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mercredi, décembre 4, 2024
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Emploi, Travail et Lois Sociales : Les corps de l’inspection du travail persistent et signent

Samuëlson Ramanitriniony reste convaincu que si le programme national de soutien à l’emploi avait pu être mis en œuvre correctement, nous aurions affronté autrement le problème de l’AGOA.
Samuëlson Ramanitriniony reste convaincu que si le programme national de soutien à l’emploi avait pu être mis en œuvre correctement, nous aurions affronté autrement le problème de l’AGOA.

Pour la troisième fois en moins d’un mois, les corps de l’inspection du travail s’expriment. Ils souhaitent notamment la création d’un département ministériel à part entière, en charge du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, ainsi qu’à l’adoption du décret sur leur régime particulier. Après la tenue, le 6 février 2014, d’une journée de réflexion durant laquelle le Syndicat Autonome des Inspecteurs du Travail (SAIT) a mis en avant ces revendications, le même syndicat est revenu à la charge il y a une quinzaine de jours, pour les réitérer. Ces démarches sont entièrement soutenues par le Directeur Général de l’Emploi, du Travail et des Lois Sociales, Samuëlson Ramanitriniony. Il estime que la création d’un ministère indépendant, ou tout au moins, la répartition équitable des ressources en fonction des missions et des charges de travail de chaque direction du ministère, sont bien plus qu’une nécessité. Interview.

Midi Madagasikara : Le SAIT a déjà manifesté à deux, voire à trois reprises, son souhait de mettre en place un département ministériel à part entière et indépendant, en charge de l’Emploi et du Travail. Pourquoi tant d’insistance ?

Samuëlson Ramanitriniony : Une brève historique est peut-être nécessaire pour placer les choses dans leur contexte. N’oublions pas que l’administration du travail était, pendant la première République, un département à part entière. Il s’agissait de l’Inspection Générale du Travail. Mais par la suite, depuis la seconde République, elle a été placée sous la tutelle administrative et budgétaire du ministère de la Fonction Publique afin de garder tous les travailleurs sous une seule tutelle. C’était l’utilisation par excellence des travailleurs à des fins politiques. Depuis, les structures de l’administration du travail sont occultées par les structures de la fonction publique et le secteur privé, bien que moteur de développement, se trouve dans la difficulté pour jouer son rôle de catalyseur de l’économie nationale. Alors, oui, retrouver une structure de l’administration du travail indépendante de la fonction publique, est bien plus qu’une nécessité. Dans cette conjoncture où le pays entend relever justement le défi de la relance économique, il est primordial de mettre en place une telle structure.

M.M. : A quoi devrait alors ressembler cette structure de l’administration du travail ?

S.R. : Ce département devrait être éclaté en trois directions générales. D’abord, une direction générale en charge du Travail et des Lois Sociales, dont le rôle est plus qu’évident. Il faut savoir que depuis 2005, avec le PNUD et le BIT, a été initié le programme national de l’emploi, devenu la loi n°004/2005 du 10 mai 2005. En 2006, toujours avec le BIT et le PNUD, mais également avec les partenaires sociaux et la société civile, a été élaboré le Programme National de Soutien à l’Emploi (PSE). Il s’agit d’un programme détaillé pour la promotion de l’emploi à Madagascar. Malheureusement, tout cela était réduit à une dimension nettement moindre. Aucun des 5 ministres que j’ai vus passer dans ce ministère depuis que je suis à ce poste, n’ont manifesté un réel intérêt pour le PSE. Personnellement, je reste convaincu que si ce PSE avait pu être mis en œuvre, nous aurions affronté autrement le problème de l’AGOA. Nous aurions pu mieux gérer le volet de la reconversion professionnelle des travailleurs déflatés, par le biais de la formation professionnelle.

M.M. : Et les deux autres directions générales ?

S.R. : La seconde direction générale est celle de l’Emploi et des Informations sur le Travail. Elle sera en charge des missions ayant trait à l’emploi, aux statistiques de l’emploi et du travail, au contrôle de la migration ou encore à la formation professionnelle. Car tout cela nous a longtemps fait défaut et les conséquences n’en sont que plus lourdes aujourd’hui, pour ne citer que les dérives des migrations économiques des travailleurs malgaches vers l’étranger. La troisième direction générale est celle de l’Hygiène et de la Sécurité Sociale. Là encore, il s’agit d’un volet important. Car n’oublions pas que c’est le ministère qui est à l’origine de la création de la CNaPS et de la médecine d’entreprise. Jusqu’à maintenant, seul le secteur formel bénéficie des avantages de ces structures. Nous estimons que la couverture sociale devrait s’étendre vers le secteur informel et ce ne sont pas les initiatives qui manquent pour se lancer dans cette voie. La santé des travailleurs et de leurs familles par le biais de la médecine d’entreprise est, rappelons-le, une obligation confiée au ministère en charge du travail.  

M.M. : Quel serait alors, selon vous, le profil idéal du futur ministre ? 

S.R. : Ce sera un ministère très technique et je pense que celui-ci devra être dirigé avant tout par un technicien expérimenté, donc parmi les plus anciens, au moins au début pour démarrer le système. Il devrait donc s’agir d’une personne qui maîtrise parfaitement les arcanes de l’administration du travail.

M.M. : Tout cela suppose la mise à disposition d’un budget conséquent…

S.R. : Certainement. L’ensemble du département dont j’ai la charge de diriger, a toujours souffert d’un manque chronique de ressources et le moins doté au niveau des moyens. Pour donner une idée de la situation, nous n’avions bénéficié que de 4% du budget général du ministère de la Fonction Publique, du Travail et des Lois Sociales, alors que d’autres directions disposent de PIP de 4 milliards d’ariary ! Il n’y a pas de répartition équitable des ressources alors que beaucoup d’argent est utilisé inutilement ailleurs.

M.M. : Quelles perspectives votre département envisagerait-il au cas où le prochain gouvernement ne reflèterait pas ses attentes et que l’administration du travail ne dispose toujours pas d’un ministère à part entière ?

S.R. : C’est une éventualité. Dans tous les cas, nous nous tenons prêts à soumettre au prochain ministre une proposition. Car des commissions étaient déjà à pied d’œuvre pour la préparer. Un document bien ficelé, qui renferme même un plan de travail annuel, est déjà prêt. Il retrace les voies favorables à la réalisation des missions de ce département. Si le ministre accepte la proposition, tout ira bien. Dans le cas contraire, je n’exclue pas quelques remous car les corps de l’inspection du travail estiment qu’ils ont trop longtemps été défavorisés. Même dans la formation et l’intégration dans la fonction publique. A titre comparatif, à la sortie de l’ENAM, à durée de formation égale et à diplômes à équivalence égale, les inspecteurs du travail affichent un indice de 950 alors que les administrateurs civils sont à 1600.

M.M. : Le mot de la fin ?

S.R. : Au vu des expériences passées, il est évident que la structure actuelle de l’administration du travail à Madagascar n’est pas adaptée aux objectifs de développement du pays. J’estime qu’il est incontournable de reconsidérer la situation et de prendre les décisions qui contribueront à l’atteinte de ces objectifs. 

Propos recueillis par Hanitra R.

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