
Un coût estimatif de 60 millions USD est évoqué par les experts internationaux pour éradiquer totalement ces espèces invasives sur une période de 5 à 7 ans.
Une superficie de 120 km², soit près de 12 800ha sont maintenant envahis par les crapauds asiatiques toxiques dénommés « Radaka boka » au sud de Toamasina. « Selon les estimations en 2015, la population actuelle compte près de quatre millions de crapauds compte tenu de la densité approximative moyenne de 400 crapauds par hectare. Le front d’invasion semble se déplacer à environ 2km par an. Et ce crapaud se reproduit rapidement en produisant jusqu’à 40 000 œufs par an. Il a également une longue durée de vie », a expliqué le Dr James Reardon, un expert du Département de la Conservation de Nouvelle-Zélande, lors de la présentation du rapport de faisabilité de l’éradication de ces têtards hier au Motel à Anosy. Cela devient ainsi une nouvelle menace pour la biodiversité de Madagascar si aucune mesure n’est prise dans l’immédiat.
60 millions USD. En effet, “sans une action rapide, nous prévoyons que les effets de ce crapaud seront dévastateurs. Il pourrait perturber les chaînes alimentaires et entraîner les prédateurs indigènes, les proies et concurrents à diminuer, ou même à disparaître”, a évoqué Christian Randrianantoandro de Madagasikara Voakajy. Notons que le « Radaka boka » peut se propager à travers la plupart des habitats à Madagascar sans barrières évidentes. Cependant, sa distribution a été limitée à cette superficie de 120 km². « Ce qui nous donne l’espoir que nous pouvons le contenir pour l’éradication, mais seulement si nous agissons maintenant », a enchaîné le Dr James Reardon. Cet Herpétologue a rajouté que son éradication peut coûter plus cher si l’on attend encore en raison de sa multiplication rapide. « Un coût estimatif de l’ordre de 60 millions USD est nécessaire pour ce faire, y compris le financement de la mise en place des structures de lutte à tous les niveaux. En fait, ce projet d’éradication totale doit s’étendre jusqu’à 5 voire 7 ans,», a-t-il poursuivi. La situation est encore plus compliquée en raison de l’absence de biosécurité appliquée aux frontières à Madagascar.
Essai d’éradication. En attendant, Madagascar Fauna and Flore Group, un organisme de conservation basé dans la Région Atsinanana, a déjà mobilisé des donateurs internationaux pour collecter 25 000 USD servant à financer les essais d’éradication sur terrain qui ont déjà démarré depuis mi-janvier. La population locale est également impliquée dans cette lutte. En effet, le projet d’éradication comprend notamment le traitement de ces espèces envahissantes par l’acide citrique, l’enlèvement manuel et le piégeage des têtards. « L’utilisation de chiens bien entraînés pour détecter les crapauds peut aussi se faire en plus d’un système acoustique pour capturer le son émis par les mâles en tant que méthode de suivi. Il faut en même temps une campagne de sensibilisation pour accompagner ces méthodes », a fait savoir le Dr James Reardon. Rappelons que les effets néfastes de cette invasion de crapauds toxiques sont nombreux. A part la menace de la biodiversité, un risque considérable d’intoxication humaine par leur consommation est à craindre. Le commerce en provenance de Madagascar pourrait être également affecté. En effet, l’Australie a déjà effectué une restriction commerciale avec des pays où l’on identifie ces animaux toxiques.
Port de Toamasina. Quant à l’origine de cette invasion de crapauds asiatiques. Ces chercheurs ont publié dans leur rapport que cela provient des pays d’Asie, notamment le Cambodge ou le Vietnam ou la Thaïlande. « C’est introduit dans le pays entre 2010 et 2011 via le port de Toamasina. La zone centrale de la distribution de crapaud actuelle comprend l’usine de transformation minière d’Ambatovy, ce qui représente l’activité économique dominante dans cette région », ont-ils évoqué. De son côté, le projet Ambatovy a tenu à préciser que « le port de Toamasina traite plus de 130 000 conteneurs par an dont un grand nombre en provenance d’Asie. Bien qu’Ambatovy reçoive des livraisons de conteneurs par le port, celles-ci ne représente que 5 % du total des marchandises. Il est extrêmement difficile de conclure de manière absolue lesquels des conteneurs importés contenaient ces espèces invasives. En outre, la densité des crapauds relevée sur les sites d’Ambatovy est très en deçà de celle observée ailleurs, a-t-on conclu.
Navalona R.