« Fait-elle envie ou bien pitié / je n’ai pas le cœur à le dire » disait la chanson de Jean Ferrat, mais cette fois-ci il ne s’agit de la vie d’une femme trop tôt mariée. Nous voulons parler de l’alliance dite stratégique entre Air Madagascar et Air Austral. D’égale à égale, annonce-t-on, affirmation qui nous laisse dubitatif. Quand une dame moribonde, relativement âgée (la cinquantaine bien sonnée) et un jeune dans la force de l’âge (quarante-trois ans) se marient, on ne dira pas « Vive la mariée !» mais plutôt « vivement qu’elle trépasse, et de l’héritage on fera main basse ». En tout cas ce ne peut être que le fruit d’un mariage arrangé. Et il le semble, avec la célérité avec laquelle les choses se sont arrangées, si bien que des prétendants même mieux « dotés » sont rentrés chez eux bredouilles et que d’autres se sont abstenus sentant que c’est une affaire de famille. La mariée n’est pas inconnue chez les beaux parents, c’est un enfant de la maison qui s’est permis de vouloir prendre ses distances et prendre son indépendance, mais qui, suite aux vicissitudes des affaires, a vu ses ailes brûlées. Mais il serait bien étonnant, du moins selon la rumeur, que ceux qui l’ont mis au berceau ne soient pas étrangers à ses malheurs, par représailles et par avidité. Ainsi, pour que tout rentre dans l’ordre, on n’a pas trouvé mieux que de la marier avec un cousin docile parce que lui aussi il est clopin – clopant et ne demande qu’avoir campagne. La Grande Famille est plutôt prévoyante car dans la corbeille de la mariée garnie, pour sauver les apparences, mais en fait tout lui appartient déjà ou en passe de l’être, ainsi la dame ne peut qu’obéir à toutes les exigences. Le Handling, d’abord par exemple, c’est-à-dire les services aux tiers au sol, très rémunérateur, lui a été détaché et donc la propriété est devenue volatile. Puis, la gestion des plus importants aéroports a été cédée à une cousine du marié enlevant toutes velléités de résistance de la part de ses parents actuels. Ses Airbus sont encore juridiquement la propriété de la Grande Famille. Enfin, 49% du capital, ce n’est pas la majorité, mais les 51% restant ne lui donnent pas toutes latitudes dans les prises de décisions car l’envergure du tiers-bloquant sera sûrement notifiée clairement dans le statut, et c’est une certitude dans ce marché de dupes, sinon demandez à Air Mauritius, pourquoi elle n’a pas voulu concourir. Pour terminer, ne voyez pas dans ce qui précède une diatribe envers les acteurs en cause, mais seulement, la nostalgie d’un enfant d’Air Mad qui a vu le réseau le plus dense du monde, les DC4 et DC 3 , le Boeing 707, les Boeing 737 , les Twin Otter et le « Tolom-piavotana » sillonner le ciel et porter très haut le flambeau du pays et à faire des envieux dans la région et même au-delà. Faut-il pleurer…
M.Ranarivao