Un éventuel référendum constitutionnel conduirait à la suppression des provinces en tant que collectivités territoriales décentralisées (CTD).
La loi de Finances pour 2020 dont les dispositions viennent d’être mises en vigueur par voie d’ordonnance par le président de la République prévoit un budget de 27 milliards d’ariary alloué à l’organisation de deux élections. Des indiscrétions ont permis de savoir qu’il s’agit des Sénatoriales anticipées et d’un référendum constitutionnel. Ce référendum constitutionnel permettrait au régime en place de poursuivre sa réforme institutionnelle dictée par les impératifs de la mise en œuvre de l’IEM, du « Velirano » du président de la République et de la Politique Générale de l’Etat présentée à l’Assemblée nationale par le Premier ministre Ntsay Christian. Cette fois, cette réforme institutionnelle toucherait un niveau des Collectivités territoriales Décentralisées que sont les provinces. L’article 157 de la Constitution dispose : « Les provinces sont des collectivités territoriales décentralisées dotées de la personnalité morale, de l’autonomie administrative et financière. Elles assurent la coordination et l’harmonisation des actions de développement d’intérêt provincial et veillent au développement équitable et harmonieux des collectivités territoriales décentralisées dans la province. Les provinces mettent en œuvre la politique de développement d’intérêt provincial défini et arrêté en conseil provincial. En collaboration avec les organismes publics et privés, elles dirigent, dynamisent, coordonnent et harmonisent le développement économique et social de l’ensemble de la province et assurent, à ce titre, la planification, l’aménagement du territoire et la mise en œuvre de toutes les actions de développement. »
Transition. Mais contrairement aux communes, les provinces prévues par l’actuelle loi fondamentale n’ont jamais été effectives. Quant aux régions, un autre niveau des collectivités territoriales décentralisées, leur effectivité n’est pas totale étant donné que les structures fonctionnent alors que les chefs de région ne sont pas encore des personnalités élues conformément aux dispositions du 1er alinéa de l’article 154 de la Constitution selon lesquelles « la fonction exécutive est exercée par un organe dirigé par le chef de région élu au suffrage universel ». Depuis l’adoption du décret n°2019-1866 relatif au gouverneur, le pouvoir en place met en œuvre une transition menant vers l’effectivité des régions en tant que collectivités territoriales décentralisées. Cette transition se matérialise par la nomination des gouverneurs à la tête des régions de Madagascar. L’article premier de ce décret stipule : « En application des dispositions de l’article 325 de la loi n° 2014-020 du 27 septembre 2014 susvisée, la fonction exécutive de la Région est exercée par un chef de région portant le titre de « gouverneur ». » L’article 7 du même texte règlementaire prévoit : « Le Gouverneur est chargé de l’identification, de la programmation et de la mise en œuvre des activités de développement d’envergure régionale, conformément aux dispositions législatives et règlementaires en vigueur. ». Avec la probable suppression des provinces, aucune autre structure ne serait placée au-dessus des gouvernorats de région. Dans ce cas, les gouverneurs de région rendraient directement compte au gouvernement et au président de la République.
Décentralisation émergente. En tout cas, la mise en œuvre de l’IEM a conduit à l’adoption d’un nouveau concept dénommé décentralisation émergente. La tenue de la table ronde interministérielle sur le thème « Politiques sectorielles coordonnées pour une décentralisation émergente » témoigne de la volonté réelle du pouvoir en place à aller de l’avant pour une décentralisation effective à Madagascar. Les participants à cette table ronde étaient unanimes sur le fait que la politique de décentralisation est une de ces politiques publiques intersectorielles, constituée de programme d’actions délibérées et coordonnées en vue du développement participatif, équilibré et harmonieux du territoire national. « La décentralisation n’est pas une option, mais une obligation pour l’émergence de Madagascar. », a même déclaré le Premier ministre Ntsay Christian durant la table ronde qui s’est tenue au Carlton Anosy du 17 au 18 décembre dernier. La concertation de deux jours à laquelle ont activement participé les gouverneurs de région a permis de mener des réflexions sur les démarches à entreprendre pour une rationalisation de l’Administration publique au service des collectivités territoriales décentralisées et le financement de la décentralisation. A rappeler que le « Velirano » n°12 du président de la République, repris par la politique générale de l’Etat, préconise l’autonomie et la responsabilisation des collectivités territoriales décentralisées. Et le pouvoir en place entend rattraper le retard de Madagascar en matière de développement avec cette autonomie et cette responsabilisation des CTD.
R.Eugène