal Désiré Tsarahazana de répondre que pour lui, ce mal représente la recherche de profits personnels qui empeste les pratiques politiques et socio-économiques à Madagascar ; et qui entrave immanquablement le décollage économique et le développement humain dans la Grande île. Il a d’ailleurs ajouté dans une interview en marge de la réception : « C’est honteux que Madagascar soit tristement célèbre sur le plan international, pour être le pays d’un peuple extrêmement pauvre vivant sur un territoire immensément riche. L’église et la religion, de par leur caractère rassembleur et leur autorité morale, peuvent et doivent jouer un rôle pour ramener le pays dans le droit chemin. Moi je n’hésiterai pas à exercer l’autorité dont j’ai été investi quand cela est nécessaire, autant du côté des dirigeants que de la population. » Il est vrai que dans un pays pseudo-laïc comme Madagascar, la religion joue un rôle important et stratégique dans la vie socio-politique de la Nation.
Aucun candidat. Le Cardinal Désiré Tsarahazana, tout en rappelant qu’il ne s’attendait pas le moins du monde à sa nomination, a par ailleurs réfuté catégoriquement les rumeurs selon lesquels l’Eglise soutiendrait un candidat en particulier lors des présidentielles de cette année. « Non, l’administration de l’église catholique ne soutient aucun candidat en particulier pour ces présidentielles, mais ses membres, en tant que citoyens ont le droit et le devoir de voter pour celui ou celle qui les convainc. Aussi, j’appelle à la lucidité de la population, de l’électorat. Ne vous laissez pas corrompre par des t-shirts ou des goodies, mais optez pour un candidat altruiste, adepte de pratiques politiques saines et dont le projet de développement vous convient. Si vous choisissez un candidat pour des goodies ou une assistance financière passagère, vous passerez les 5 prochaines années à le regretter. »
Allusion. Par ailleurs, le couple présidentiel et une majeure partie des membres du gouvernement et du corps diplomatique, ainsi que des personnalités politiques et chefs d’institution étaient présents hier. Pour ne citer que : l’ancien président Marc Ravalomanana et son épouse et non moins Maire d’Antananarivo Lalao Ravalomanana ; le Premier ministre Ntsay Christian, etc. Dans son allocution, Hery Rajaonarimampiana a soutenu qu’il considérait la création du Cardinal Tsarahazana comme une bénédiction pour le pays et que « la religion joue un rôle sacré dans le développement de Madagascar. Je rebondis sur les propos de Son Eminence disant qu’il faut combattre le mal, en disant qu’il faut vaincre le mal par le bien, pour avancer, libre à chacun de nous de l’interpréter, mais il faut y penser sérieusement » Pour les observateurs, il s’agit d’une allusion à peine voilée par rapport à son mandat, qui n’a pas brillé par ses performances en matière de développement socio-économique et d’apaisement politique, pour ne parler que de ces sempiternelles grèves et la pauvreté exponentielle de la majorité des Malgaches.
Nonciature et diplomatie. Le Nonce apostolique a commencé son discours sur une note d’humour en disant, pour casser l’ambiance un peu trop solennelle : « Nous ne sommes pas dans une chapelle ». La Nonciature étant une représentation diplomatique à part entière, il a enchaîné en disant : « Le choix du Cardinal Désiré Tsarahazana dans la récente création de Cardinal renforce considérablement les relations diplomatiques entre l’Île rouge et le Saint Siège qui ont débuté le 9 janvier 1967 ; qui s’apparentent à un tissu dont les « pores » se resserrent avec le temps. » Par ailleurs, le corps diplomatique était aussi bien représenté hier, pour ne citer que SEM Ichiro Ogasawara, Ambassadeur du Japon et son épouse ou encore SEM Philippe Brandt, Ambassadeur de la Suisse. Celui-ci a confié dans une brève interview : « Bien que la Suisse soit un pays laïc et ne soutient aucune religion en particulier, la Nonciature représente un partenaire pour notre pays sur le plan du développement et de la diplomatie. Nous tenions également à honorer Son Eminence le Cardinal Tsarahazana et Madagascar pour cet évènement historique. »
Luz Razafimbelo