
Un homme a tué son frère et ses deux filles de six et quatre ans à Mahambolona Mandritsara, dimanche. Pour une question d’héritage. Probablement, les « ancêtres » de ces deux adultes, à en croire le dicton populaire, doivent se retourner sept fois dans leur tombe. Au-delà de ce geste mortuaire et ses raisons, il y a les chiffres. À Madagascar, les meurtres familiaux et les incestes forcées ont – que les responsables le veuillent ou non – connu une hausse et un élargissement géographique. Il s’agit ici d’un fils qui tue son père, d’un oncle qui viole sa petite nièce, d’une mère qui empoisonne son fils… Dans certaines cultures anciennes, judaïque par exemple, la multiplication de ces crimes serait déjà qualifiée de malédiction divine. Et une double malédiction, quand une nation perd le sens de ses vrais intérêts. Dès lors, cette situation de crise devient une opportunité offerte sur un plateau d‘argent pour les gourous religieux et crapuleux en quête de dîmes. Sur les réseaux sociaux, grâce inespérée du désenclavement, à voir la réaction des internautes, le meurtrier mériterait de finir six pieds sous terre. Si cela se produit, par « malchance », l’inculpé tombera aux mains de la population locale un de ces quatre matins. Un petit exercice comptable permet de conclure que les parents vont ainsi perdre deux fils. Pareil malheur ne figurerait que dans les mythes antiques. Sauf peut-être lors des époques claniques et royales à Madagascar, quand les petits royaumes s’attaquaient au sagaie et kidnappaient hommes, femmes et enfants pour en faire des esclaves. Du temps où la sphère d’appartenance ne dépassait guère le village, toute cette violence actuelle aura tôt ou tard des effets profonds sur la génération future, et pas qu’une seule. Les études démontrent que de cette terreur collective, se muant en peur serval, résulte une maladie sociale « auto immune ». Le temps travaillera pour faire surgir un pays sans fond, sans histoire et traumatisé. Les théories mentionnent que le village est un « témoin des origines », toute cette perception se défragmentera. Pas seulement à Mahambolona, mais dans tous ces petits hameaux qui sont des décors de crimes familiaux. Enfin, la violence perpétuelle (physique, économique, politique…) désagrège inévitablement la notion de liberté. Pas de liberté, pas de territoire. Avec une pression démographique faible, voire pauvre, Madagascar ne peut rien espérer et devient facile à recoloniser. Scène actuelle, les jeunes des villes « partent à l’île Maurice » et les jeunes des campagnes fuient vers Tananarive, Majunga, Tamatave, Tuléar…
Maminirina Rado