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mardi, juillet 8, 2025
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Interview du Directeur Général des Impôts, Rajoelison Liva

Le Directeur Général des Impôts (DGI) Rajoelison Liva
Le Directeur Général des Impôts (DGI) Rajoelison Liva

« Sans recettes fiscales suffisantes, l’Etat ne pourra répondre aux défis du développement de notre pays »

Midi : Monsieur le Directeur Général, la collecte fiscale à Madagascar stagne depuis plusieurs années à environ 10% du PIB, l’un des taux les plus faibles au monde. Comment expliquez-vous cette faible performance ?

DGI : « En premier lieu, la collecte fiscale est faible parce que la base fiscale est étroite : Parmi nos concitoyens, nombreux sont ceux qui n’ont qu’une activité de subsistance. Ceux-là ne peuvent apporter qu’une contribution modeste au budget de l’Etat. A l’autre bout du spectre, de nombreuses entreprises, y compris de taille significative, exercent dans le secteur informel frauduleux. Le civisme fiscal est encore trop faible à Madagascar.

Le faible taux de pression fiscale est aussi la conséquence de la politique menée depuis de nombreuses années, consistant à accorder des conditions fiscales généreuses aux entrepreneurs et aux entreprises pour favoriser les investissements à Madagascar. Comprenez-moi bien : Je ne dis pas ici qu’il faut remettre en cause ces exonérations, cette décision ne m’appartient d’ailleurs pas. J’estime cependant qu’il faut nous doter des moyens d’évaluer le rapport coût/avantage pour Madagascar de ces exonérations, en tenant compte bien sûr des bénéfices de ces investissements en termes d’emploi, de devises, d’apport technologique…et donc de recettes fiscales induites. C’est un travail relativement complexe que nous avons d’ores et déjà débuté et qui sera achevé l’année prochaine.

Midi : Quelle est la situation de la recette fiscale actuellement, et quelle est la tendance ?

DGI : « En matière de recettes, la DGI a atteint 106% des objectifs à fin novembre, avec un excédent de recettes de l’ordre de 60 milliards d’Ariary par rapport aux objectifs qui lui ont été assignés, qui seront respectés à la fin de l’année. Cette recette, en progrès par rapport à l’année dernière, constitue le premier résultat tangible des réformes qui ont été entreprises depuis quelques mois à la DGI. Notre organisation et nos procédures internes ont été modifiées pour être plus efficaces dans la relance des contribuables qui ne déclarent pas ou ne payent pas régulièrement leurs impôts, et dans la lutte contre le secteur informel pour élargir l’assiette. Nous nous sommes également dotés de nouveaux systèmes d’information pour exploiter de manière systématique les renseignements collectés par exemple auprès de la douane, et qui nous permettent de mieux lutter contre les activités dissimulées. Par exemple, l’annexe électronique à la déclaration de TVA va permettre de rapprocher les déclarations de TVA d’un fournisseur avec celle de son client. Cette modernisation va se poursuivre au cours des prochaines années à un rythme élevé ».

Midi : Que faites-vous pour les opérateurs qui se plaignent du manque de clarté de la loi fiscale ?

DGI : « Nous avons en réalité lancé de nombreuses réformes structurantes, visant aussi bien à rendre un meilleur service aux contribuables de bonne foi qu’à lutter plus efficacement contre la fraude.

Sur le sujet que vous évoquez, et à l’issue d’une consultation directe des représentants des contribuables au mois de septembre, qui est la concrétisation d’un véritable dialogue public-privé, nous avons élaboré une première version du guide d’application du code général des impôts qui sera très prochainement disponible sur le site web (www.impots.mg) de la DGI et également en version papier. Il sera enrichi continuellement, et est destiné à renforcer la connaissance de la loi et des procédures fiscales par les contribuables. Il vise aussi, et c’est une question importante pour les contribuables, à assurer une application uniforme des règles par l’administration sur l’ensemble du territoire. Il constitue à ce titre un net progrès pour la sécurité juridique. Actuellement, nous sommes aussi en train de mettre au point en collaboration avec les opérateurs téléphoniques, des numéros d’assistance sur les textes fiscaux via les « les téléphones mobiles ».

Midi : Que répondez-vous aux opérateurs qui se plaignent d’excès dans les contrôles fiscaux ?

DGI : « Dans la théorie de l’impôt, le contrôle fiscal constitue la contrepartie légitime du système déclaratif. Nous sommes cependant conscients des difficultés dans la sphère du contrôle fiscal, qui est considéré comme inéquitable par de nombreux opérateurs, rapporte peu à l’Etat et n’est pas assez dissuasif. Pour concentrer nos actions sur les fraudes les plus importantes et alléger notre présence pour les entreprises de bonne foi, celles qui respectent bien leurs obligations fiscales, nous avons récemment mis en œuvre un éventail de mesures visant premièrement à s’appuyer sur des logiciels de recoupements et d’analyse-risques pour sélectionner à partir de critères objectifs et de manière la plus sélective possible les dossiers à contrôler. Nous sommes également engagés dans une démarche d’amélioration de la qualité des investigations, pour éliminer les redressements irréalistes, qui nuisent à l’image de la DGI comme au climat des affaires. Cette démarche qualité s’appuie notamment sur des standards de service comme le respect du débat contradictoire et des délais par les agents du fisc. Nous réfléchissons également, avec l’aide de la Banque Mondiale, à l’amélioration des recours offerts aux contribuables après un contrôle. Cette réflexion devrait aboutir à des mesures législatives et réglementaires l’année prochaine, dont l’objectif sera de réduire le potentiel de conflits sur les aspects formels des recours pour se concentrer sur le fond des affaires et alimenter une jurisprudence qui contribuera à clarifier les termes de la loi ».

Midi : Quelles sont les perspectives de l’administration fiscale pour les prochaines années ?

DGI : « C’est en réalité sur tous les sujets que nous avançons : Recours accru à l’informatique et aux télédéclarations pour gagner en efficience et dans le même temps faciliter les obligations déclaratives et réduire les risques déontologiques, renforcement du recouvrement forcé lorsque c’est nécessaire, poursuite de la lutte contre le secteur informel pour élargir l’assiette notamment par le recensement physique des activités au moyen du Système d’Information Géographique (SIG)…

Nous allons aussi continuer à améliorer notre relation aux usagers, notamment au travers du renforcement de la communication externe, de conditions d’accueil améliorées, d’actions de formations des agents sur les standards de service. L’entrée en fonction dans les bureaux fiscaux des 400 agents et contrôleurs recrutés l’année dernière apportera assurément un plus à la qualité de l’accueil.

Ce sont des chantiers importants à effets progressifs. Mais nous sommes déterminés à moderniser l’administration fiscale. Car encore une fois, sans recettes fiscales, l’Etat ne pourra répondre aux défis du développement de notre pays ».

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