
Une fois l’Indépendance retrouvée, les femmes recouvrent pleinement leurs places dans la société en jouant un rôle important dans le développement de la jeune nation malgache. Faramalala Ratsaratoetra, docteure en Histoire sociale, chercheuse-associée à l’Institut Ralaimongo d’Histoire et d’Etudes politiques, revient sur cette période.
À l’aube de l’Indépendance, les autorités malgaches ont entrepris un vaste projet de réforme visant à inclure pleinement les femmes dans le processus de développement national. Prenant conscience de leur poids démographique et de leur potentiel économique, le gouvernement engage des mesures juridiques et sociales destinées à améliorer leur condition de vie. La législation devient ainsi un vecteur de transformation sociale où l’âge matrimonial est fixé à 18 ans tout en garantissant la liberté des femmes pour le choix de leur conjoint et une autonomie juridique au sein du couple. « Cette période marque une rupture avec les normes traditionnelles notamment l’influence des familles élargies sur les unions conjugales et en posant les bases d’une redéfinition des rôles familiaux », souligne Faramalala Ratsaratoetra, docteure en histoire sociale, chercheuse-associée à l’Institut Ralaimongo et d’Etudes politiques.
Protection juridique
Durant la décennie 1960, les femmes bénéficient d’un cadre juridique plus protecteur : elles acquièrent la liberté d’ouvrir un compte bancaire et d’adhérer à des associations syndicales. Le mari ne dispose pas du droit de nouer une nouvelle relation tant que le précédent mariage n’a pas été dissous, renforçant ainsi la protection juridique des femmes mariées. Cependant, ces avancées sont rapidement mises à l’épreuve par les crises socio-politiques et économiques qui touchent le pays à partir des années 1970. Les femmes sont confrontées à des réalités telles que le chômage, l’exode rural ou encore la monoparentalité, un phénomène en expansion. « Face à la détérioration de leur condition de vie, la plupart d’entre elles sont contraintes d’exercer une activité professionnelle hors du foyer. Cette réalité colore ainsi le tableau au quotidien des femmes des décennies 70, 80 et 90 », a-t-elle ajouté.
Renouveau politique
Dans le souci de redorer leur blason auprès des femmes, conscientes de l’importance du poids électoral féminin et dans un contexte de renouveau politique au sein du continent africain, les gouvernements successifs cherchent à renouveler leur engagement envers les femmes. Ils n’hésitent pas à créer une direction de la condition féminine et à commémorer chaque 8 mars, la Journée dédiée aux droits des femmes dès 1977. De plus, la participation croissante des femmes malgaches aux conférences internationales témoigne de leur volonté d’intégrer les dynamiques globales en matière de genre et des droits humains.
En dépit des multiples obstacles, les femmes malgaches, considérées comme minoritaires et sous-représentées, accèdent progressivement à des espaces d’émancipation grâce à l’éducation par l’école, à l’intégration dans le monde professionnel et à une meilleure maîtrise de leur vie reproductive. Ces transformations contribuent à l’affirmation de leur autonomie et à une reconfiguration de leur rôle dans la société postcoloniale.
Recueillis par Julien R.