
Madagascar dispose d’un intéressant potentiel minier. Mais l’instabilité juridique qui règne actuellement sur ce secteur l’empêche de contribuer convenablement au développement du pays.
En seulement 5 ans, le changement du code minier est évoqué à Madagascar. Une « volatilité » qui fait en tout cas tiquer non seulement les opérateurs locaux, mais également et surtout les grands investisseurs miniers internationaux.
Même processus
En effet, le ministère des Mines et des Ressources Stratégiques a procédé la semaine dernière au démarrage des travaux du Comité de pilotage chargé d’élaborer un nouveau code minier d’ici le mois de juin. Une initiative qui n’est pas nouvelle puisque, en 2015, le régime Rajaonarimampianina avait déjà lancé le même processus, en arguant notamment que les compagnies minières réalisaient d’énormes bénéfices sans que cela ait des impacts significatifs pour l’Etat. Du coup, pour augmenter les revenus tirés du secteur minier, le précédent régime avait notamment décidé de revoir à la hausse, la fiscalité minière, plus particulièrement, les redevances minières dont le taux était multiplié pratiquement par trois. Une initiative qui avait, en tout cas, engendré le tollé général du côté des opérateurs et des grands investisseurs miniers.
Appétit subit
Sur le plan international, on parlait d’un « appétit subit » du gouvernement malgache. On peut notamment cité le magazine Business Insider qui titrait dans son édition du 10 septembre : « La gourmandise du gouvernement peut tuer l’industrie minière de ce pays ». C’était une manière pour ce magazine de souligner « l’intérêt croissant que Madagascar avait suscité dans les années précédentes mais que l’appétit subi du gouvernement serait un signal fort dissuasif pour tout investisseur sérieux, menacé par autant d’incertitudes que des risques liés à un environnement trop volatile alors qu’il s’agit d’une industrie demandant beaucoup de stabilité au regard des investissements lourds qu’elle exige ». En tout cas, cette velléité de modifier les législations minières pour augmenter les recettes publiques n’est pas propre à Madagascar. D’autres pays africains comme la République Démocratique du Congo, ou encore la Tanzanie ont fait la même chose sans grand succès. La Tanzanie, par exemple avait infligé une amende de 190 milliards de dollars à une compagnie minière. Une décision qui frisait l’aberration puisque l’amande représentait quarante fois le chiffre d’affaires de la compagnie et quatre fois le produit national brut.
Botswana
La nation africaine la plus raisonnable et pragmatique aura été sans doute le Botswana, considéré, d’ailleurs comme une référence en Afrique. Ce pays a préféré le statu quo en matière de législation en maintenant à 3% de redevances pour les métaux de base et 5% pour les métaux précieux. Et ce, malgré la conjoncture mondiale qui aurait certainement permis une révision à la hausse des redevances. La politique minière botswanaise était l’une des plus efficaces car elle a continué à consolider la bonne gouvernance, en offrant un climat d’affaires stable et à moindres risques. Devenant ainsi, l’une des destinations favorites des grandes compagnies minières mondiales. Ayant tenu probablement compte de ces réalités, le régime d’alors avait finalement abandonné le projet de hausse exorbitante des redevances minières en 2016. Il ne pouvait d’ailleurs pas, en être autrement puisque à cette époque, l’industrie minière était particulièrement en difficulté en raison du niveau excessivement élevé des investissements et l’insuffisance d’infrastructures adéquates.
Echec
En somme, la tentative de modification du code minier était un échec. La question qui se pose maintenant est de savoir si le régime actuel va répéter les mêmes erreurs avec ce nouveau projet de modification en l’espace de seulement 5 ans. On sait en tout cas que durant sa campagne électorale, le président Andry Rajoelina avait évoqué cette question de modifier la législation minière pour qu’il y ait beaucoup plus d’intérêts du pays. Une initiative qui risque pourtant de produire l’effet contraire si l’on ne fait pas attention. Car comme en politique, l’instabilité est aussi une mauvaise chose pour certaines filières économiques dont les mines qui brassent des milliards de dollars d’investissements qu’il faut bien évidemment sécuriser.
R.Edmond.