
Esquisse de héros malgaches version « Facebook »
Madagascar a besoin de vrais héros, « Facebook » est là pour les légitimer. Pas le héros tant mis en avant actuellement. Pas ces politiciens cousus d’or, obèses et snobant les mœurs quotidiennes du petit peuple par leur ostentation. Pas ces infatués hauts responsables, grands bavards, aux discours constipés tandis que, par exemple, le délestage perdure. Pas ces dandys bien « sapés » de la tendance actuelle, aux airs de petits bourgeois sans aucune once d’intellectualité. Pas ce(tte)s soi-disant bienfaiteur(e)s des pauvres, hyper accros au « selfie social ». Heureu(ses)x de voir des nécessiteux rester dans les mêmes conditions chaque « Noël » afin qu’ils et elles puissent s’acheter une conscience. Etc.
Bref, pas sur cet enjeu d’imagerie superficielle, voulant instaurer un canon du citoyen malgache conscient tandis que le pays sombre dans une pauvreté record. Pour faire court, les Malgaches ont besoin d’un Faneva Ima. Combattant l’adversité de toutes les formes et offrant un sentiment d’appartenance à un pays, à une race. Ils ont besoin d’un militaire, au bord du gouffre de la mort, nageant douze heures en pleine mer et de nuit, survivant d’un crash d’hélicoptère. La planète « Facebook » malgache s’identifie à ce type de héros.
À suivre ce réseau social depuis des années, l’exploit des Barea et celui du général Gellé battent les records de réactions des internautes de ces cinq dernières années. À eux deux, les Barea, Faneva Ima et le Général Gellé ont récolté plus de 8 000 partages. C’est vraiment loin d’être minime. Même la presse internationale, sûrement scotchée aux réseaux sociaux, ont parlé de « miracle », d’« exploit », d’« héroïsme »… Les points communs entre l’ancien capitaine de l’équipe nationale de foot malgache et le haut gradé sont : abnégation, altruisme et droiture.
Quand beaucoup prédisaient l’inutilité des Barea, Faneva Ima a persévéré, seul parfois au début avant la grande aventure de 2019. S’investissant personnellement, malgré les vents contraires. Dans le froid, l’humidité, le corps meurtri, le général Gellé a nagé avec les étoiles. Voilà l’abnégation, prendre tout sur soi pour s’en sortir ou atteindre un objectif. L’altruisme de l’acte, quand des millions de personnes se retrouvent dans les rues des villes, dans la liesse, la communion et l’espoir réveillé.
Quand sur une chaîne télévisée de la Capitale, le gendarme déclare avoir préféré mourir à la place de « ses petits frères ». Un goujat serait tenté de zinzinuler, « pourquoi ne pas les avoir suivi alors, mais tout tenter pour survivre ? ». C’est comme dire à Faneva Ima, « pourquoi alors avoir tout fait pour redorer les Barea puisque personne n’y croyait plus ? ». Et enfin la droiture. Depuis l’existence de la République malgache, jamais un ministre régalien n’a rendu public son numéro personnel afin que chaque citoyen le contacte directement si un gendarme fait preuve d’abus.
Ce serait presque logique que la sympathie « facebookienne » envers ces deux personnages atteigne son summum. Quand tout semble les acculer, ses valeurs transcendent toutes les autres chez les hommes de leur trempe. Ensuite, il ne faut pas oublier cet orgueil. De ne jamais se plaindre. De ne jamais admettre qu’il y eut un instant où ils ont voulu faire gagner la « mort » et que la famille se débrouille. Voulu jeter l’éponge par dépit. Cet orgueil jusqu’aux « tripes », cet orgueil de héros.
Maminirina Rado