
Négociations avec le FMI, élargissement de l’assiette fiscale, LFR 2015, exploitations de nos ressources naturelles. Interview du ministre des Finances et du Budget.
Midi : Où en sont les négociations avec le FMI ?
François Gervais Rakotoarimanana : « Comme nous le savons, le Fonds Monétaire International effectue actuellement une mission d’évaluation pour que Madagascar obtienne une Facilité de Crédit Rapide (FCR) à hauteur de 47 millions de dollars. Le FMI est également sur place afin de discuter des réformes à opérer dans les 6 mois à venir pour redresser l’économie. Cela s’inscrit dans le cadre du programme de référence qui nous conduira à la Facilité de Crédit Elargie (FEC) estimée à 80 millions de dollars par an sur une période triennale. Les négociations se déroulent bien et j’espère que ce sera le cas jusqu’à leur terme ».
Midi : Monsieur le ministre, les 56 points demandés par le Fonds Monétaire International font débat. D’aucuns pensent même qu’on se plie devant le FMI. Qu’en pensez-vous ?
FGR : « Je viens de dire à l’instant qu’il s’agit d’une mission d’évaluation sur le budget et son utilisation ainsi que sur l’économie malgache. Comme pour toute mission de ce genre, il y a une grille ou des critères d’évaluation qui permet de mesurer ce qui a été accompli. Les 56 points ont été transmis à l’avance pour faciliter la mission du FMI dont la durée est limitée. Je tiens à souligner qu’il s’agit de discussions sur le programme de Madagascar mais non pas de celui du FMI. Les réformes et la lutte contre la corruption n’attendent pas le FMI si on veut redresser l’économie. Les 56 points figurent parmi les sujets de discussion qui entrent dans le cadre de ces réformes et redressement. Cela ne signifie point qu’on se plie ».
Midi : Certains estiment que l’enveloppe de 47 millions de dollars attendue du FMI par Madagascar est assez faible par rapport à celles obtenues par d’autres pays ?
FGR : « Ce ne sont pas tellement les chiffres qui importent, mais les avantages liés à la conclusion des négociations avec le FMI qui signifie retour de la confiance des bailleurs de fonds et des investisseurs. La conférence des bailleurs fixera les financements des projets et programmes jugés prioritaires. Les projets qui n’auront pas été financés par le PTFS pourront l’être à travers les 3 P. On pourrait aussi recourir à un emprunt à taux concessionnel dont le taux d’intérêt est équivalent à celui des bailleurs traditionnels. Ou encore à un emprunt à taux non concessionnel qui est limité à 200 millions de dollars pour 2015, 100 millions pour 2016 et 100 millions également pour 2017 ».
Midi : L’appui du FMI est-il suffisant ?
FGR : « C’est un passage obligé pour le retour de la confiance des bailleurs et des investisseurs. Certes, ce n’est pas suffisant pour financer tous les projets de développement de Madagascar. C’est pour cela qu’il nous faut dorénavant bien gérer nos ressources naturelles (minières, halieutiques…). Il y a eu la création de l’Agence Nationale de l’Or (ANOR) afin d’identifier les petits exploitants et professionnaliser la filière or pour qu’on puisse exporter des lingots d’or légalement et selon les normes internationales. Par ailleurs, le code minier et le code pétrolier sont actuellement en cours d’élaboration pour qu’on puisse travailler avec les grandes compagnies. Le Salon des Mines ouvrira ses portes cette semaine afin d’attirer les investisseurs. Je tiens à réitérer qu’il faut prendre en main l’exploitation de nos richesses pour sortir le pays de la pauvreté ».
Midi : L’élargissement de l’assiette fiscale se traduira-t-elle par une augmentation des impôts ?
FGR : « Il n’y aura pas de hausse des impôts pour les contribuables, mais élargissement de l’assiette fiscale car il y a des gens qui ne paient pas d’impôts. D’où le contrôle des ventes sans factures, des irrégularités au niveau des grandes entreprises puisque ce ne sont pas uniquement les petits contribuables qui doivent payer. Il y a aussi le secteur informel qui doit intégrer le formel. Bref, on va élargir le nombre de ceux qui doivent payer des impôts afin d’augmenter les recettes de l’Etat ».
Midi : La Loi de Finances Rectificative 2015 fait également débat ?
FGR : « La LFR 2015 est un peu particulière. Les dépenses ont été révisées à la baisse en fonction des recettes. Il y a néanmoins des dépenses non prévues par la Loi de Finances qui ont été intégrées dans la LFR. A ce propos, je tiens à souligner que les dépenses des ministères ne sont pas du tout suspendues à l’adoption de la LFR. Ils peuvent faire des engagements pour les dépenses obligatoires. La LFR sera bouclée dès que la date de convocation de la session de l’Assemblée nationale sera connue. Elle sera soumise en conseil de gouvernement puis en conseil des ministres avant d’être déposée à Tsimbazaza ».
Midi : Quelle est la suite des fausses déclarations en douane constatées récemment au Port de Toamasina ?
FGR : « L’affaire est actuellement entre les mains de la Justice. Des personnes concernées ont été placées sous mandat de dépôt, d’autres ont bénéficié d’une liberté provisoire. Parallèlement, les investigations continuent au niveau des douanes concernant ce dossier que je suis personnellement de près. Je suis convaincu que les responsables de ces importations frauduleuses auront les sanctions qu’ils méritent ».
Propos recueillis par R. O