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dimanche, juillet 20, 2025
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Intempéries : Antananarivo épargnée par Batsirai

La zone de tous les dangers à la Haute Ville, à quelques heures de l’entrée de Batsirai.
La route nationale 7 et ses vagues de personnes voulant rejoindre Behenjy, Ambatolampy…

Considérée comme la tempête la plus forte du monde cette année, Batsirai a épargné la capitale, tout juste meurtrie par les inondations d’Ana. Ambiance d’un jour de cyclone à Antananarivo.

07h00. A la gare routière de « Fasan’ny karana » à Anosizato, un jeune voyageur tente sa chance pour trouver un taxi-brousse pour Antsirabe, malgré l’interdiction formulée par l’Etat de cesser toute circulation régionale et nationale samedi, pour cause de cyclone imminent. Jusqu’à 15h, une vingtaine de personnes attendent un « miracle ». Rien. « Notre patron a voulu que nous travaillions tout de même une demie journée. Il a dit qu’il y aurait toujours un taxi-brousse, même en fin de journée », regrette Armand, un quadragénaire.

Son village se trouve en périphérie de la ville d’Eaux. Et de continuer, « les femmes sont restées là-bas, il faut tout de même un homme au village en ce jour de cyclone ». Il faudrait avoir 50 000 Ariary pour qu’un fourgon accepte de l’emmener. Soit presque trois fois le prix normal. Et le voyage est limité à seulement deux personnes. « Donc, ils pensent que nous allons leur payer leur carburant pour retourner à Antsirabe. C’était comme cela lors des périodes de confinement », fait–il savoir. Finalement, la chance ne lui sourira pas.

Pour les destinations plus proches sur la RN7, le trajet se fait en deux étapes. Le bus arrive jusqu’à Tsinjony, limite autorisée. Ensuite, il faut marcher environ une heure pour rejoindre Behenjy, un peu plus pour Ambatolampy et les villages alentour. Gislain Ramanantsoa, vendeur d’objet artisanal non loin du terminus fait savoir, « Il y a des vagues de marcheurs et de personnes à bicyclette depuis ce matin. Ils partent depuis Antananarivo, ils travaillent là-bas. Ils y retourneront dès que le cyclone sera parti ». La sécurité veille au grain.

09h30. Behenjy est calme. Les riverains se plaignent de la baisse des usagers de la route. A la gendarmerie, c’est le calme qui prévaut. « Une réunion s’est tenue avec toutes les entités », rassure le chef de poste. Au cas où, les sinistrés de la commune seront accueillis dans les maisons des « zanak’ampielezana ». Une première à Madagascar. Des habitations de particuliers, originaires de la capitale du foie gras, mais qui sont installés dans la capitale, vont servir d’abris de secours. Puis, les écoles publiques, les églises, seront des options.

Mais les habitants du coin sont plutôt sereins. Sauf que les eaux ont détruit les champs de légumes il y a quelques semaines. Du coup, les légumes sont devenus chers dans des villages comme Antanifotsy. Le riz a aussi connu une hausse de prix depuis quelques jours.

10h00. A Antananarivo, les préparatifs battent leurs pleins. En prévision des sinistrés, le parquet du gymnase couvert de Mahamasina subit une grande toilette sous la direction des sapeurs-pompiers. Tandis qu’à Anosizato ouest, le Ceg retrouve d’anciennes têtes. « Nous sommes des sinistrées, nous sommes rentrées chez nous il y a quelques jours mais nous avons dû retourner ici pour nous abriter », expose une mère de famille. Dans les salles de classe, de fortes odeurs corporelles s’imposent même aux enfants. Difficile pour ces familles de penser à l’hygiène. « Nous n’avons rien à manger, nous devons nous débrouiller », renchérit-elle.

Vendredi, elles ont eu un repas offert par un donateur privé. Les hommes doivent maintenant sortir pour trouver un peu d’argent afin de nourrir la famille. Au gymnase couvert d’Ankorondrano, le ministère de la Population offre le couvert et le repas, en rang serré à des centaines de personnes, à midi et le soir aux sinistrés. « Le matin, ce sont seulement les enfants et les mères qui bénéficient de repas », annonce un jeune d’un ton boudeur. Ne sachant pas qu’à quelques encablures de là, d’autres familles de sinistrés sont complètement désœuvrées.

14h00. En ce jour de samedi, jour d’entrée de Batsirai sur le sol malgache, les regards se tournent vers une des zones les plus craintes de la capitale. Les quartiers de la Haute Ville et ses risques d’éboulement. A travers les escaliers qui mènent en aval, vers Mahamasina, les petits drapeaux en tissus rouges rappellent que le danger est plus que jamais présent. Avec des rafales de ce cyclone estimées à 70 km/h et surtout des fortes pluies dans la soirée. Les restes d’une maison ensevelie, avec une chaussure laissée dans la précipitation, glacent le sang.

« Pour le moment, aucune annonce n’a été émise sur le fait que nous devons quitter les lieux ou non. Alors nous restons », met en avant un père de famille, une cigarette à la main et le regard scrutant timidement le ciel. Juste sous sa clôture se trouve un petit drapeau rouge. Lui et sa famille sont aux premières loges. Les Tananariviens semblent se résigner. Après Ana vient ensuite Batsirai. Ils ont l’air de se dire qu’ils veulent prendre les choses comme elles viennent. La combativité en moins.

20h00. Dans les quartiers populaires de la capitale, Ambohimanarina, Andohatapenaka, Andavamamba et d’autres, les bars égaient un peu ces rues et ruelles de la capitale de plus en plus vides. A Analakely, la vie nocturne se poursuit. Les filles de joie et les rabatteurs en boisson hygiénique et alcooliques font fi des premières rafales. Le vent se durcit. Batsirai a maintenant la moitié de son œil dans le district de Mananjary. Dans la capitale, les premières bourrasques se font ressentir. La pluie a cessé. Une bénédiction pour les sinistrés d’Anosizato ouest, qui pourront dans quelques jours espérer rentrer.

Les taxis restent en place à Antaninarenina. Les cabarets et boîtes de nuit ferment à double tour. Sous les arcades d’Analakely, les SDF se calfeutrent. Quelques quartiers de la capitale se trouvent privés d’électricité. Mais celle-ci revient rapidement. La ville des Mille se prépare à subir.

23h00. Sur les réseaux sociaux, des témoignages affluent. « Ici le vent est inquiétant, Itaosy ». « De même à Ilafy ». « Oui à Talatamaty, c’est effrayant ». Vers 02h00 du matin, les rafales se calment enfin. Batsirai est loin, quelque part non loin de Fianarantsoa. Antananarivo est épargnée.

Maminirina Rado

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