
« Une approche globale afin de répondre aux ambitions, besoins et enjeux du développement durable », affirme Denis Levy, chef de projet de COI-ENERGIES.
Du 28 au 30 mai 2018, se tiendra à Maurice le premier Forum régional des énergies durables, initié par la COI (Commission de l’Océan Indien). Denis Levy, chef de projet de COI-ENERGIES, dresse un tour d’horizon de la situation régionale en matière d’énergie en général et d’énergie durable, en particulier et en dessine les enjeux pour les Etats membres de la COI, dont Madagascar.
MIDI Madagasikara : Un Forum régional inédit sur les énergies durables se tiendra à Maurice dans quelques semaines. De quoi s’agit-il exactement et quels en sont les principaux objectifs ?
Denis Levy : Le Forum régional des énergies durables est organisé par la Commission de l’Océan Indien dans le cadre de son programme « ENERGIES » financé par le 10e FED (ndlr, Fonds européen de développement). Ce programme a pour objectif le développement des énergies renouvelables et l’amélioration de l’efficacité énergétique dans les Etats membres de la COI. Il s’agit, par la création de ce Forum régional, de tisser des liens entre tous les acteurs de l’énergie et de favoriser un partage d’expériences, l’objectif du projet étant de permettre un meilleur accès à l’énergie pour les populations de la zone de la COI. Ce Forum se veut une « fenêtre sur le développement énergétique durable dans la région » et un lieu de débats et d’échanges autour d’une réflexion prospective pour les décideurs de l’Indianocéanie. Il fera dialoguer universitaires, industriels, hommes de l’art et représentants des institutions sur les questions d’énergie et de développement durable.
M.M. : Pouvez-vous dresser un bref état des lieux en matière d’énergies renouvelables dans la région ?
D.L. : Les pays membres de la Commission de l’ Océan Indien (COI) ont des économies et des secteurs de l’énergie hétérogènes. Ils sont très dépendants des combustibles fossiles dont au moins 81% de l’énergie primaire sont importés (pétrole et charbon). Les Comores et Madagascar importent 90 % de leur énergie commerciale sous la forme de combustibles fossiles. L’Ile Maurice dépend à 56 % des produits pétroliers, à 29% du charbon et à 15 % des énergies renouvelables pour ses besoins énergétiques primaires et cette dépendance s’élève à 95% pour les Seychelles. La Réunion, département français et Région Ultra Périphérique européenne, jouit d’une politique de développement des énergies renouvelables dynamique qui lui a permis d’atteindre un niveau élevé dans ce domaine, niveau qui devrait encore progresser d’ici à 2030. A la Réunion, les énergies renouvelables représentaient 36% de l’électricité en 2015 et 34,1% en 2016 (variations dues aux conditions climatiques).
M.M. : Quelles contributions « COI-ENERGIES » entend-elle apporter au développement de l’énergie durable dans les Etats membres de la COI ?
D.L. : Il s’agit, à travers le programme « COI-ENERGIES », de faciliter les conditions d’accès à l’investissement et à la gestion durable des énergies renouvelables et d’augmenter l’efficacité énergétique des différents secteurs économiques. Les résultats attendus sont (i) une stratégie énergétique régionale focalisée sur le développement des compétences et des institutions ; (ii) une stratégie de communication et de sensibilisation sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique ; (iii) un cadre réglementaire et un climat des affaires favorisant la production d’électricité d’origine renouvelable ; (iv) le renforcement des capacités des organismes gouvernementaux et des investisseurs privés en termes de conception, d’ingénierie, de construction et de gestion de systèmes décentralisés de production électrique et d’énergie basée sur des sources d’énergie renouvelables et (v) des normes de performance énergétique pour les bâtiments neufs et les appareils électroménagers.
M.M. : Quels volets seront alors spécifiquement abordés lors du Forum régional ?
D.L. : Lors du Forum, les professionnels pourront partager les dernières avancées sur l’état de l’art ainsi que des pistes de réflexion en matière de :
- Gouvernance : (i) environnement réglementaire et climat des affaires pour l’accès à l’énergie ; (ii) définition et mise en œuvre de stratégies énergétiques visant les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique ;
- Intégration des énergies renouvelables dans les systèmes électriques ;
- Efficacité énergétique dans l’industrie et le secteur du bâtiment en particulier.
M.M. : Dans cette initiative, quelle place est accordée au secteur privé pour le développement de l’énergie renouvelable ?
D.L. : Le secteur privé aura toute sa place, comme acteur central du développement de l’accès universel à l’énergie, des énergies renouvelables et de la performance énergétique, aux côtés des représentants des organismes de régulation, des représentants des administrations en charge de l’énergie et des sociétés nationales d’électricité. N’oublions pas les acteurs publics et privés de la recherche et de l’innovation.
M.M. : En ce qui concerne les pays comme Madagascar où moins de 15% de la population ont accès à l’énergie électrique, peut-on espérer de ce Forum régional l’émergence de perspectives concrètes en vue d’un meilleur accès à l’énergie et une « démocratisation » des énergies renouvelables ?
D.L. : Au-delà des échanges sur la gouvernance et les aspects plus techniques concernant tant l‘accès universel à l’énergie et les énergies renouvelables, un atelier spécifique sera consacré aux outils et solutions de financement. Ce Forum se veut être un lieu de rencontres et d’affaires sur l’Indianocéanie, dont pourront bénéficier les participants malgaches, avec une approche globale du marché des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique afin de répondre aux ambitions, besoins et enjeux du développement durable.
Propos recueillis par Hanitra RAMAHATRA