
Ailleurs, les artistes et penseurs, même en Chine, pays réputé pour se soumettre au diktat d’une pensée unique, auraient engendré une tôlée sans précédent. Jusqu’à égratigner le statu quo « collectif » de la « bienséance » politique et culturelle. Parce qu’il faut avoir des tripes pour avoir du recul en visionnant les vidéos de ce couple accusé de sorcellerie, condamné à passer une épreuve archaïque afin de se justifier. Une scène choc sur Facebook à Sahavoatsilagna Sahasinaka dans le district de Manakara. L’homme et la femme sont obligés par les autochtones de faire trois va–et–vient sur un plan d’eau avec des parties profondes pour prouver leur innocence. Si les deux s’en sortent, leur dignité sera retrouvée. Le cas contraire, les accusations sont avérées. Le nom de ce rituel de l’absurde est « tangena ». Verdict absurde. La femme qui se plaignait de ne pas savoir nager meurt. Le monsieur, bon nageur, s’en sort. La foule hédoniste se réjouit du résultat. Repêchée, la dépouille de la dame a encore été profanée. Dire que c’est une tradition, issue de la sagesse immuable des ancêtres. Donc, ces derniers auraient été assez débiles pour accepter une sentence précipitée par l’incapacité d’une femme à nager. L’aspect sombre de ces traditions soutenues par ces slogans nationalistes naïfs est à intégrer dans tout débat sur la place de la tradition dans la dynamique nationale actuelle. Des traditions dans lesquelles l’immobilisme se camoufle trop souvent en amour de la terre ancestrale. Où la bancalité face à la dignité humaine est maquillée en immuabilité de la parole des aînés. Et au-delà de tout cela. Où toute tentative subjective de discuter toute idée, vision, croyance, qu’elle soit chrétienne, musulmane, traditionnelle, bouddhiste, animiste, etc., viendrait d’un « esprit mauvais ». L’obscurantisme des temps révolus est resté à Sahavoatsilagna Sahasinaka, et dans l’esprit de la continuité du territoire, à Madagascar.
Maminirina Rado



