- Publicité SW45 -
dimanche, décembre 22, 2024
- Publicité -
AccueilSociétéEspace public : « En matière de communication politique, nous sommes...

Espace public : « En matière de communication politique, nous sommes dans un virage décisif »,

dixit Hervé Razafindranaivo

  « Notre système de communication fait face à d’importants soucis de fonctionnement et menace de renforcer davantage le risque d’une nouvelle crise politique ». Hervé Razafindranaivo qui vient de soutenir le mois dernier sa thèse de doctorat sur l’espace public politique malgache, tire la sonnette d’alarme pour tous les acteurs du monde politique, dont les citoyens. Les pratiques de communication actuelles contribuent à une détérioration précipitée de la situation politique, poursuit-il. Interview.

 Midi Madagasikara (MM) : En quoi consistent les recherches que vous menez sur la communication à Madagascar ?

Hervé Razafindranaivo (HR) : Mes recherches se concentrent sur l’espace public et la gestion des informations politiques impliquant les médias ainsi que toutes les sphères de discussions publiques et privées. Ma thèse de doctorat étudiait en particulier le cas de la crise de 2009 à Madagascar et son issue. Elle a révélé une incroyable incommunication entre les acteurs politiques.

MM : Quelles ont été les principales causes de cette défaillance ?

HR : Les principales causes sont constituées en particulier par des facteurs qui fragilisent le monde de la construction d’idées et de l’exercice de débat. Je les regrouperai sur trois points : un cadre politique et législatif en permanente crise, des organes de presse en proie à une difficulté de viabilité et enfin une transformation progressive de nos usages et pratiques de la communication.

 MM : Quel concept qualifierait cette défaillance ? Comment cela se manifeste réellement ?

HR : Nous assistons à la disjonction des relations entre les groupes d’acteurs politiques : le contenant et le contenu des informations diffusées par les médias sont de moins en moins constructifs dû à de permanentes pressions commerciale et politique. La relation entre les hommes politiques et les citoyens est dérisoire faute de représentation démocratique efficace. Les espaces permettant aux citoyens de s’exprimer sont étroits ou dérégulés tandis que les espaces de discussions des élites deviennent de plus en plus élitistes. Enfin les organismes de médiation comme les OSC se sont également déplacés dans des espaces de discussion moins accessibles qu’avant. Autant les nouvelles technologies s’installent progressivement, autant nos mises en commun des idées sont difficiles. Peu d’entre les acteurs s’écoutent.

 MM : Espaces dérégulés, dites-vous. Pouvez-vous en dire davantage ?

HR : Je citerais deux principaux espaces : les lieux symboliques de manifestation publique et les espaces digitaux. Pourtant, les manifestations publiques peuvent toujours dégénérer et dont les zones géographiques, à l’image de la Place du 13 mai, restent toujours sensibles. De leur côté, les espaces digitaux se sont rapidement démocratisés, notamment en zone urbaine. Nous pouvons le constater nous-mêmes : facebook est devenu pour un certain nombre de citoyens un média à part entière, où toute forme de débat et de diffusion d’information sont possibles. Or, il s’agit d’une plateforme non règlementée et dont la première fonction n’est pas comme telle.

MM : Quelles sont alors vos recommandations pour y remédier ?

HR : Notre pays a besoin d’une administration visionnaire et courageuse, capable de définir et mettre en œuvre une politique de communication basée sur sa faculté d’anticipation. Notre capacité de gestion de la communication doit répondre, premièrement, aux besoins vitaux des citoyens de participer à la vie publique en les mettant avant les outils ; deuxièmement aux besoins de développement de plateforme de construction d’idées et de diffusion d’informations fiables et, je dirais, émancipatoires ; troisièmement aux exigences évolutives des nouvelles technologies, notamment à travers une législation forte et à jour ; et enfin, au besoin de pérennisation du système médiatique, autant sur le plan économique qu’intellectuel.

 MM : Quels sont les enjeux de cette politique?

HR : Le monde de la communication se trouve dans un virage décisif : bien négocié, nous n’en sortirons que grandis et peut-être nous serons parmi les rares pays africains à avoir bien appréhendé la post-ère de l’information, des opportunités économiques et sociales s’en suivront. En revanche, si nous le ratons, nous risquons de développer un facteur majeur de crise politique qui pourrait nous être fatale. Nous le savons, le pouvoir n’appartient plus à celui qui détient l’information, ni à celui qui sait l’utiliser, désormais il appartient à celui qui sait la manipuler.

Propos recueillis par Hanitra R.

- Publicité -
- Publicité -
Suivez nous
401,973FansJ'aime
9,563SuiveursSuivre
1,463AbonnésS'abonner
Articles qui pourraient vous intéresser

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici